
Au contraire d’un Marvel Cinematic Universe qui produit des films certes formatés mais tenant une vraie cohérence générale, l’univers cinématographique DC semble être depuis toujours un vrai bazar où personne ne s’entend sur la ligne de conduite à tenir. Après des œuvres imparfaites mais passionnantes comme Man of Steel ou Batman V Superman, des plantages en règle (coucou Justice League !) ou des films volontairement plus formatés comme Wonder Woman, DC Comics a bien besoin d’une ligne de conduite claire. Et si on ne sait pas si elle finira par être trouvée car seul l’avenir nous le dira, on peut d’ores et déjà se réjouir de constater qu’Aquaman est une réussite, venant faire oublier la douloureuse expérience de Justice League, de la moustache photoshopée d’Henry Cavill et de son foutoir scénaristique.

La force d’Aquaman, c’est de ne pas vraiment être attendu. La déception causée par Justice League a laissé de telles séquelles qu’on était au mieux curieux de voir Aquaman, au pire carrément pas intéressé. C’est sans compter sur le talent de James Wan qui avait déjà bien dynamité la franchise Fast and Furious avec un septième opus furieux et qui avait ici la lourde tâche de donner vie à tout un univers et à nous intéresser à un super-héros pas forcément excitant aux premiers abords. La surprise est donc très bonne quand James Wan transforme un film dont on n’attendait rien et craignait tout en une vraie réussite, une épopée spectaculaire à la générosité débordante.
Si le scénario ne contient aucun trait de génie, il articule son récit autour d’une trajectoire claire pour son héros. Né de père humain et de mère atlante, le chevelu Aquaman (incarné par la masse de charisme Jason Momoa) est contraint d’accepter le rôle de roi lui revenant de droit quand son demi-frère régnant sur Atlantis veut éradiquer tous les êtres humains de la surface afin de régner sur la Terre. Partagé entre ses deux origines, Arthur Curry devra donc réaliser que c’est justement ce tiraillement qui le rend le plus à même de régner sur l’océan et récupérer pour cela le Trident du premier roi de l’Atlantide, une arme si puissante qu’elle lui permettra de rallier les peuples marins à sa cause…

Un récit simple, une trajectoire balisée mais le tout au cœur d’un scénario suffisamment bien troussé pour que l’on s’y retrouve, le film prenant justement le temps de bien faire exister ses enjeux sans trop les précipiter. Avec une vraie gourmandise qui manque de parfois devenir bourrative, James Wan orchestre donc un périple fabuleux et semble prendre un malin plaisir à faire exister son univers. Plus à l’aise au fond de l’océan où tous les plans sont fabuleux que sur la terre ferme où certains fonds verts sont trop voyants, Wan nous régale avec des visuels incroyables, déployant un vrai sens de la mise en scène pour mieux sublimer une direction artistique à tomber par terre tant chaque univers sous-marin exploré par notre héros est fabuleux. On ne crachera pas non plus sur la générosité de Wan dès qu’il orchestre des scènes d’action, celles-ci s’avérant à la fois dantesques et parfaitement lisibles, s’inscrivant dans une mise en scène fluide privilégiant les longs plans au sur-découpage (la séquence en Sicile est à ce titre formidable). Le cinéaste confirme alors son sens narratif assez éblouissant, offrant à son récit un superbe écrin sur lequel reposer, le tout souligné par l’excellente partition musicale de Rupert Gregson-Williams.

Spectaculaire, Aquaman est jusqu’à présent le film le plus farouchement original de l’univers cinématographique DC de par son univers visuellement affriolant. S’il articule son film autour d’un scénario limpide aux enjeux simples, c’est justement pour mieux surprendre son spectateur dès qu’il s’agit de déployer ses atouts visuels, allant des décors aux costumes. La force du film est d’ailleurs de rendre tangible très rapidement cet univers, que l’on découvre avec régal au fur et à mesure que le récit avance. Cette gourmandise de la part de Wan n’est pas sans quelques scories narratives un peu superflues mais l’on apprécie l’effort et ce d’autant plus qu’Aquaman remplit parfaitement son cahier des charges sans avoir à rougir de la compétition. Le film peut d’ailleurs se targuer d’avoir un casting solide pour épauler Momoa (Amber Heard, Willem Dafoe, Patrick Wilson, Nicole Kidman ou encore Dolph Lundgren) et offre au DCEU une belle façon de sortir la tête hors de l’eau. En espérant que la Warner ne saborde pas le tout.
5 Rétroliens / Pings