Flavors of Youth: les ramens de Proust et autres contes

Né d’une association sino-japonaise entre les studios CoMix Wave Films (Your Name et d’autres œuvres de Makoto Shinkai) et Haoliners Animation League, Flavors of Youth reprend cette patte graphique familière du dernier succès de Shinkai. On y retrouve aussi une certaine douceur, que ces tranches de vie essaient de nous transmettre. Car oui, ce n’est pas un film que nous avons là, mais plusieurs. Trois pour être précis, réalisés par trois réalisateur différents (Jiaoshou, Haoling Li, Yoshitaka Takeuchi), chacun durant une vingtaine de minutes. Nous suivons trois protagonistes, qui vivent dans la Chine des grandes métropoles, qui feront le point sur leur vie, sur leur entrée dans le monde adulte et tenteront de revenir au contact de l’essentiel, chacun à leur manière.

Ainsi Xiao Ming se raccroche à sa tendre enfance, dans son quartier de campagne et tente d’en retrouver les fragments éparses, en recherchant le goût des nouilles, qui lui évoque tant de souvenirs. Yi Lin quant à elle, a pris en charge sa petite sœur Lulu, à la mort de leurs parents en travaillant comme top model, pour que sa cadette puisse continuer ses études. Enfin, Li Mo qui en retrouvant une vieille cassette audio, laissé par son premier amour, cherche à la retrouver en fouillant dans ses souvenirs. Ces personnages, s’ils ont des quêtes bien distinctes, se rejoignent sur bien des points.
La ville occupe une place prépondérante dans Flavors of Youth. Point d’ancrage d’une réalité morne, sur laquelle plane le spectre de la résignation, elle sert aussi à contraster avec tous ces moments de joie (généralement des flashbacks), plus dépouillés et paisibles, dans de chaleureux tons ocres. Le tout accompagné par le savoir-faire des studios responsables du film, où l’animation ne fait jamais de faux pas et les éléments 3D, s’ils sont toujours détectables, réussissent à s’intégrer au tout sans faire tache. Aussi belle soit-elle, la jungle grisâtre est sur le point d’absorber nos héros, avant que ceux-ci n’aient cette prise de conscience, qui les libère de leurs chaînes.

Malgré tout, défaut quasi-inhérent à une anthologie de ce type, les films restent relativement inégaux. Les efforts sont présents, côté technique, mais difficile de ne pas trouver les tribulations de Yi Lin en deçà du reste, par son aspect facile, plus classique et moins mélancolique. L’ensemble pêche aussi, en se laissant vivre, se reposant majoritairement sur la beauté de la production. Si le manque d’ambitions n’est pas dérangeant outre mesure pour une œuvre de cet acabit, il reste notable. Reste tout de même des thèmes universels, qui ne manqueront pas d’interpeler un public mature accompagnés par une poésie simple.

Les personnages courent après une autre époque, une autre version de la réalité qui est aussi une partie d’eux-mêmes, ils tentent de corriger des erreurs de navigation avant qu’il ne soit trop tard. Ils cherchent dans la simplicité de leur passé, la force pour aller de l’avant. Les aspirations se confrontent à la réalité, les décisions prennent en densité, avec le poids du temps, la recherche se fait de plus en plus difficile, à mesure que l’on s’enferme dans des choix déraisonnés.

Flavors of Youth est un petit bonbon doux amer, avec un bel emballage, appétissant, mais qui ne reste pas en bouche bien longtemps. Aussi inoffensif que dispensable, c’est paradoxalement ce caractère fugace, qui fait son plus grand charme.

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