Le Retour de Mary Poppins : Rencontre avec Emily Blunt et Rob Marshall.

À l’occasion de la promotion parisienne du film, Le Retour de Mary Poppins, nous avons rencontrés, lundi 10 décembre à l’Ambassade d’Angleterre, le réalisateur, Rob Marshall, et sa star, Emily Blunt. L’opportunité de discuter du challenge de mettre en scène ce retour attendu de l’une des grandes icônes de la jeunesse collective, Mary Poppins.

Rob, c’est un véritable challenge d’orchestrer la suite des aventures de Mary Poppins.

Rob Marshall : Certes, le premier film Mary Poppins est superbe. C’est pourquoi nous avons toujours voulu garder l’esprit du premier film en réalisant celui-ci. Nous avons fait ce film avec le cœur. La barre était haute, nous le savions et nous avions tous comme objectif d’atteindre cette barre pour que le film tienne une place spéciale dans nos cœurs et celui des spectateurs.

Emily, après le chant dans Into The Wood, Rob Marshall vous initie à la danse pour Mary Poppins. Quel a été votre sentiment pendant le tournage ?

Emily Blunt : C’était très excitant ! Je sais qu’il y a une aura autour du premier film, que même Rob Marshall protège mais c’était un vrai challenge de s’en inspirer. Surtout que dans Le Retour de Mary Poppins, l’époque a changé. La musique est donc un peu différente, il y a du jazz, des numéros entiers avec pas mal d’acteurs autour, c’était quelque chose de formidable à faire. Il y a eu beaucoup de morceaux qui ne sont pas allées dans le film, il y a eu 3 ou 4 versions différentes de la première chanson que je chante. À la fin, ça donnait vraiment l’impression que c’étaient des chansons taillées sur mesure pour nous !

Rob Marshall: Il faut dire que c’est une comédie musicale entièrement nouvelle. Tous les morceaux sont originaux, c’est assez rare pour être souligné. On a également pu avoir deux mois complets de répétition ce qui a permis à l’équipe de souder des liens très forts. Et je tiens à saluer le travail d’Emily et de Lin-Manuel Miranda qui ont quasiment fait toutes leurs cascades et toutes leurs chorégraphies.

Emily Blunt / Lin-Manuel Miranda

Emily, comment vous êtes-vous préparée au rôle de Mary Poppins ? Lui avez-vous  »volé » des choses ?

Emily Blunt : Je lui ai volé un parapluie ! (rire) Enfin volé ce n’est pas vraiment le bon mot, on me l’a donné et je l’ai gardé ce qui a peut-être valu quelques ennuis au chef accessoiriste ! (rires) Pour me préparer, je me suis d’abord fixé sur le scénario qui avait quelque chose de magique et qui rendait la chose parfaitement excitante à jouer. J’ai adoré l’interpréter, elle est si contradictoire, si riche, si fantastique. Elle a à la fois les pieds sur terre et en même temps la tête dans les nuages, c’est une personne d’une humanité très riche. Rob et moi-même avons travaillé à lui donner un peu plus d’excentricité que dans le roman. C’était vraiment une combinaison parfaite pour moi.

Rob, j’aimerais revenir sur le numéro des allumeurs de réverbères. Danseurs, gymnastes et même des cascadeurs en BMX. Il y a un côté anachronique, comme un vent de modernisme d’un coup. Expliquez-nous.

R.M : Toute cette séquence était un pur fantasme pour moi qui suis un ancien danseur. J’ai également été chorégraphe et j’ai toujours voulu faire une scène de cette ampleur avec des danseurs. Pour les choisir, je recherche toujours leur caractère. J’adore les bons danseurs mais si derrière, ils n’apportent pas leur personnalité, ça ne m’intéresse pas. Car pour moi, ce sont des personnages du film et ils doivent les incarner, il ne s’agit pas de prendre le meilleur danseur ou le même chanteur, il s’agit vraiment de les choisir avec soin. Certes, on recherchait des personnes qui savaient faire du vélo ou qui avait des capacités de gymnastes mais toujours avec cette approche et cette envie de trouver le personnage.

E.B : Certains n’avaient jamais fait de comédies musicales avant. Il y avait sur le plateau les meilleurs cyclistes du pays sur BMX, mais ils n’avaient jamais fait un truc pareil, c’était très amusant.

Comment pensez-vous avoir réussi à donner une nouvelle vie à un classique Disney pour le montrer aux nouvelles générations tout en donnant aux anciennes générations la nostalgie d’une certaine époque ?

R.M : C’était vraiment un travail d’équilibriste. D’un côté on veut rendre hommage au premier film qui est parfait mais de l’autre on veut raconter notre propre histoire. L’avantage des livres mettant en scène Mary Poppins, c’est qu’ils sont épisodiques, il n’y a pas forcément de grande ligne narrative directe. On a donc pu piocher çà et là pour créer nos numéros musicaux tout en brodant un récit personnel. Les livres ont été essentiels, ne serait-ce que pour saisir l’ambiance londonienne de l’époque. C’était une période plus sombre avec la guerre qui s’approchait. L’idée était de faire le film comme un antidote à la noirceur de cette période. Et on a eu une équipe formidable, qui d’autre qu’Emily Blunt aurait pu jouer le rôle franchement ? On a eu les étoiles qui se sont alignées pour faire le meilleur film possible.

