Cargo : la valeur des petites choses

Primé lors du Tropfest en 2013 comme « meilleur court métrage », Cargo reste entre les mains de ses réalisateurs d’origine (Ben Howling et Yolanda Ramke), mais fait peau neuve en ce mois de mai sur Netflix. Faisant déjà montre de quelques bonnes idées à l’époque de ses 7 minutes, le court métrage gagne en relief et en matière thématique en passant au format long. Sans avoir la prétention de redéfinir ou de renouveler le sous-genre horrifique du zombie, le film réussit à lui insuffler une fraîcheur de plus en plus rare, pour un domaine arrivé à saturation.

D’entrée de jeu, le ton se veut calme, la tension apparait en pointes, alors que l’on suit la famille d’Andy (Martin Freeman) voguant sur son bateau le long d’une rivière australienne. Bien vite, on nous fait comprendre discrètement que quelque chose cloche, des disputes sur le manque de denrées, des rencontres tendues : l’ambiance légère se craquelle bien vite. C’est avec une économie de moyens que l’on va réaliser que l’on est au cœur d’une invasion de zombies et que celle-ci va avoir un impact sur la cellule familiale d’Andy. Sa femme, un fois mordue, ne dispose que de 48h à vivre. Ils décident de rejoindre la terre ferme, avec leur bébé Rosie, pour trouver de l’aide avant qu’elle ne se transforme. Ce point de départ classique n’est que l’entrée en matière d’un périple à la qualité changeante, mais toujours intéressant.

Nous sommes en présence de thématiques connues, on verra par exemple le classique « le vrai monstre c’est l’être humain » quasi-inhérent au genre. Sur ces bases incontournables mais solides, viendront se juxtaposer des idées de mise en scène opportunes. Parfois fugaces (les zombies avec la tête enterrée dans le sol pour ne pas faire de mal), elles vont, le temps de quelques plans, nous faire découvrir les règles de cette Australie en décrépitude. On s’attarde avant tout sur la valeur des petites choses ici, un détail fait un monde tandis qu’Andy doit composer avec l’urgence de sa situation. Au cours de son voyage, il fera bien entendu des rencontres, parfois inattendues mais toujours lourdes de sens. Si certaines de ces scènes sont maladroites (le final trop larmoyant), le tout est sauvé par l’attachant tandem Rosie/Andy. Au commencement, on serait tenté d’accuser (à juste titre) Martin Freeman de nous rejouer son rôle type de petit bonhomme qui subit plus qu’il n’agit (Watson dans Sherlock, Lester dans Fargo). Mais sa fibre paternelle ressort, alors qu’il fait tout pour sauver sa famille. Les petits instants, les petites mimiques, les échanges avec le poupon (dont l’attitude sonne toujours étonnamment juste) sont autant d’éléments qui agissent comme une force motrice pour le personnage et le spectateur, qui ont envie d’évoluer plus en profondeur dans ce milieu aride.

Ce duo sera notre point d’ancrage, dans ce monde au cœur duquel on est catapultés. Cargo a la politesse de ne pas s’attarder sur son introduction. Une simple histoire de gaz toxique, vite expédiée au détour d’un dialogue suffira, pas besoin de s’épancher plus sur la question. Les zombies, on connait la chanson, le refrain est le même, mais les couplets sont plus travaillés ici qu’à l’accoutumée. La représentation de ces créatures est plus réfléchie : d’abord cachées, puis partiellement montrées, afin de donner plus d’impact à ce mal, lorsqu’il est montré pour la première fois dans son entièreté  C’est ainsi que le film fonctionne, en prenant le temps d’installer sa tension dramatique, qui le démarque de ses petits camarades avec en sus un arrière-goût post-apo lié à l’errance des personnages dans ce milieu désertique et hostile. Sans être chamboulées, nos attentes sont suffisamment perturbées pour faire de Cargo un film qui vaut le coup d’œil.

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