Big Bad Wolves : Assoiffés de justice

Juste après avoir décrassé d’une bien belle manière (quoi que perfectible tout de même) le slasher / survival avec l’étonnant Rabies en 2011, les deux réalisateurs israéliens Aharon Keshales et Navot Papushado reviennent avec leur second long métrage, Big Bad Wolves. Choisissant de garder une thématique proche de la cruauté de humaine, ils racontent l’histoire d’un homme qui va subir une série de sévices afin qu’il avoue un crime qu’il soutient ne pas avoir commis. Extrêmement plébiscité dans les nombreux festivals où il est passé depuis maintenant plus d’un an, il a attiré les bonnes grâces de Quentin Tarantino qui assure que Big Bad Wolves est le meilleur film de l’année. Partageons-nous l’enthousiasme de Quentin ?

Le pitch de Big Bad Wolves fait énormément penser à tous les thriller modernes sortis ces dernières années. Choisissant de s’approprier un genre proche du « rape and revenge », on ne pourra jamais nier ses ressemblances avec des œuvres comme J’ai Rencontré le Diable de Kim Jee-Woon, Les 7 Jours du Talion de Podz ou bien encore la trilogie sur la vengeance de Park Chan-Wook. Quoi qu’il en soit, le film est servi par un casting exceptionnel qui tiendra le spectateur en haleine jusque dans son final. Tous les acteurs endossent parfaitement leurs rôles permettant une identification des plus simples pour le spectateur. Il faut dire que Keshales et Papushado sortent tous deux de l’université de cinéma de Tel-Aviv, leur amour d’un cinéma simple et efficace s’en ressentait parfaitement avec Rabies. Ils continuent leur percée sur cette seconde réalisation allant toucher au thriller de base pour y apporter leur petit vécu. Le tableau qu’ils dressent est simple : une cave, un fauteuil, un marteau, une scie, des clous, un chalumeau, un flic, un père en colère, un tueur soupçonné…et, par la suite, un grand-père en colère. Ajoutez à ce climat pesant des séquences d’humour noir extrêmement absurdes et vous aurez une vision d’ensemble parfaitement armée pour affronter Big Bad Wolves.

Choisissant de faire de la quête de justice du père l’attrait principal du film, les deux réalisateurs israéliens voient plus loin que leurs frontières géographiques pour leur œuvre : c’est un sujet universel qui parle à tous. Impossible d’échapper à la prestation de ce dernier d’ailleurs, Tzahi Grad impose une force de respect immense. Homme qui n’a plus rien à perdre, il reste stoïque, froid et malsain face à son ennemi assurant à son comparse, le flic, qu’un psychopathe ne craint que les autres psychopathes. Au-delà de cette nécessité de faire avouer son coupable, c’est avant tout le reflet d’un père de famille qui n’aurait jamais dû avoir à enterrer son enfant. Le coupable de cette série de massacres ayant la particularité de laisser les cadavres des fillettes sans leur tête, il ne se contente pas de tuer : il torture, drogue et viole ses victimes jusqu’à épuisement de ces dernières. Plus que la particularité singulière de ce psychopathe, tout semble indiquer qu’il se trouve en face de ses bourreaux qui ont de bonnes raisons de s’adonner à cette séance de torture. Au milieu de cette ambiance pas particulièrement reluisante, les deux réalisateurs distillent des répliques empruntent d’un humour noir qui fait mouche. En effet, et bien que ce ne soit pas le propos premier de Big Bad Wolves, on se retrouvera surpris à rire franchement de certaines situations. Mais ne vous trompez pas : le film de Papushado et Keshales est un thriller noir avant tout ! En dépit de certains running-gags, on se rend compte que les réalisateurs basculent efficacement vers l’absurde nous préparant, à notre insu, à une fin qui laissera bouche bée. Nous sommes baladés comme des moutons aveugles, la fin est un petit raz-de-marée auquel on s’attend sans s’y attendre. On ne s’y attend pas car elle est choc et abrupte, mais on s’y attend car les deux réalisateurs nous avaient laissé pas mal d’indices le long du film afin de nous préparer à affronter son final. Nettement plus abouti que RabiesBig Bad Wolves confirme que Keshales et Papushado ont un avenir cinématographique flamboyant qui leur est destiné.

Big Bad Wolves est un thriller moderne d’une violence âpre, mais jamais malsaine. Il s’appuie sur les codes classiques qui incombent au genre et le fait excellemment bien. Une petite bombe israélienne qui vient dynamiter un conformisme certain qui commençait sérieusement à étouffer le cinéma occidental. Sans pour autant partager l’énorme enthousiasme de Tarantino envers ce film, on ne peut, toutefois, que vous encourager à lui accorder sa chance en salle.

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