The Captain – L’usurpateur : Tout le monde craque pour un bel uniforme

Réalisateur allemand, Robert Schwentke s’est rapidement rendu à Hollywood pour y tourner quelques films dont la qualité oscille entre le plutôt bon (Flight Plan, RED) et le plutôt mauvais (Divergente 2 et 3). Après l’échec rencontré par Divergente 3, voilà Schwentke de retour en Allemagne pour tourner un film de guerre en noir et blanc à la violence brutale et au style affirmé. Une façon pour lui de se laver de l’expérience hollywoodienne ? Le réalisateur livre en tout cas son meilleur film avec The Captain – L’usurpateur.

Nous sommes fin avril 1945. La guerre touche à sa fin, c’est la débâcle dans les troupes allemandes. Les soldats désertent, pillent les villages. Séparé de ses troupes, Willi Herold (Max Hubacher, hallucinant), 19 ans, trouve l’uniforme d’un capitaine de la Wehrmacht dans une voiture abandonnée. Endossant l’uniforme et toutes les décorations qui vont avec (dont la prestigieuse Croix de fer), Herold décide de prendre son rôle d’officier très au sérieux. Il ne tarde pas à tomber sur d’autres soldats égarés qui se mettent sous son commandement et ils rejoignent un camp de détention isolé, composé de déserteurs, de voleurs ou de soldats jugés indignes de rester dans les rangs de l’armée. Là, Herold va plus loin dans son mensonge en disant obéir aux ordres du Führer en personne. Impatient à l’idée de se ‘’débarrasser’’ des prisonniers qui l’encombrent, l’un des chefs du camp, visiblement ravi que quelqu’un prenne la responsabilité du camp, ne tarde pas à donner toute autorité à Herold. A aucun moment, on ne lui demande des papiers confirmant ses ordres et lors de certaines vérifications, la débâcle est telle que personne ne réagit quand il s’affirme capitaine. A partir de là, Herold, grisé par son autorité, commence un carnage qui prendra fin quelques semaines plus tard avec son arrestation.

Tout ceci est une histoire vraie et il est important de le souligner tant ce qu’il se passe dans le film est d’une monstruosité sans nom. Véritable descente aux enfers en compagnie d’un personnage à peine compréhensible, The Captain a de quoi heurter la sensibilité du spectateur. On comprend pourquoi Schwentke fait le film en Allemagne, à Hollywood le sujet ne serait jamais passé. De cette histoire, le réalisateur tire un film glaçant, utilisant le noir et blanc et des cadrages stylisés pour mieux nous plonger dans la folie habitant Willi Herold. Une folie impossible à vraiment comprendre en dépit du contexte du récit. Car si l’on comprend aisément pourquoi un simple caporal peut voler un uniforme de capitaine, on a du mal à envisager les raisons qui l’ont poussé à ordonner le massacre de plus d’une centaine de personnes. The Captain devient alors une fable cruelle sur l’ivresse du pouvoir, celui donné par un simple uniforme. Car avec l’uniforme viennent les attentes des autres soldats sur les actions ordonnées par le capitaine. Parfois mis à l’épreuve par Kipinski, soldat qui sait reconnaître un escroc quand il en voit un, Herold se met donc à commettre de plus en plus d’actes insensés affirmant son autorité, grisé par le regard que les autres portent sur lui.

Film d’une cruauté implacable nous forçant à regarder en face les actions que l’être humain peut commettre quand il est poussé à bout, The Captain nous montre combien l’homme peut se laisser avilir par la vue d’un uniforme et par l’autorité qu’il représente. Le film n’est ainsi pas loin de l’expérience de Milgram, montrant le degré d’obéissance qu’un sujet peut avoir face à une autorité endossant les responsabilités d’actes de violence. Robert Schwentke embrasse tellement son sujet que le film finit par être douloureux à voir, en particulier lors des dernières scènes dans le camp de prisonniers où toute la violence et l’avilissement de certains personnages explosent. Après ça, le dernier tiers du film a l’air moins convaincant, semblant beaucoup plus expédié et sacrément moins fort. S’il cède à certains effets stylistiques un peu douteux face au sujet, le réalisateur n’en lève pas moins le voile sur une histoire qui mérite d’être racontée plus largement, ne serait-ce que pour en retenir les douloureuses leçons.

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  1. Où est Anne Frank ! : Elle n'est plus là -

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