Nuits Magiques : La Dolce Vita

1990. Alors que la Coupe du Monde de football bat son plein en Italie, une voiture s’écrase dans le Tibre dans l’indifférence générale des gens attablés aux terrasses des cafés, les yeux rivés sur l’écran de télévision. A bord de la voiture, le producteur Leandro Saponardo, vieux briscard magouilleur, est retrouvé mort. Dans la liste des suspects, trois aspirants scénaristes qui sont immédiatement convoqués au commissariat. Ceux-ci se remémorent leur parcours, leur arrivée à Rome les étoiles plein les yeux et les désillusions qui ont suivi et racontent leur rencontre avec Saponardo.

Après une échappée belle aux États-Unis, Paolo Virzi revient en Italie pour Nuits magiques, déclaration d’amour pétrie de tendresse et de nostalgie au cinéma italien de la belle époque, celui où les maestros Fellini, Scola, Rossellini, De Sica et Antonioni régnaient en maîtres. Pas étonnant que Virzi ait choisi de situer l’action de son récit en 1990. C’est l’année de la sortie du dernier film de Fellini et le début d’un sacré déclin pour le cinéma italien où tous ceux qui en font sont des vieillards jaloux et forts en gueule, symboles d’un cinéma qui se meurt (lors d’une scène du film, une productrice parle de faire appel à des jeunes… qui sont âgés de 60 ans !) et qui n’a pas su se renouveler.

Virzi regarde ce monde avec une sacrée tendresse mais également avec une farouche lucidité, bien conscient des compromis du milieu, des fausses promesses et des espoirs brisés. En concentrant son récit sur le regard de trois jeunes scénaristes aux horizons différents (l’un intellectuel venu de Sicile, l’autre venant d’un milieu ouvrier, l’une carrément d’un milieu bourgeois étriqué), il effectue un vaste panorama de ce monde du cinéma si particulier, si enchanteur mais également si décevant. Alors que l’intellectuel Antonino sera prêt à tous les compromis pour voir son scénario porté à l’écran, Luciano n’acceptera pas de voir son personnage d’ouvrier inspiré de son père dénaturé par un acteur-star tandis que Eugenia déchantera vite de sa rencontre avec cet acteur qu’elle admirait tant.

Cruel miroir aux alouettes, le cinéma n’en est pas moins magique et surtout bouillonnant de vie, une vie que capte à merveille Paolo Virzi dans un film à la fois très tendre et très drôle, truffé de personnages irrésistibles (tous campés par d’excellents acteurs), confrontant ses jeunes héros à la vieille garde d’un cinéma qui se meurt mais qui se débat avec énergie pour tâcher de conserver sa splendeur. Rarement le cinéma de Virzi n’aura été aussi juste et aussi émouvant, parvenant à trouver un équilibre fabuleux entre le désir de fiction et de fantasme du cinéaste, faisant de Nuits magiques l’une des plus belles déclarations d’amour faite au cinéma italien et à ses maîtres…

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