Zack Snyder’s Justice League : Symbole d’espoir.

Le générique de fin laisse éclater Hallelujah signé Leonard Cohen et entonné par Allison Crowe comme un chant du cygne d’un arc élaboré par Zack Snyder il y a de cela une dizaine d’années avec Man of Steel, introduction centrée sur Superman.
Après un décrié, mais épique Batman v Superman par sa version Ultimate en 2016, Zack Snyder trace sa perspective vers un chapitre consacré au rassemblement de la Justice League par Batman en réponse à la tragédie finale de L’Aube de la Justice. Le destin en a souhaité autrement, ou plutôt la bêtise de producteurs avides de toucher leurs dividendes à la fin de l’année en respectant le planning et le cahier des charges. Alors est née en 2017 une abomination de 1h45 que tout le monde ou presque a oublié aujourd’hui. Il ne reste que des cendres de ce montage fait de bric et de broc qui vont se disperser avec le temps laissant place à une œuvre monstre ressuscitée telle son héros par la Boîte Mère, à savoir les fans qui ont mené une campagne massive pour permettre de réhabiliter la version initiale de son auteur, Zack Snyder.

Justice League signé Zack Snyder est une arlésienne qu’on avait peu d’espoir de découvrir un jour. C’est aujourd’hui chose faite, nous pouvons annoncer enfin avoir la possibilité de voir à satiété Justice League de Zack Snyder. Cela faisait longtemps que le lancement d’un film, aussi massif que son attente démesurée, ne nous avait pas tortillé l’estomac de cette façon sur notre canapé en appuyant lecture. Nous pouvons enfin voir Justice League de Zack Snyder. Même à l’écrire une deuxième fois semble irréel. Nos vœux ont été exaucés et le résultat en a valu la peine. Une œuvre phénoménale durant 4H02 au cœur d’un univers superficiel à force de fonds verts retranscrivant à merveille la vision diégétique et fanatique de Zack Snyder sur l’univers DC Comics.
De l’abomination, il ne reste rien, simplement quelques séquences éparses remaniées, orchestrées au départ par Zack Snyder, des pièces d’un vaste puzzle se construisant sous forme de six chapitres et d’un épilogue impressionnant. L’histoire reste en somme la même pouvant donc tenir sur 1h45 à coup de ciseaux maléfiques. Mais Justice League n’est pas un film comme les autres sous l’œil avisé de Zack Snyder qui a cassé les codes instaurés depuis des dizaines d’années pour les adaptations de comics books au cinéma. Le réalisateur de Sucker Punch a pris la vision opposée de Kevin Feige œuvrant à la proposition des films Marvel avec son approche « serials ». Zack Snyder, qu’on aime ou pas le style, se positionne plutôt tel un Alan Moore – dont il a également adapté fidèlement au cinéma The Watchmen – ou comme un Frank Miller, élaborant un arc bien précis autour des héros mythologiques du catalogue DC Comics.

Chez Zack Snyder, les super-héros ne sont pas « super ». Les personnages ne sont jamais la représentation patriotique d’une nation ou découlant d’une idéologie scientifique. Comme avancé dans Man of Steel, Zack Snyder regarde ses personnages comme des êtres divins, Superman s’interrogeant au cœur de l’église dans Man of Steel puis sa représentation après son sauvetage à Mexico dans Batman v Superman. Dans Justice League, Superman ressuscite tel un Christ bienfaiteur d’une Terre proche de l’apocalypse, quand des chants sont entonnés en l’honneur d’Aquaman par le village de pêcheurs. Des dieux venus sur Terre pour protéger les humains d’attaques extérieures, notamment du cœur de la Terre, représentation appuyée par la peinture exposée par Lex Luthor dans BvS à la sénatrice Finch. Wonder Woman est elle aussi une divinité, car fille de Zeus, devenant le modèle au féminin inspirant la force et l’abnégation pour affronter la vie.
De ses personnages magnifiques adjoints par Batman, mythe urbain instillant la peur, et rejoints par Flash et Cyborg, Zack Snyder dessine une galerie d’icônes vénérées et grandioses.

