La fille sur la balançoire : Swinging in New York

Jamais avare en petites pépites dégotées régulièrement, Rimini Editions a sorti le 2 octobre dernier en toute discrétion un très beau drame en Technicolor réalisé par Richard Fleischer en 1955 : La fille sur la balançoire. Le film disponible en Blu-ray et DVD resplendit particulièrement sur le Blu-ray qui fait ressortir toutes les couleurs et toute l’émotion de cette histoire tragique.

Amoureux des faits divers comme il le montrera régulièrement tout au long de sa carrière (Le Génie du mal, L’étrangleur de Boston, L’étrangleur de la place Rillington), Richard Fleischer s’empare d’un scandale notoire ayant éclaté à New York au début du XXème siècle. En effet, l’architecte Stanford White, ancien amant de l’actrice Evelyn Nesbit, fut assassiné devant plusieurs témoins par Harry K. Thaw, millionnaire dévoré par la jalousie ayant épousé Evelyn. Dans les faits, Stanford White, âgé de 47 ans à l’époque, a effectivement abusé d’Evelyn Nesbit alors qu’elle n’avait que 14 ans. En 1955, impossible de montrer ça à l’écran. Le scénario fait donc d’Evelyn une jeune femme qui se laisse séduire par un Stanford White rendu plus sympathique.

La relation unissant White et Evelyn n’en reste cependant pas moins trouble. À plusieurs reprises, Stanford White (interprété par Ray Milland) se montre assez ambigu et affiche un net désir de possession envers Evelyn, tâchant d’en faire sa fille quand il réalise qu’il ne peut en faire sa femme. Même chose du côté d’Evelyn, présentée comme une jeune femme innocente un peu naïve dont on devine cependant des désirs et des actes beaucoup plus passionnels qu’elle veut bien le laisser croire. À ce titre, on comprend parfaitement pourquoi la Fox voulait Marilyn Monroe pour le rôle tant l’actrice combinait à merveille innocence et sexualité. Joan Collins s’en sort cependant très bien dans le rôle, en dépit d’une interprétation un peu plus fade dans la deuxième partie du récit.

Une deuxième partie globalement un poil moins réussie tant elle peine à faire du couple formé par Thaw et Evelyn un duo aussi fort que celui qu’Evelyn formait avec White. Toutes les scènes entre White et Evelyn sont savoureuses, pleines de sous-entendus (que l’on doit sans nul doute au co-scénariste Charles Brackett, ancien complice de Billy Wilder) et marquées par deux grandes scènes en disant long sur le désir et la sexualité unissant les deux amants (dont celle, célèbre, avec la fameuse balançoire du titre). Dans la deuxième moitié du récit, Evelyn apparaît beaucoup moins trouble avec Thaw et Farley Granger peine d’ailleurs à être totalement crédible dans son rôle de millionnaire paranoïaque et psychotique.

Cela n’entache cependant en rien les indéniables qualités du film et notamment le sens de la mise en scène de Richard Flesicher, à l’aise sur n’importe quel sujet, capable de suggérer l’émotion et le désir grâce à de savantes idées de mise en scène. Drame passionnel, tragique histoire d’une femme tiraillée (et malmenée) par deux hommes, La fille sur la balançoire mérite amplement qu’on s’y attarde, se montrant aussi bien réussi sur le plan formel qu’audacieux dans les thématiques qu’il aborde.

Pour compléter l’édition, Rimini nous offre un module de vingt minutes où la critique Ophélie Wiel revient sur le fait divers de l’époque et sur le cinéma de Richard Fleischer, apportant quelques lumières sur le film.

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