Marie-Francine : En marche !

On a connu Tanguy chez Étienne Chatiliez, jeune homme intelligent de 28 ans, appréciant les jeunes femmes asiatiques, mais toujours chez papa-maman. Ces parents étaient exaspérés de la présence envahissante de leur fils chéri. Chez Valérie Lemercier, ce sera tout autre. On vous présente Marie-Francine, femme de 50 ans de retour chez ses parents bien malgré elle. La pauvre Marie-Francine, chercheuse/biologiste se fait larguer par son mari interprété par Denis Podalydès qui s’enflamme pour une jeunette de 20 ans son aînée. Outre cette séparation, Marie-Francine se fait virée du laboratoire où elle travaillait pour cause d’amiante dans l’immeuble.

À la rue totale après avoir squatté la chambre de bonne de sa sœur jumelle Marie-Noëlle, la pauvre Marie-Francine n’a pas d’autre refuge que le canapé-lit de ses vieux, très en forme et fort heureux de l’accueillir. C’est là où Valérie Lemercier lâche quelque peu son personnage principal se servant de sa mère comme détonateur comique. Hélène Vincent, pétillante comme jamais, trouve dans le rôle de la mère un exutoire comique communicatif. Entre les réveils matinaux en chanson avec Pimprenelle ou sa folie acheteuse sur Internet (le coup de la machine à bronzer est hilarant), elle est une mère en dehors de la réalité, totalement allumée par une bourgeoisie parisienne superficiellement en dehors du temps.

Tout cela, c’est avant la romance. Car suite au quart d’heure social pro-bobo énergique parisien cher à Valérie Lemercier et son public de fidèle, elle octroie une place bienvenue à la classe moyenne avec Miguel. Il est cuistot à côté de la petite boutique de cigarettes électroniques de Marie-Francine, reconverti en vendeuse pas très douée en attendant un nouvel emploi. La rencontre est maladroite et tendre, à l’image du reste de leur histoire. Valérie Lemercier manie le burlesque amoureux avec talent faisant de Marie-Francine une ado de 50 ans rentrant tard, cachant son flirte avec Miguel qui vit, lui aussi, chez ses parents dans une conciergerie.

Avec cette aventure romantique et passionnante, Valérie Lemercier a cette dextérité de ne pas tomber dans la facilité. Sa romance est pétillante, un amour vagabond qui se reflète sur l’humour général du long-métrage. Ce tournant dans la vie de Marie-Francine est finalement une aubaine pour elle. Avoir 50 ans et être face à un mur ne signifie pas forcément que sa vie s’arrête. La preuve avec Marie-Francine qui retrouve le dynamisme d’une vie heureuse et rigolote. Plus le film avance, plus ses yeux pétillent de mille feux. La liberté se crée de nouveau, et chez Valérie Lemercier c’est fort beau. Un cinéma simple, diablement bien aiguisé. On regrette alors de la voir si peu dans le cinéma français. Si peu de mise en scène, de propositions s’avérant si tendre. On n’en demande plus. C’est sûr qu’elle ne s’accommode jamais des attentes des chaînes en dépit de chiffres d’audience toujours élevés lors des premiers passages TV de ses films. Mais elle s’en détache jouissant d’une liberté totale. Cela procure un cinéma classique, mais autre, une atmosphère propre à la réalisatrice sans souci d’efficacité, d’humeur flâneuse. Elle se perd parfois notamment avec cette sœur jumelle sous-exploitée, Marie-Noëlle, gentiment saugrenus rappelant la Valérie Lemercier du début des années 90. Mais avec sa fantaisie, elle parvient à donner un charme inédit à Patrick Timsit, qui joue le cuistot. Et c’est beaucoup, l’acteur/humoriste étant la plupart du temps sous-exploité.

Marie-Francine est une comédie loin d’être facile. Est-elle vraiment une comédie quand elle sait tout autant développer le drame caché d’une famille, d’une vie et la difficulté de se reconstruire. Marie-Francine n’est pas le simple portrait d’une femme quittée de 50 ans, mais celui d’une France déchirée entre les générations se confrontant de façon bienveillante. Une France dans l’entre-deux à l’image des jumelles, Marie-Noëlle et Marie-Francine. Marie-Francine est la France en Marche, celle qui repart volontaire et amoureuse libérée de tout préjugé, libre d’agir et d’aimer.

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