Justice League prend alors le temps d’avancer ses personnages en leur laissant l’espace nécessaire pour exister. Aucun d’entre eux n’est laissé de côté entre instants glorieux et séquences épiques pullulant au cœur d’un film magistral. En cela, Justice League n’est jamais une œuvre nauséeuse. La ligne narrative est limpide, délimitée par des chapitres cadrant l’organisation de cette opposition héroïque. Bruce Wayne cherchant des renforts entre Aquaman et Flash, des personnages qui s’émancipent au centre du récit bien en amont de films solos. C’est également le cas pour Cyborg, personnage surprenant dont la trajectoire prend une place importante au sein du film. Son introduction est poignante entre la perte de sa mère et sa relation complexe avec son père. Zack Snyder se focalise sur le personnage incarné avec tact par Ray Fisher, découverte du film dans le costume d’un héros pas forcément attendu dans cette première version de la JL. On attendait plus favorablement Green Lantern ou Martian Manhunter, mais Cyborg s’impose comme une entité indissociable de cette Justice League version Zack Snyder tant toute l’intrigue repose sur les épaules du héros. Il éclipse alors Wonder Woman dont les présentations ne sont plus à faire après son film solo. Gal Gadot s’impose toujours comme le choix idéal pour incarner l’Amazone de par une présence forte et une beauté divine.
Le seul reproche viendra des humains peu présents entre un Commissaire Gordon bénéficiant d’une apparition légère incarnée par l’évidence J.K Simmons. Mais le regret viendra surtout d’Amy Adams qui se retrouve reléguée au second plan pour pleurer la mort de Clark. Quelques séquences bien ternes entre dépression et espoir d’une seconde chance dans cet amour. Pourtant Snyder stipulait qu’elle était la clé, peut-être dans de potentielles suites appelées de tous ses vœux par le réalisateur lui-même avec le soutien des fans évidemment. 

Justice League est une œuvre massive qui va cimenter à merveille vos après-midi dominicaux en plein hiver. Le film reconquis par Zack Snyder confirme tous les points positifs de Batman v Superman tout en accentuant les défauts. Libre de ces faits et gestes après la déconvenue de l’abomination, Zack Snyder signe une proposition généreuse et entière. Il reprend les rênes et accentue ses tics pour répondre aux fans. Il abonde alors son récit de séquences iconiques peignant ses héros sous leurs meilleurs atouts. Batman est en cela privilégié entre un plan sur une gargouille ou une pose dans l’épilogue sur son char. Jamais Batman n’aura été aussi imagé, un héros graphique sous l’œil de Snyder qui le fantasme tout en le respectant. Mais Snyder use et abuse de tocs de mise en scène à force de ralentis et d’une musique omniprésente. Cette dernière est signée Junkie XL qui récupère son poste initial accompagnant à merveille l’univers du réalisateur de L’Armée des Morts. La musique submerge le film en soulignant ses instants clés. L’accident à Central City en est le meilleur exemple, constatant que les défauts de l’orchestration de Snyder font la force du film. Ainsi, user et abuser des ralentis octroie une lisibilité claire dans l’action de chaque séquence du film n’indisposant jamais son spectateur à discerner les mouvements et la finalité d’une séquence brouillonne. Flash peut donc se lancer à pleine vitesse sans nous donner la nausée et les chorégraphies de l’opposition face aux paradémons et Steppenwolff sont perpétuellement limpides. L’artificialité de la mise en scène de Zack Snyder pour Justice League instaure une agréable sensation pour suivre un film imposant, qui plus est dans son salon sur son téléviseur. Un geste à saluer, même en direction d’une exploitation en salles où parfois les saccades procurent une détestable envie de sortir prendre l’air. 

Espoir est le symbole de cet arc époustouflant signé Zack Snyder. En dépit des défauts inhérents à l’amour porté à ses personnages et sa dévotion au genre procurant ainsi une surdose de générosité, le réalisateur a enfin pu conclure le premier acte de son arc génial procurant un air frais dans cette vague de super-héros au cinéma. Un arc sombre et obsédant mettant en avant des êtres divins, allégorie des fantasmes d’un artiste ayant fait preuve des mêmes aspérités en adaptant 300 de Frank Miller. Abnégation, courage et solidarité pour une troupe de combattants faisant preuve d’unités pour sauvegarder les préceptes d’une liberté à la force des poings.
Espoir également pour arriver à ses fins répondant aux appels incessants d’une communauté dévote à cette vision et ce cinéma répondant enfin aux attentes des amateurs de ses personnages mythiques qui ont réussi, après tout, à trouver l’amour sincère et nécessaire auprès d’un réalisateur à leur service.