Les Croods : Au commencement, il n’y avait rien

L’épreuve du temps. Voilà un facteur qui fait des ravages plus ou moins égaux lorsqu’il s’agit de se lancer dans l’analyse d’un film antérieur à notre époque. Les Croods, sorti dans nos salles en 2013, a été un succès correct, rapportant près de 600 millions de dollars dans le monde, pour un budget d’environ 135 millions. Nous sommes à une époque où les studios d’animation Dreamworks ont fait leurs adieux à leur mascotte (Shrek) et tentent de lancer de nouvelles franchises à la hauteur de leur muse. En dépit de quelques bons films, et mis à part la trilogie Dragons qui peut, éventuellement, prétendre au poste de successeur, peu sont vraiment restés dans les mémoires. Non pas que des projets comme Baby Boss, Les Trolls, Kung-Fu Panda, Les Cinq Légendes ou encore M. Peabody & Sherman sont à jeter à la poubelle, loin s’en faut. Il est juste étonnant de constater que plus de dix ans après le quatrième opus de Shrek, c’est toujours bel et bien le célèbre ogre vert qui revient dans les esprits lorsqu’il s’agit d’évoquer les films Dreamworks Animation. Bien évidemment, Les Croods a fait office de challenger sérieux lorsqu’il est sorti. A l’approche de son second opus, que reste-t-il des aventures de ces hommes des cavernes atypiques ? Ont-ils passé l’épreuve du temps ?

Lorsque la caverne où ils vivent depuis toujours est détruite et leur univers familier réduit en miettes, les Croods se retrouvent obligés d’entreprendre leur premier grand voyage en famille. Entre conflits générationnels et bouleversements sismiques, ils vont découvrir un nouveau monde fascinant, rempli de créatures fantastiques, et un futur au-delà de tout ce qu’ils avaient imaginé. Les Croods prennent rapidement conscience que s’ils n’évoluent pas, ils appartiendront à l’Histoire.

Ce qu’il y a de bien avec un film sur la préhistoire c’est qu’il peut, factuellement, se montrer daté, l’illusion fera son effet. Les Croods subit difficilement les ravages du temps. A l’instar de Shrek, premier du nom (pourtant sorti 14 ans plus tôt), l’animation est tristement laide, les décors présentent peu de reliefs, c’est une vraie horreur à regarder. Non, Les Croods n’a clairement pas passé l’épreuve du temps. Pourtant, avec un co-réalisateur de la trempe de Chris Sanders (qui avait co-réalisé Dragons trois ans avant et qui garde une sacré gueule, même aujourd’hui), on était en droit d’attendre un univers bien plus riche et étoffé. Que c’est pauvre ! On essaie de se rattacher à la moindre pierre, au moindre grain de poussière. Pour autant, l’aspect austère du monde dans lequel évoluent les personnages n’est pas rebutant. Il n’y a juste rien qui justifie un quelconque émerveillement. Pour un film accusant moins de 10 ans d’existence, il y a de quoi avoir très peur. Et ne parlons même pas des personnages. Ils sont lisses et grossiers. A leur image, certes, mais au regard du budget conséquent du film, on ne peut que se scandaliser devant un tel travail bâclé. Les Croods est un film moche, véritablement moche.

Fort heureusement, et c’est probablement la seule raison qui a donné naissance à sa suite, les personnages sont attachants. La richesse de l’écriture permet d’oublier le fait que Les Croods souillent sérieusement nos rétines. Le film décortique les mœurs familiales avec une simplicité redoutable. Il démêle des arcs narratifs compliqués entre la figure paternelle qui veut garder l’autorité coûte que coûte, la fille aînée guidée par ses besoins d’émancipation, la mère soumise en apparence et qui gère le reste du troupeau d’une main de maître, la grand-mère au passé trouble qui préfère se taire plutôt que de remuer d’éventuels douloureux souvenirs… Il y a des choses très intéressantes qui sont traitées au sein du film. Le tout est emballé dans un humour salvateur propre aux studios Dreamworks. Les vannes méta fusent dans tous les sens, c’est un vrai régal pour les zygomatiques, qu’ils soient enfants ou adultes. Voilà pourquoi Les Croods reste, malgré tout, comme une valeur sûre du catalogue Dreamworks Animation, il réunit sans problème petits et grands et permet à chacun d’y trouver une satisfaction certaine. On appréciera grandement sa déconstruction familiale comme évolution inévitable, qui est un sujet hautement qualitatif. Loin du tire-larme facile (on est plus proche d’un niveau intellectuel des Tuche que d’un Captain Fantastic question gestion de la sphère familiale), Les Croods temporise ses propos (entre deux vannes puériles) en remettant perpétuellement son héros masculin en question. En dépit de sa peur du changement, Grug sera bien obligé d’admettre qu’il devra évoluer, se libérer des carcans de son héritage génétique et remettre en question les bienfaits de son éducation afin de prouver à sa fille qu’il l’aime et d’enfin avouer qu’il vivait selon des préceptes archaïques. L’amour d’un père passe avant tout, et en ce sens, Les Croods transmet parfaitement le message.

En définitive, bien qu’il soit loin de se valoir à Shrek (on en revient toujours à la même référence), Les Croods reste un spectacle suffisamment plaisant pour demeurer encore dans nos mémoires aujourd’hui. C’est moche visuellement, mais c’est drôle et loin d’être bête.

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