Yuli : Une oeuvre maîtrisée de bout en bout.

Après les plus grands rockeurs de l’histoire, c’est au tour des danseurs de ballet d’avoir leur heure de gloire. Qui s’attendait un jour à voir coup sur coup deux biopics sur des personnalités dont l’activité n’a pas forcément une grande popularité au cinéma à l’heure actuelle ? Alors que Noureev, biopic sur la vie de Rudolph Noureev est sorti récemment, Yuli, qui retrace la vie d’un de ses collègues auquel on le compare souvent, sort quelques semaines après. Amusant de constater à quel point le hasard fait parfois bien les choses et gratifiant de se dire qu’à eux deux, ces films donneront plus de visibilité à un art de niche.

Derrière la caméra de ce film espagnol, on trouve Iciar Bollain, réalisatrice confirmée et récompensée à de multiples festivals, s’attelant pour la première fois à un biopic. Un biopic concernant le danseur étoile Carlos Acosta, cubain d’origine et parmi les plus grands danseurs étoiles de sa génération. Ce n’est cependant pas tout à fait une première tentative de la part de la réalisatrice de s’atteler à la réalité. En effet, celle-ci aime exposer les situations économiques et sociales des pays qu’elle met en scène dans ses films. Cuba n’est donc pas le premier pays dont elle fait le bilan sociologique, historique et politique au travers de son personnage principal. Yuli retrace donc le destin inattendu de Carlos Acosta, de ses performances breakdance à la Michael Jackson jusqu’à sa carrière de danseur étoile d’aujourd’hui.

Contrairement à ce que laissait présager la bande-annonce, qui ne vend qu’à moitié bien le long métrage soit dit en passant, le film possède une structure narrative particulièrement intéressante. Loin de l’évolution scénaristique de la majeure partie des biopics, celui-ci se construit de manière épisodique. Carlos, adulte et artiste confirmé d’aujourd’hui, revient sur son parcours au travers d’une sorte de livre photo annoté et dont il conte l’histoire par période à ses élèves du cours de Ballet. Ainsi il y a un mélange de diverses idées déjà vues pour offrir une narration assez originale. Des évènements se feront écho sans tomber dans une linéarité de contage ou une prévisibilité des rebondissements. On plonge dans cette vie et son histoire de manière fluide. Une des raisons de cette simplicité est que le principal intéressé joue son propre rôle. En effet Carlos Acosta joue son rôle dans sa partie de vie actuelle, renforçant ainsi énormément l’impact de ses propos. Lorsqu’il parle de son père et de ses choix, on ressent la sincérité et la vérité de ses paroles. Soudainement, on plonge dans une docu-fiction plus qu’un biopic. Bien qu’il ne cherche pas à nous émouvoir et qu’il narre son passé le plus justement et sincèrement possible, son discours trouve une profondeur bien plus percutante. Contrairement à de nombreux autres biopics, les évènements que l’on voit de sa vie passée touchent notre sensibilité avec plus d’impact et on ne remet jamais en doute la véracité ou la précision des événements. Même en ignorant qu’il s’agit du véritable danseur de ballet, le discours fonctionne efficacement. La sincérité des dialogues transcende la facticité du jeu.

En ce sens il faut préciser que Yuli est parfaitement bien écrit. Jongler entre les différentes périodes de vie avec autant d’aisance et de clarté démontre une maîtrise tant sur le fond que sur la forme de son sujet. Les images, les plans, les cadres dégagent une certaine âme. On vit la vie de ce jeune homme bien plus que de nombreuses autres productions dont l’écriture est affreusement banale. Chaque protagoniste de cette histoire possède la profondeur qui lui est due, y compris la ville et les rues de Cuba. Par ailleurs, on y apprend également beaucoup sur le métier de danseur de Ballet. Et au même titre que nous l’avais démontré le documentaire Parfaites, il n’est pas aussi simple qu’on ne le pense et mériterait nettement plus de reconnaissance.

En définitive Yuli est une vraie réussite et une petite pépite pour ceux qui aimeraient découvrir de nouveaux univers comme celui de la danse. On y découvre beaucoup sur son lieu, son protagoniste principal et son activité. Un film complet, touchant et sincère, nous donnant envie de découvrir le travail de la réalisatrice.

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