Jumanji: Welcome to the Jungle : La recette habituelle

À l’occasion de la sortie DVD et Blu-ray de Jumanji: Welcome to the Jungle le 25 Avril, revenons sur ce film qui a tant fait parler de lui à sa sortie en salles. Nous n’aborderons pas les bonus de cette édition, la plupart d’entre eux étant des prétextes à une promotion agressive (making-of tout sourire, bande annonce ou encore préparation des effets spéciaux de la « scène préférée » de tout le monde), à l’exception d’un clip foutraque : « Jumanji Jumanji » plus amusant que le film lui-même.

The Rock, Jack Black, Kevin Hart et Karen Gillan : une belle brochette d’acteurs qui attire immédiatement avec son capital sympathie débordant. Inscrire ces noms-là à l’affiche, c’est déjà la caution d’un minima d’entrées assuré. Ajouter le nom Jumanji à ladite affiche, c’est en rajouter une couche, en adaptant au sacro-saint « goût du jour » une vieille licence des années 90 qui avait progressivement gagné ses galons dans le domaine de l’affect. Quelques effets spéciaux par-ci, des cascades par-là. On enrobe le tout en remplaçant le jeu de plateau par du jeu vidéo — les jeunes adorent ça, les jeux vidéo — et on obtient en tout et pour tout la quintessence du produit consensuel au marketing facile qui n’a même pas la politesse de s’en cacher. Le pire dans tout ça, c’est que cette recette fonctionne (il suffit de jeter un œil au box-office) même quand elle est appliquée avec paresse.

Car, sans être consternant Jumanji: Welcome to the Jungle, se contente de bien peu en se reposant oisivement sur ses lauriers. Le pitch de départ promettait au moins des performances d’acteurs sympathiques : le jeu Jumanji étant cette fois-ci virtuel, il emprisonne dans son univers une petite équipe de clichés hétéroclites de lycéens (la bimbo, le joueur de foot, le nerd et la misfit), chacun bénéficiant d’un avatar bien différent de ce qu’il était dans le réel. Mais voilà, ce Breakfast Club du pauvre qui opère déjà un forcing monstre pour caractériser ses personnages, peine à s’incarner dans la jungle numérique. Les trajectoires évidentes (l’affirmation de soi pour les plus timides, l’humilité pour les plus arrogants et le travail de groupe pour tous) laissaient le champ libre à un cabotinage facile, qui ne se retrouve que basiquement exploité. Chacun reste dans sa zone de confort, égal à lui-même, malgré un Jack Black qui semble à l’aise pour jouer les m’as-tu-vu d’Instagram, la facilité côtoie la lourdeur et cette dichotomie joueur/avatar devient vite accessoire.

Et il en va de même pour la quasi-intégralité du monde vidéoludique et de ses normes. Quelques codes sont placés çà et là (les NPCs qui répètent sans cesse la même phrase, l’inventaire à rallonge, les forces et les faiblesses innées), à la manière de post-its collés par-dessus le récit, pour convaincre le gamer qu’il n’a pas payé sa place pour rien, mais ne donnent au mieux qu’un ou deux gags fugaces. Reste cette utilisation de la mécanique de respawn, recours scénaristique intéressant et malin puisque bon nombre de joueurs ont déjà eu recours à ce type d’entourloupes dans les jeux coopératifs. À quelques points près, ce changement de support de jeu est accessoire, il excuse au mieux l’utilisation prépondérante de la CG : tantôt criarde, tantôt chiadée, un McGuffin tout comme la quête des héros. 

L’aventure déroule ses événements sans surprise, desservie par l’opposition d’un Van Pelt (Bobby Cannavale) qui perd ses traits de bon vieux chasseur ici, pour devenir un bad guy trop dark plus générique que ses propres sbires. Tout comme la tentative d’incursion d’un nouveau personnage plus tard, qui opposera les années 90 aux années 2010. Rien ne fonctionne pleinement, rien ne rate totalement non plus. La prise de risque est minimale, l’envie de bénéfices plane ostensiblement sur le projet et l’étouffe avant même que l’on puisse y découvrir l’embryon d’une idée, qui faute d’être bonne, aurait au moins eu le mérite de l’audace. L’abandon finit par gagner le spectateur qui n’essaie même plus de relever les différents plot holes, contaminé par le je-m’en-foutisme ambiant.

Jumanji: Welcome to the Jungle, en incarnant l’absence de prise de risque caractéristique de tout un pan du cinéma de divertissement actuel, se saborde au moins autant que ses pairs de plus piètre qualité. Le film est à l’image d’une pizza quatre fromages : elle contient les ingrédients de base sans y ajouter une once de fantaisie, difficile de la rater comme d’en faire quelque chose d’exceptionnel. Un long-métrage de flemmard pour les flemmards.

2 Rétroliens / Pings

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