Laurel et Hardy : Les Inséparables Compères

À eux deux, ils forment le duo comique le plus célèbre de l’histoire du cinéma. Sans forcément avoir vu leurs films, leurs silhouettes sont reconnaissables entre mille. Laurel et Hardy sont des icônes comiques, des gens qui nous sont aussi familiers qu’un Charlot, que l’on apprend à identifier jeunes mais que l’on met du temps à véritablement connaître. La sortie du biopic très touchant qui leur est consacré, sobrement intitulé Stan & Ollie, est l’occasion de revenir sur le début de carrière de ces deux compères inséparables, leur duo ayant mis du temps avant de se former.

En effet, quand Laurel et Hardy apparaissent dans leur premier film ensemble en tant que Laurel et Hardy, les personnages qu’ils se sont créés et pour lesquels ils deviendront célèbres (le rêveur lunaire maladroit et un peu bêta d’un côté, le gros râleur plus terre à terre de l’autre), nous sommes déjà en 1927.  À cette époque cela fait déjà plus de dix ans que les grosses stars du muet comme Charlie Chaplin et Buster Keaton tournent et rencontrent le succès.

S’ils connaissent le succès sur le tard, tout du moins par rapport à leurs collègues, Stan Laurel et Oliver Hardy sont pourtant loin d’être des débutants quand leur duo se forme. Hardy tourne dans des courts-métrages dès 1914 et a une expérience en tant que chanteur de cabaret tandis que Laurel débute dans le music-hall et tourne dès 1917. Le physique d’Ollie le confine très rapidement à un registre précis, les réalisateurs et producteurs de l’époque le mettant en duo avec d’autres acteurs pour former un contrepoint comique.

Laurel, de son côté, est envisagé par les producteurs comme une nouvelle sorte de héros comique. Ses débuts dans le cinéma sont en effet très différents du personnage qu’il composera et qui le rendra célèbre. Il y apparaît beaucoup plus sérieux et sûr de lui. C’est dans cette optique qu’est réalisé le film Le Veinard en 1919, censé faire de Laurel le héros d’une nouvelle série de films. Le destin place alors pour la première fois Hardy sur le chemin de Laurel (et vice-versa) puisqu’il s’agira du tout premier film qu’ils tourneront ensemble, Hardy y interprétant un voleur.

Le Veinard, première apparition de Laurel et Hardy dans un film ensemble

Il faudra ensuite attendre 1926 pour que les deux hommes figurent de nouveau à l’affiche d’un même film. Ils travaillent alors tous deux pour le producteur Hal Roach, qui les fera tourner jusqu’en 1940. Producteur intraitable (les contrats qu’il a rédigé pour ses deux stars ne leur permettront jamais de vivre correctement des revenus engendrés par les films), Roach tourne des films à la pelle et pour l’instant il ne se doute pas qu’il a deux stars entre les mains. Aussi Laurel et Hardy n’ont aucun plan en commun dans Scandale à Hollywood.

C’est en 1927 que le duo se forme officiellement. En attendant, Laurel s’est essayé à la réalisation, nourrissant clairement plus d’ambition que son futur compère Hardy. En effet, si celui-ci s’est toujours amusé à faire l’acteur, il préfère de loin les paris sportifs et reviendrait bien à ses premières amours, à savoir le cabaret. Laurel, lui, a toujours été la tête pensante du groupe, écrivant la majorité des gags.

En 1927, Laurel et Hardy ont tourné plusieurs films ensemble. Leur premier film ‘’officiel’’ n’a jamais été vraiment déterminé. Déjà parce que certains sont sortis avant d’autres qui étaient déjà tournés, mais parce qu’on ne sait pas vraiment quand le duo a commencé à exister de lui-même. Par exemple, dans un film comme L’ancien flirt, ils apparaissent ensemble à l’écran dans des rôles plus secondaires, laissant la vedette à James Finlayson avec qui ils tourneront une trentaine de films. Mais dès que Finlayson n’est plus à l’écran, Laurel et Hardy sont Laurel et Hardy tels qu’on les connaît. Étant donné qu’ils ont beaucoup tourné en 1927, on ne saura pas si c’est Maison à louer ou Les forçats du pinceau qui marquent la création du duo, les deux films étant régulièrement cités et disputés au titre de premier film de Laurel et Hardy.

De même, on ne saura jamais vraiment à qui attribuer la paternité de l’existence du duo comique. Si Hal Roach, qui avait les deux comédiens sous contrat à l’époque où ils se sont fait connaître, a longtemps clamé être le seul responsable de cette association, il n’est vraisemblablement pas le seul à pouvoir se vanter de cette formation. De fait, Laurel et Hardy n’ont jamais rien dit sur les circonstances et la formation de leur duo, laissant planer le mystère et la magie du cinéma. Ces absences de déclaration ont toujours laissé le champ libre à d’autres personnes clamant leur paternité du duo comme Leo McCarey qui fut superviseur de plusieurs films chez Hal Roach ou Fred Guiol qui fit beaucoup tourner les deux stars à leurs débuts.

Une fois lancés, presque comme une évidence, Laurel et Hardy ne tardent pas à rencontrer à deux le succès qu’ils n’auraient probablement pas eu autant s’ils avaient continué leurs carrières en solo. De fait, ce succès fulgurant, prolongé par une belle inventivité de la part des compères (qui passèrent au parlant dès 1929 et jouèrent dans le premier court-métrage de fiction oscarisé de l’histoire du cinéma avec Livreurs, sachez livrer ! en 1932) leur permirent d’établir leur gloire.

Livreurs, sachez Livrer !, le premier court-métrage oscarisé de l’histoire du cinéma

Leur génie comique, reposant sur les différences de leur duo mais également sur un étirement jusqu’à l’absurde de certaines situations, n’a d’ailleurs pas pris un seul coup de vieux aujourd’hui. Certes, les deux compères n’ont jamais eu la fibre humaniste d’un Chaplin ou la folie des cascades d’un Keaton. Dans leurs films, Laurel et Hardy bousculent légèrement l’ordre établi par leur présence mais ils ne s’encombrent pas de morale. Leur prétention s’arrête à la volonté de divertir le public, de prendre certaines situations pour les renverser, de faire durer les moments comiques au maximum. De ce fait, ils ont peut-être moins marqué l’histoire du cinéma. Leurs longs-métrages, au nombre de 23, n’ont jamais eu la puissance et la renommée de ceux de leurs pairs. D’ailleurs, ils étaient souvent fabriqués à partir d’un court-métrage puis rallongés pour arriver à une longueur correcte. Mais cela n’empêche en rien la force comique qu’ils contiennent et surtout la bonne humeur qu’ils diffusent. Car regarder un film avec Laurel et Hardy, c’est comme retrouver de vieux copains : on connaît le programme mais on sait qu’on ne saurait rêver mieux, cette familiarité avec le public que le duo a créé étant sans aucun doute leur plus belle marque de fabrique…

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