Edmond : à la fin de l’envoi, il touche !

Acteur, auteur et metteur en scène à succès, Alexis Michalik passe le cap de la réalisation en adaptant Edmond, sa troisième pièce de théâtre. Une envie qu’il nourrissait depuis un moment, Michalik ayant d’abord fantasmé Edmond comme un film avant d’en avoir fait une pièce, faute de moyens. Ironie du sort, son succès croissant au théâtre a fait de lui un artiste en vue et le voilà qui peut désormais réaliser Edmond en toute liberté.

Alexis Michalik garde donc la trame de la pièce, soit l’histoire d’Edmond Rostand, poète enchaînant les fours, contraint d’écrire très rapidement une pièce pour le grand acteur Coquelin. Pris dans un tourbillon d’événements qui le dépassent, Edmond s’inspire de ce qu’il croise pour broder un personnage et un début d’intrigue. Mais c’est quand Edmond écrit des lettres d’amour pour une jeune femme à la place d’un de ses amis qu’il trouve vraiment le cœur de sa pièce dont il ignore encore l’importance et le succès : Cyrano de Bergerac.

Avec son sens habile de la narration, mélangeant romanesque, humour et poésie, Michalik reste fidèle à la pièce mais se fait amplement plaisir en filmant avec délice le Paris de Belle Époque, joliment reconstitué. A l’instar de Dilili à Paris sorti il y a quelques mois, Edmond nous montre avec une véritable gourmandise l’effervescence artistique de cette époque, avec ses cafés bouillonnant de vie, ses théâtres plein à craquer, ses acteurs prêts à briller et ses auteurs suant sang et eau pour livrer leur pièce à temps. En cela, Edmond n’a rien perdu de la magie qu’il distillait au théâtre et reste un superbe hommage à tous ces artistes, connus, reconnus ou oubliés, qui travaillent pour livrer au public le meilleur d’eux-mêmes. Il est touchant de voir les deux acteurs principaux de Cyrano réaliser brusquement combien la pièce va marquer les esprits, contrairement à eux, quasiment condamnés à être oubliés par le public au profit de la pièce.

Restant fidèle à sa verve (plus subtile dans la tendresse et la poésie que dans l’humour, bien que celui-ci fonctionne très bien), Alexis Michalik livre ici un film au rythme effréné,  enchaînant parfaitement les péripéties, mélangeant réalité et fiction sur la création de Cyrano de Bergerac. On s’amuse ainsi des petites références glissées çà et là et on se délecte des personnages secondaires, à commencer par Coquelin, incarné par un Olivier Gourmet en grande forme à qui le rôle va à ravir. Notons tout de même la prestation de Thomas Solivérès dans le rôle principal. Abandonnant le  type de jeu habituel qu’il a pu avoir au début de sa carrière, il trouve enfin dans le rôle d’Edmond Rostand une prestation à même de mieux révéler son talent, pas vraiment éclatant jusque-là. Ici, Solivérès fait preuve d’un beau sens du rythme, capable d’insuffler de l’émotion à son personnage. Ainsi les doutes qui planaient durant les premières minutes du film s’évaporent rapidement.

Il est donc impossible de ne pas passer un bon moment devant Edmond, ravivant brillamment le panache d’une certaine époque et le goût des bons mots. En dépit de quelques facilités, le film se regarde avec un véritable délice et concilie goût du romanesque et du divertissement populaire non dénué d’ambition. Un petit régal en somme, que Michalik sait dynamiser grâce à un habile sens de la mise en scène, permettant de donner à Edmond tout le souffle qu’il contient.

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