Creed 2 : La famille avant tout

Il y a comme une impatience combinée à une méfiance avant la découverte de Creed II. Le premier film était le pari d’un jeune metteur en scène, avec le soutien indéfectible de Sylvester Stallone, de raviver la flamme d’une saga emblématique. Ryan Coogler avait relevé le pari avec brio tant par une mise en scène mature, mais surtout par un scénario sensible et épique. Comme s’il avait réussi à se réapproprier les valeurs du cinéma de Sylvester Stallone.
Pour Creed II, Ryan Coogler n’est que producteur exécutif pendant que Sylvester Stallone reprend les rênes de l’histoire. Une suite couillue qui nous ramène Ivan Drago dans l’arène. Un pari osé, plutôt casse-gueule, qui nous calme d’emblée. Avec son fils Viktor, ils habitent une banlieue décrépie en Ukraine. Ivan entraîne à la dure son fils, véritable arme de destruction massive sur un ring. Ses poings sont lourds, brisant les côtes en un rien de temps. Viktor est un tueur ayant grandi dans la douleur d’une mère absente et dans l’ombre d’un père revanchard de la honte de sa défaite en 1985 face à Rocky. Son fils sera sa rédemption.

Pendant ce temps-là, tout va bien pour Creed qui affronte Stuntman pour la ceinture de champion du monde poids lourd. Il prend enfin l’héritage de son père et de son oncle. Rocky se révèle être un entraîneur hors pair, véritable tacticien. Il est de bons conseils, un maître d’œuvre dans les victoires d’Adonis Creed. Mais au scénario, Stallone ressort ses vieilles ficelles. Il connaît trop bien ce sport pour savoir dans quelles facilités Creed va tomber. Le trop-plein de victoires et de confiance pour un orgueil qui commence à enfler. Quand Viktor Drago défie le jeune Creed, Rocky arrête l’apprentissage.

Creed II est une nouvelle leçon de remise en question. Stallone connaît parfaitement les codes de la saga. Il persiste et signe avec l’aide de Steven Caple.Jr à la mise en scène acérée pour permettre à Creed de faire ses choix et ses erreurs. Le talent de Stallone au scénario est surtout de savoir créer l’empathie auprès des personnages. On comprend amplement le choix de Rocky d’arrêter. On comprend aussi Creed qui fonce tête basse. Mais finalement ce que l’on connait d’avance et la structure même du film. Nous fans de la première heure qui revoyons chaque film de la saga tous les ans. Nous n’étions point convaincus d’avance, la méfiance étant prégnante avec la projection. Mais les premiers plans nous ont rassurés de suite, nous confinant dans l’assurance d’être face à un nouveau grand film de la saga.
Il est question d’héritage dans Creed II. Le thème principal depuis le premier film. Ce jeune Creed, «bâtard» n’ayant pas connu son père et ayant grandi dans la rue à la force de ses poings. Le poids de ce père trop lourd à porter pour lui qui doit se faire un nom. Trois ans sont passés après le combat face à Conlan, mais les questions sont toujours présentes. Elles seront le thème d’une première partie brillante. La suite découlera sur la filiation et la transmission. Comme une référence amusante, on suit la remise en question d’un Creed trop confiant à l’image de Rocky face à Clubber Lang. Creed s’apprête à affronter Viktor Drago, mais se pare à se mettre face à lui-même. Dans le miroir, il n’y a que lui et lui seul. Son orgueil, l’acceptation de ses origines alors qu’il devient père. Mais Rocky ne suit pas le jeune homme. Il pense avoir accompli sa tâche. Le vétéran souhaite que Creed prenne son destin en main et fasse ses choix. L’échec est inévitable.

Creed se trouve face à son plus grand défi. Le combat pour relancer sa vie, devenir adulte, briser cette armure d’amour-propre et ouvrir son cœur. Son cœur et ses tripes qui vont amener Creed à devenir un nouvel homme, à devenir père. Creed II, avant d’être la revanche d’un Creed face à un Drago, est surtout le nouveau cheminement d’un homme face à ses valeurs. Le poids de l’héritage et les valeurs familiales nécessaires à la réussite d’un homme face à l’adversité. Rocky aussi l’apprendra pour son bonheur propre, homme seul dans sa maison et son restaurant. Il peine à prendre le téléphone et renouer le contact avec Robert et connaître enfin son petit-fils. Là sera le combat d’un vieil homme qui ne souhaite pas mourir seul, mais entouré par ce qui a fait de lui un grand champion et un grand homme : sa famille.

Creed II est une nouvelle victoire aux poings. L’évidence d’avoir fait le tour d’un personnage et d’un mythe. Y rajouter une note serait d’un superflu agaçant, le mal d’un cinéma contemporain gourmand. Sylvester Stallone l’a d’ailleurs annoncé, pour lui ce sera le dernier. Il y a en effet comme un point d’arrivée pour tous les personnages. Adonis Creed et Rocky Balboa n’ont plus rien à nous apporter, n’y plus aucuns combattants à affronter. Ils ont brisé les chaînes de leurs maux respectifs pour avancer. L’un a pris la relève mythologique du brave tout en devenant père, l’autre renouera avec les siens profitant enfin d’une retraite bien méritée. Le gong a sonné pour eux, il est temps de savourer pour nous.

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  2. Rocky : American dream et déconstruction des êtres -
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