Chasseuse de géants : Sans cœur et sans reproches ?

Premier long métrage d’Anders Walter, Chasseuse de géants, adapté du comics du même nom, débarque directement en DVD et Blu-ray, après être passé par la case festival (Gérardmer). On suit Barbara, jeune adolescente et chasseuse de géants autoproclamée, qui se lance dans une croisade contre ces derniers, nuisibles à l’humanité toute entière.

Tout de suite, la jeune fille nous est présentée de façon à questionner l’existence de ces géants. Véritable paria à son école, avec son style vestimentaire fantasque, ses étranges manies et ses rendez-vous chez la psychologue, le doute s’installe. D’autant que ces derniers n’apparaissent que lorsqu’elle est seule. La mise en scène s’amuse de cette ambiguïté, pour mieux la cultiver durant la première partie du film. Fruits d’un imaginaire débordant ou véritable menace, ces géants ont plus à nous révéler que cela, et heureusement pour le rythme du film. Une fois la mèche vendue (même si l’autre pendant de la question n’est jamais complètement chassé), on nous relance avec un autre mystère, celui-ci plus terre-à-terre et prévisible. En résulte un rythme quelque peu bâtard et des effets gâchés par l’évidence qu’ils essaient de masquer. Si dissimuler les enjeux un temps permet d’accrocher le spectateur, le procédé se retourne contre le film, lorsque ceux-ci ne sont pas à la hauteur de l’attente.

Difficile qui plus est, de passer après le Quelques Minutes après Minuit de Bayona, qui soulève sensiblement les mêmes thèmes. Avec, là-aussi, une créature surnaturelle colossale, mais surtout une approche d’emblée plus frontale, ce qui permettait de se concentrer sur l’essentiel. En s’épanchant plus sur la construction sommaire du récit, Anders Walter manque d’approfondir des thématiques qu’il a pourtant déjà su traiter avec plus de talent (notamment son court métrage oscarisé : Hélium, présent sur le DVD/Blu-ray ou dans une moindre mesure, 9 Meters, lui aussi sur le support). Une perte dommageable d’autant que l’aspect visuel du film a ce petit charme désuet, qui contribue parfois à créer des pépites. Barbara investit les décors, guidée dans sa quête, tout est là : cachette secrète, potions à base d’ours en gélatine, runes gravées sur différents murs avec supplément de paillettes, tout y passe pour nous inviter dans ce monde et nous rappeler l’enfance. Sa place centrale dans le récit n’est jamais mise en cause et les quelques personnages secondaires font plus souvent office de fonctions, davantage pour l’aider à évoluer que pour réellement exister à l’écran. À la différence des créatures rencontrées, qui quant à elles sont de bonne facture. Les géants, sans être exceptionnels restent imposants et rugueux comme il se doit, mais ce sont les Harbingers, sorte d’ombres difformes qui témoignent du soin apporté à la technique du film (un petit bonus traite rapidement du processus de création de ces entités noirâtres et volatiles).

Maladroit à bien des endroits, le problème principal de Chasseuse de géants est qu’il peine à nous toucher. Si l’interprète de Barbara (Madison Wolfe) n’est pas à remettre en cause, quelque chose nous retient d’y croire. Charmant par instant, le film d’Anders Walter réussit tout de même à nous promettre de belles choses pour le futur de sa carrière. Mais pour le moment, alors que l’on gravit un à un les échelons que l’on ne connaît que trop, le sommet, une fois atteint, peine à nous impressionner et pour cause. Si tous les ingrédients semblent réunis avec une bienveillance qui excuse ses maladresses, il lui manque l’essentiel : le cœur.

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