Cold Skin : Nul homme n’est une île

Attendu à la rédaction depuis un moment, Cold Skin, la nouvelle réalisation de Xavier Gens s’est dévoilée hier soir au festival de Gérardmer à la séance de 22h. Rien de tel qu’un bon petit film de genre après un verre de vin chaud et pommes de terre braisés, ça vous remet d’aplomb !

Co-production entre l’Espagne et la France, Cold Skin aura mis du temps à se faire mais l’attente en valait la peine. Jusqu’à présent, c’est le film le plus excitant qu’on ait vu au festival et on ne peut que déplorer le fait qu’il n’ait toujours pas de date de sortie salles en France alors que le film respire le cinéma dès son premier plan. Adapté d’un roman de Albert Sánchez Piñol, Cold Skin est d’autant plus excitant qu’il marque l’incursion de Gens dans le cinéma d’époque et autant dire que dès que le décor est planté, on est conquis. En 1914, un climatologue est envoyé sur une petite île isolée pour une durée d’un an afin de relever la direction et la vitesse des vents. Il ne va pas tarder à laisser tomber son boulot pour un autre beaucoup plus important : la survie. En effet, à la tombée de la nuit l’île est souvent prise d’assaut par d’étranges créatures amphibies. Se retrouvant rapidement acculé, le climatologue n’a d’autre choix que de trouver refuge dans le phare de l’île, véritable bastion gardé par Gruner, un homme bourru et solitaire gardant près de lui une de ces créatures amphibies qu’il a dressé. Dès lors, chaque nuit, les deux hommes vont devoir faire face à des assauts de plus en plus pressants…

Avec son contexte historique (et la première guerre mondiale esquissée en toile de fond) et son superbe décor de phare isolé, Cold Skin impose dès ses premières minutes un vrai sens du décor et de la mise en scène. Posant habilement et facilement son ambiance, Gens entreprend alors de filmer l’inlassable combat nocturne de ses personnages principaux contre des créatures que l’on peut tuer facilement mais qui sont sacrément nombreuses. Et le moins que l’on puisse dire c’est que ça a de la gueule ! Si David Oakes et Ray Stevenson s’avèrent joliment charismatiques, c’est le design des créatures, incroyablement réaliste, qui retient notre attention. Le Abe Sapiens du Hellboy de Guillermo Del Toro n’est pas loin et dans le rôle de Aneris, la créature retenue captive par Gruner, l’actrice Aura Garrido effectue un travail proche de celui de Doug Jones. A elle seule, Garrido donne à son personnage, pourtant muet, une jolie palette d’expressions qui passent aussi bien par les mouvements que par le regard.

Le film, en soi, s’essouffle un peu en milieu de récit, un défaut décidément récurrent du genre de ces dernières années. Un brin répétitif, le scénario finit cependant par dévoiler sa belle ampleur dans son dernier tiers où le parallèle avec la guerre et la cruauté déployée par les hommes envers ce qui est différent est totalement évident. Cold Skin verse alors dans la parabole sur la violence humaine, sa bêtise et sa monstruosité, qu’elle soit causée par sa haine de l’autre ou par sa solitude. La fin, surprenante et bouleversante, vient donner du cœur à un récit qui semblait jusqu’alors un peu mécanique en dépit de ses indéniables beautés plastiques. Avec cette fin mettant en exergue la folle solitude d’un homme, Xavier Gens offre au spectateur un beau cadeau, terminant son film sur un très beau plan iconique mettant en valeur les beautés d’une créature amphibie peut-être pas si lointaine de nous. Cold Skin est donc tout ce que l’on avait envie de voir à Gérardmer, un film avec des tripes et du cœur, un vrai moment de cinéma quoi.

3 Rétroliens / Pings

  1. 25e édition du Festival de Gérardmer : Jour 3 - Close-Up Magazine
  2. Budapest : Very Crazy Trip -
  3. Cold Skin : Entretien avec Xavier Gens -

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*