Johnny Hallyday a, au fil de sa carrière, peiné en tant qu’acteur. Le chanteur ne s’est jamais imposé au cinéma, ni même à la télévision. Pourtant des essais ont été effectués, parfois audacieux. Si au tout début, il est Johnny Hallyday dans des programmes tels que « D’Où Viens-Tu Johnny » ou « Cherchez l’Idole », son premier véritable rôle sera Le Spécialiste en 1968 sous la houlette de Sergio Corbucci. Dans ce film, il est un cowboy mutique prenant la relève de Jean-Louis Trintignant en personnage taiseux et solitaire en quête de revanche renvoyant à L’Homme sans Nom de Sergio Leone. Mutique, il le sera tout autant l’année suivante chez Robert Hossein.
Point de Chute date de 1970, mis en scène par Robert Hossein, l’une des grandes figures du théâtre et du cinéma français. Robert Hossein choisit le chanteur pour incarner un kidnappeur candide qui va s’amouracher de sa victime au gré de ses complices.
Point de Chute sort de nouveau en salles à partir du 13 juin 2018 et est disponible en combo DVD/Blu-ray depuis le 5 juin 2018 dans une copie neuve restaurée en 4K. La copie est resplendissante, le grain est toujours imprimé sur une pellicule ne manquant point de détails. Si le film ne s’y prête pas forcément, on peut dire que la copie HD fournie par TF1 Vidéo est sublime !
Point de Chute ne se prête pas forcément à un traitement de faveur, car commercialement parlant, il a peu de chances d’être un hit en termes de vente. Film à la limite expérimental de la part de Robert Hossein qui utilise les codes du polar pour mettre en scène le rapprochement entre un jeune malfrat et sa victime. Hossein est bien conscient du jeu minimaliste de Johnny Hallyday. À l’image de Corbucci, il en fait un homme taiseux laissant tout transparaître par son regard bleuté. Tout d’abord déconcerté devant l’exercice projeté, Point de Chute subjugue puis ennuie. Pris dans les tournures d’une unité de lieu sur une plage de Royan au cœur des dunes, décor désert, presque apocalyptique, nous observons les déboires de ce couple bien malgré lui subissant les affres d’une bande de malfrats organisés et déterminés. Robert Hossein incarne l’un d’eux avec son charisme habituel, cette force de capter l’attention par la simple intonation de sa voix. L’acteur est immense renvoyant dans les cordes un Johnny Hallyday un brin gentillet, sans coffre. Johnny Hallyday n’incarne pas, il est, donc déçoit par un manque cruel de personnalité. À se taire, il ne s’impose jamais à l’écran. La fin tragique n’émeut peu en conséquence.
Point de Chute est une permanente prise de risque de la part de Robert Hossein. Un long Flashback revenant sur un fait divers via la reconstitution qu’en tire le commissaire incarné par Robert Dalban, véritable gueule du cinéma de l’époque. Au milieu de ce noir & blanc incroyable, il fouine, pense et reflète les événements dans cette cabane au milieu de la plage. Puis Hossein passe à la couleur pour tout mettre en image.
Le Blu-ray rend justice à un film oublié. Un polar dont s’amuse Robert Hossein qui teste et s’amuse au fil d’un scénario basique d’amour entre kidnappeur et kidnappée. En bonus du film, le Blu-ray propose le commentaire de Jean-François Rauger, directeur de la programmation de Cinémathèque Française, qui revient pendant 6 minutes autour du film, sa genèse et le rôle de Johnny Hallyday. Puis le disque propose l’intégralité d’un programme, Johnny à Bochuz, un concert datant de 1974, filmé par la Radio Télévision Suisse, en version restaurée où Johnny interprète 11 titres live rares au cœur de la prison de Bochuz en Suisse.
Six mois après le décès de Johnny Hallyday, les ressorties en salles et en vidéos de films comme Le Spécialiste ou Point de Chute grâce à Carlotta Films et TF1 Vidéos permettent de redécouvrir une autre facette de l’icône du rock. Point de Chute en est un bel exemple. Johnny Hallyday s’y met au service d’un grand metteur en scène qui expérimente, tente et casse les codes de l’époque via des flashbacks, reconstitutions, ralentis et changements de cadre pour conter un fait divers romantique et dramatique. Si la proposition trouve rapidement ses limites, la découverte n’en est pas moins intéressante.
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