Tomb Raider : L’aventure d’une héroïne perdue.

Les univers du jeu vidéo et du cinéma se cannibalisent depuis maintenant 20 ans. Le cinéma a rapidement grappillé les succès vidéoludiques pour produire de gros blockbusters souvent indigestes. On garde encore et toujours en mémoire Super Mario Bros, Double Dragon, Street Fighter ou Mortal Kombat avec notre cricri national.

Longtemps les productions dérivées de jeux vidéos ont été l’apanage de séries B mal fagotées à cause de SFX douteux. Il faudra attendre l’orée des années 2000 pour que tout cela change. Au moins légèrement, car le souvenir qu’il en reste est de la fumeuse nostalgie. Revoir Lara Croft – Tomb Raider réalisé par Simon West aujourd’hui laisse dubitatif sur notre enthousiasme d’antan. Il faut avouer premièrement que le long-métrage, malgré son succès (274 703 340 $ pour un budget de 116 millions de dollars), aura la peau de son réalisateur. Après deux belles réussites qu’étaient Les Ailes de l’Enfer (produit par Jerry Bruckheimer avec Nic Cage) et Le Déshonneur d’Elizabeth Campbell (avec John Travolta), Simon West verra sa carrière stoppée net pendant 6 ans avant le nullissime Terreur sur la Ligne, Le Flingueur avec Jason Statham ou encore Expendables 2. Mais à contrario, l’adaptation cinéma de Tomb Raider fera d’Angelina Jolie une méga-star. Nous passerons rapidement sur la suite, Le Berceau de la Vie, toujours avec l’actrice et mis en scène par l’oublié Jan de Bont (Speed) en 2003.

Il faudra attendre 15 ans pour revoir cette chère Lara Croft au cinéma. Tous les cinéphiles espéraient le retour d’Angelina Jolie, mais la belle préfère aujourd’hui la mise en scène (Invincible ; Vue sur Mer ; D’abord ils ont tué mon père). Au tour d’une petite nouvelle de reprendre le flambeau d’un reboot annoncé. Ce nouveau film repose essentiellement sur le reboot des aventures de l’héroïne en 2013 en jeu-vidéo. Devant l’avènement de jeux d’aventure tels qu’Uncharted avec l’intrépide Nathan Drake, Lara Croft avait bien besoin de faire peau neuve. L’aventurière devient alors une jeune fille de 21 ans qui part en expédition avec un groupe d’amis à la recherche du Royaume de Yamataï gouverné autrefois par la Reine Himiko. Ce qui est repris en somme dans ce reboot cinématographique dirigé par le doué Roar Uthaug.

Roar Uthaug est un metteur en scène norvégien à qui l’on doit la série horrifique Cold Prey, le film d’aventure Dagmar ou encore le film-catastrophe The Wave. Un bon point pour Tomb Raider qui a bien besoin des talents du bonhomme pour rendre efficace cette volonté de faire du film un survival/aventure. Ce nouveau Tomb Raider se rapproche énormément du renouveau vidéoludique sortie en 2013. Lara est une jeune fille paumée à Londres livrant des plats à vélo. Elle a coupé les liens avec son héritage suite à la disparition de son père. Mais un jour, Lara hérite d’un artefact et y trouve la clé pour accéder à une pièce secrète conservant les secrets de ce dernier. Elle découvre une vidéo dans laquelle son père avoue avoir découvert un tombeau, la Mère de la Mort, où est enterrée la reine Himiko sur l’île du Yamatai au sud du Japon et en plein cœur de la mer du Diable. Sur cette île, une organisation qui se fait appeler la Trinité cherche le tombeau et pourrait donc mettre le monde en danger.

Accompagnée du capitaine Lu Ren, Lara décide de partir enquêter pour empêcher que le tombeau se retrouve dans les mains de la Trinité. Mais l’expédition va vite basculer en tragédie et se transformer en lutte pour survivre.

Beaucoup d’éléments reviennent à la surface pour cette nouvelle adaptation. Un copié-collé presque que l’on retrouvera dans l’imagerie du film. Une île déserte, la survie prédominante de l’aventure et un scénario somme tout identique emmenant cette jeune Lara au cœur de ses premières aventures extraordinaires.

Ces éléments procurent une certaine assurance au film, notamment dans une première partie intrigante, voire palpitante. Nous faisons connaissance avec une nouvelle Lara Croft interprétée par Alicia Vikander, beaucoup plus habituée aux films de costumes et aux drames (Royal Affair ; Mémoire de Jeunesse ; Ex-Machina ; Une Vie entre deux Océans). Mais la jeune actrice suédoise devient instantanément Lara Croft. Une incarnation plus moderne, plus humaine, soit un brin plus empathique que la super héroïne qu’était Angelina Jolie. Le film a surtout la bonne idée de nous présenter le personnage comme une jeune fille faible se ramassant une dérouillée lors d’un entraînement de boxe puis finissant au poste de police après une course illégale à vélo.

Durant toute la moitié du long-métrage, Lara subit les événements. En dépit de toute sa bonne volonté, elle ne réussira à s’imposer qu’après avoir douloureusement souffert. Un tic moderne reprit notamment du personnage d’Ethan Hunt dans le Mission : Impossible façon Tom Cruise ou James Bond période Daniel Craig. Lara Croft devra porter sa croix pour devenir l’héroïne et l’aventurière adulte attendue.

Mais à force de souffrir et lui imposer des péripéties toujours plus « bigger than life », le film de Roar Uthaug perd en crédibilité. Tomb Raider tombe rapidement dans les travers d’un genre dépourvu de personnalité. Dans sa dernière partie, certes accrocheuse, Lara Croft ne fait que vivre les ersatz des aventures d’Indiana Jones ou Allan Quatermain (période Richard Chamberlain). Tomb Raider prouve alors qu’en 30 ans de cinéma, Hollywood et ses scénaristes n’arrivent pas encore à passer un cap. La ré-exploitation des codes et des tics est de prime. Pire, le Tomb Raider de Roar Uthaug se permet la désinvolture de se conclure à l’identique manière que l’ouverture des Aventuriers de l’Arche Perdue signée Steven Spielberg, à savoir dans une grotte avec un artefact et une course poursuite face à l’éboulement du lieu.

En un seul opus, Tomb Raider prouve d’emblée son essoufflement. N’arrivant jamais à se remettre en question, pire ne faisant que plagier ce qui s’est fait dans sa propre mythologie vidéoludique, mais aussi dans son propre genre lequel le film renvoie, Tomb Raider ne fait qu’exploiter les grosses ficelles pour arriver à ses fins. Si Alicia Vikander est une parfaite incarnation moderne de l’aventurière chère à de nombreux gamers, on s’interroge sur la suite à donner aux idées. Le film assume sa volonté d’ouvrir grandes les portes à une énième franchise qui abat les cartes du complot sectaire/terroriste internationale avec la Trinité dont le nom Croft est son épicentre. Lara s’embarque alors pour de multiples aventures périlleuses dont on n’aura jamais vraiment de réponses.

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