Le Spécialiste : The Poor Lonesome Cowboy

Disponible en combo DVD/Blu-ray et Blu-ray 4K UHD depuis le 5 juin 2018, Le Spécialiste réalisé par Sergio Corbucci en 1969 bénéficie d’une ressortie en salles le 13 juin 2018. Quelques mois après son décès, Johnny Hallyday revient sur le devant de la scène grâce à TF1 Vidéo et Carlotta Films qui s’occupent respectivement de la sortie en vidéo et ressortie en salles du film. 

Johnny Hallyday ne fut loin de là un grand acteur. Icône de toute une génération de français, il a prêté son image au cinéma, l’homme ayant un attrait à faire le comédien. Mais ce n’était guère sa première vocation, plutôt un plaisir sans le talent malheureusement. Le Spécialiste en est une preuve évidente. Johnny Hallyday interprète un cowboy mutique traversant le Nevada à la recherche de son frère impliqué dans un hold-up ayant mal tourné. Il arrive rapidement dans une ville en désordre régie par un Shérif taxant toutes les armes. Une histoire forte classique qui faisant office de trame pour un western manquant cruellement de souffle. 

Le Spécialiste est dû à Sergio Corbucci qui signe le scénario et la mise en scène. L’homme ne s’est jamais distingué pour sa finesse et il en fait une nouvelle fois étalage. Mais il sait assurément orchestrer de savantes séquences d’action qui par deux fois font mouche au cœur du Spécialiste, film creux et un brin poussif. Mais lors de l’arrivée de Hudge (Hallyday) et du Shérif, la fusillade avec l’homme perché sur le clocher laisse pantois, à l’image du gunfight final après le viol de Françoise Fabian dans l’étable.

Réalisateur italien renommé pour un casting en partie français, Le Spécialiste est une commande d’un producteur français qui sentit opportunément l’affaire de produire un western-spaghetti. En 1968, le cinéma européen est en plein boum dans le genre western. L’Italie produit en masse avec environ 60 à 70 productions par an pendant 2-3 années. Sergio Corbucci sort justement de la production du film, Le Grand Silence, immense western porté par un autre acteur français, Jean-Louis Trintignant, et la musique entêtante d’Ennio Morricone. Cependant, Le Spécialiste n’arrive jamais à la hauteur du Grand Silence. Corbucci réemploie tout de même cette figure du cowboy mutique voyageant seul avec son cheval en quête de réponses. Mais Johnny Hallyday n’a ni le charisme ni le talent de Jean-Louis Trintignant. Pour le rôle de Hudge, si Hallyday a la gueule pour le rôle, il n’en a jamais l’assurance ni le coffre. D’une allure fluette et le regard vide, il ne passe aucune émotion. Il est certain que l’approche mutique du personnage par Corbucci jouant sur le regard bleuté et acéré du chanteur sauve en partie la composition. Johnny Hallyday joue le cowboy tel un enfant ayant enfilé un déguisement. L’homme ne persévéra pas à enchainer les rôles pour finalement atteindre une certaine crédibilité. L’échec du film en Italie ne permettra pas une carrière parallèle à l’époque pour Hallyday, et le cinéma français le dédaignera alors en pleine Nouvelle Vague. Pourtant les prémices d’une gueule et d’un physique se laissent entrevoir sur quelques séquences. L’acteur est solide sur les séquences d’action réussissant parfois à capter la caméra et l’attention du spectateur.

Ce que le film perd en son creux. Le Spécialiste pâtit d’un récit paresseux manquant d’un certain souffle. Après une introduction anarchique et l’arrivée tonitruante de Hudge dans la ville, le film s’enfonce dans de lancinantes manigances sur fond de recherche d’un trésor suite au hold-up de la banque. Sergio Corbucci récite ses gammes, ou plutôt piétine par fainéantise à relever la dynamique d’une commande simplement assurée. Alors on se détache avant un final assez grandiose en termes d’orchestration et d’imagerie, notamment cette peinture des villageois nus en pleine rue, telles des limaces consuméristes rampantes pas encore prêtes à assister au feu de joie. 

Si Le Spécialiste laisse quelque peu dubitatif par son classicisme lancinant, il faut bien avouer que TF1 Vidéo rend hommage au film grâce à une copie presque parfaite. La restauration 4K est sublime permettant la (re)découverte d’un film dans les meilleures dispositions possible. Le disque se voit accompagné d’une présentation du film par Jean-François Rauger, directeur de la programmation à la Cinémathèque Française qui sur 25 min, revient sur la composition iconique de Johnny Hallyday, la production du film et le recontextualise dans son époque. Un puit d’informations à découvrir après le film pour être totalement complet. 

Quelques mois après le décès de Johnny Hallyday, il est agréable de sortir de l’oubli cette pépite produite en plein boum du western-spaghetti en 1969. Si Le Spécialiste ne laisse pas un souvenir impérissable, il peut tout de même se targuer d’une superbe copie restaurée 4K pour une ressortie pertinente en salles et une édition vidéo du plus bel effet qui ravira les puristes du genre, du réalisateur et/ou du chanteur/acteur.

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