Numéro Une : Le Soulèvement d’un Empire.

Le cinéma de Tonie Marshall n’a rien de bien flamboyant depuis 20 ans. Une vingtaine d’années correspondantes à son succès critique et public avec Venus Beauté (institut) en 1999. Depuis rien ou quelques essais en comédie notamment Tu veux ou tu veux pas avec Sophie Marceau et Patrick Bruel en 2014.

Numéro Une, en DVD depuis le 15 février, est un projet porté par la réalisatrice depuis 10 ans maintenant. Il était destiné au départ pour être une série TV intitulée Le Club. Mais aucune grande chaîne n’a trouvé le sujet assez intéressant pour être développée. La réalisatrice a alors retravaillé son projet en le réduisant à 1h40 en long-métrage. Cette démarche est une véritable réussite pour elle et pour le film. Dans sa forme, on ne déniche aucune fulgurance. Certains plans sont bien construits, mais tout reste simple. Il faut aller rechercher dans le fond pour trouver toute la force de Numéro Une. Le long-métrage est un thriller sur les arcanes du pouvoir au sein des grandes entreprises du CAC40. Les noms sont changés, mais le spectateur pourra s’y repérer avec facilités.

Le film raconte le parcours d’Emmanuelle Blachey, ingénieure, pour accéder à la direction d’une entreprise du CAC 40 grâce au soutien d’un réseau de femmes et malgré la misogynie régnant dans ce milieu de pouvoir. Ce fameux milieu gouverné en majeure partie par les hommes qui y font régner leurs lois. Un club de femmes va s’opposer à eux pour atteindre la place tant convoitée. C’est alors que se met en place un jeu de la mort entre petites faiblesses, cadavres dans le placard et autres bassesses. Les deux faces à faces entre Emmanuelle Devos et Richard Berry à l’Opéra sont pour le coup d’une écriture brillante et d’une interprétation juste. Pour atteindre cette justesse, Tonie Marshall a étudié le milieu, mais a reçu l’aide et la correction de Raphaëlle Baquet, journaliste au Monde, qui connaît parfaitement les sphères du milieu. Cette connaissance se ressent chaque minute du long-métrage qui est une véritable réussite. On est pris dans les tourments de ces manigances pour le pouvoir et l’argent. C’est en permanence les mêmes points, les mêmes volontés dans la recherche d’évolution des personnages : le pouvoir et l’argent. Parfois le sexe chez certains, par exemple Marc Ronsin interprété par Benjamin Biolay.

Les personnages, l’autre grande force de Numéro Une. À travers le film, ce n’est pas une étude poussée du milieu que recherche la réalisatrice. Nous en saurons le moins possible de ce monde qu’elle filme avec minimalisme. Tonie Marshall étudie ses personnages au plus profond d’eux, leurs volontés, leurs ambitions, leurs forces, leurs faiblesses. Elle scrute l’humain dans cette jungle vitrée. Emmanuelle Devos interprète Emmanuelle Blachey, fille d’un professeur réputé et dont la mère s’est suicidée alors qu’elle n’avait que 10 ans. Cette mort la hante, imagée par Marshall par des plans de vieux films dont La Nuit du Chasseur. Emmanuelle a des tendances dépressives, ce qui inquiète son mari anglais, travaillant dans une autre grande entreprise. Ce mari qui perd son job suite aux ambitions de sa femme. Un effet domino que Tonie Marshall exploite à merveille. Une machination qui se joue devant nous, à qui sera le plus fort et sortira le gros dossier pour faire tomber l’autre. L’homme versus la femme et vice-versa.

Numéro Une est enfin une proposition de cinéma intéressante et pertinente par Tonie Marshall. Finie la simplicité avec cet essai sur le jeu de pouvoir entre les femmes et les hommes, un vrai positionnement féministe avec des convictions et une vision fixe de son sujet. Emmanuelle Devos trouve alors un rôle à sa mesure, entre charisme et beauté.

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