Vous avez évoqué la dimension politique souterraine du film qui était déjà présente dans le premier et qui se retrouve ici avec les banques et la crise financière, c’était quelque chose vers lequel vous vouliez aller dès le début ?

R.M: Oui c’est inhérent à la période aussi, la Grande Dépression est là. Mais je voulais surtout parler du sentiment de perte. Car à force de lutter pour s’en sortir, pour faire le deuil d’un être cher, on perd notre regard sur les merveilles de ce monde. Comment trouver la lumière dans des moments si sombres ? Il s’agissait de montrer comment Mary Poppins allait les aider à trouver par eux-mêmes le chemin vers la lumière.

Emily, Rob disait qu’il ne voyait que vous dans le rôle mais qu’en avez-vous pensé quand on vous a fait la proposition ? Qu’est-ce que vous vous êtes dit ?

E.B : Je me suis senti immédiatement attirée par le rôle. Il y avait beau avoir le poids du rôle emblématique tel que Julie Andrews l’a joué à l’époque, je savais que j’allais accepter le film. C’était un oui immédiat. Pour avoir déjà travaillé avec Rob avant, je savais qu’il allait aborder le rôle avec élégance et générosité sans trop inscrire le film dans une certaine modernité. On pense tous à notre enfance quand on pense à Mary Poppins et il s’agissait d’honorer ça.

Il y a cinquante ans, Julie Andrews et Dick Van Dyke se sont inscrit dans les mémoires collectives avec Mary Poppins, pensez-vous que cela vous arrivera aussi ?

E.B : Je ne sais pas vraiment quoi dire. Il suffit de voir les réactions des enfants regardant le film pour se rendre compte que c’est un personnage capable de transporter les gens. C’est une sorte de super-héroïne donc au final moi aussi j’ai le droit à mon personnage Marvel ! Je vois bien dans les yeux de ma fille que c’est un personnage à part, elle m’a demandé d’imiter sa voix l’autre jour et je l’ai vu me regarder avec admiration. C’était très touchant et il faut que j’en profite avant qu’elle ne devienne ado et qu’elle ait honte de moi !

Dick Van Dyke

Que pouvez-vous nous dire sur la participation de Dick Van Dyke au film ?

R. M: C’est un rêve de gosse qui se réalise d’avoir Dick Van Dyke sur le plateau. À 90 ans, il a plus d’énergie que nous tous ! L’avoir sur le plateau avec nous était tellement surréaliste, à un moment il m’a pris la main et m’a dit qu’il ressentait le même esprit, la même inspiration sur ce tournage que sur celui du premier. Ça comptait tellement pour moi. Il symbolise tellement le message du film, il est est tellement formidable que j’avais du mal à dire coupez quand il jouait. Sa présence était vraiment magique.

Le premier film comportait des chansons vraiment iconiques, pourquoi ne pas les avoir réutilisées ?

R.M : Pour vraiment créer notre propre histoire. On aurait pu réutiliser toutes les chansons si on le voulait, on entend d’ailleurs quelques «easter eggs», notamment des notes de  »A spoon full of sugar » à un moment dans le film. On avait vraiment envie de faire quelque chose dans la continuité mais sans tomber dans la facilité. Et puis il y a eu le plaisir de créer des chansons totalement inédites.

Emily Blunt, Joel Dawson, Pixie Davies et Nathanael Saleh.

Dans ce paysage cinématographique hollywoodien envahi par les super-héros, Mary Poppins fait-elle office d’exception culturelle ou est-elle elle aussi une super-héroïne comme vous le laissiez entendre tout à l’heure ?

R.M: Ce que j’adore avec le personnage c’est justement tout ce mystère qui l’entoure. Est-elle une super-héroïne ? Est-elle réelle ? Ce qu’Emily a apporté au personnage, c’est vraiment toute une humanité, une profondeur, une accessibilité. Quoiqu’elle fasse, elle paraît très humaine.

E.B : Parce qu’elle est si mystérieuse, elle est si passionnante. La plupart du temps, on connaît tout sur les personnages des films, leur histoire, leurs blessures. Ici, elle ne laisse rien paraître et surtout elle ne se vante jamais d’aider d’autres personnes. Ce qu’elle fait n’est jamais à propos d’elle, c’est toujours à propos des autres, elle se contente de planter les graines pour qu’ils évoluent mais c’est tout.

R.M : C’est ce que j’aime beaucoup dans l’approche de travail d’Emily et de Lin-Manuel. Souvent dans les comédies musicales, les acteurs font tout pour qu’on remarque tout ce qu’ils font. Ici, c’est beaucoup plus subtil. Si vous voyez ce qu’ils veulent faire passer, vous le voyez. Si non, ce n’est pas grave.

Le personnage d’Angela Lansbury aurait pu être joué par Julie Andrews, avez-vous pensé à elle au moment de faire le film, lui avez-vous proposé un rôle ?

R.M : On lui a parlé, elle était d’ailleurs ravie d’apprendre qu’Emily reprenait le rôle. Mais elle n’a pas voulu participer au film, pour elle c’était à Emily de reprendre le flambeau, elle ne voulait pas s’interposer. On l’a su dès l’écriture donc le personnage d’Angela Lansbury n’a pas été écrit pour elle. On a pris Angela parce qu’il nous fallait une actrice suffisamment iconique pour interpréter ce rôle en aussi peu de temps à l’écran. 

Propos recueillis par Mathieu Le berre.
Traduction: Alexandre Coudray

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