La Daronne : Une baronne plus qu’une daronne.

Après une excursion remarquée aux États-Unis chez Neil Jordan dans Greta puis chez Ira Sachs dans Frankie, où elle y joue les rôles titres, Isabelle Huppert revient en France avec un film qu’elle conduit avec maestria, La Daronne. Le cinéma s’étoffe de films où la femme s’impose dans des rôles de plus en plus marquant et à contre-courant de ce qu’on leur propose habituellement. Et qui de mieux que l’illustre Mme Huppert pour s’imposer une fois de plus sur grand écran ?

Réalisé par Jean-Paul Salomé, adapté du roman éponyme d’Hannelore Cayre et sorti courant 2020, La Daronne (désormais disponible en vidéo chez Le Pacte depuis le 13 janvier dernier) raconte l’histoire d’une mère de famille progressivement mise de côté par la société et de plus en plus en mal d’argent, devant s’occuper de sa mère malade. Elle découvre une lourde cargaison de poudre blanche un jour et saisit l’occasion de changer de vie du tout au tout avec les risque que cela implique, y comprit celui que sa profession lui impose.

N’échappant pas à quelques clichés bien connus du cinéma français, le scénario se laisse un peu trop facilement porter par des thématiques communes. Les relations sentimentales sont convenues et souvent attendues, y compris certaines scènes servant de fusil de Tchekhov au film dont on sait immédiatement leur but futur. Ce sont les liens entre différents personnages qui sont récurrents et peu surprenants. Cependant l’histoire est bien menée, avec des personnages bien écrits. L’intrigue est correctement dirigée, avec de bons rebondissements et une certaine crédibilité. Malgré la nature comique du long métrage, celui-ci raconte une histoire prenante et sérieusement scénarisée. La bande-annonce oriente vers un genre dramatique qui n’est finalement qu’une excuse pour réunir humour et drame.

C’est plutôt la nature même de l’histoire qui est très intéressante à analyser. Isabelle Huppert devient presque une baronne de la drogue alors qu’il est rare de voir une femme dans cette posture. C’est elle qui prend les commandes sur de nombreux aspects et dirige les actions faisant un pied de nez à de nombreux gros durs. Au point qu’elle change beaucoup d’aspects de sa vie pour imposer son poids dans l’histoire. Les rapports de force s’inversent et il y a littéralement une opposition entre sa considération en tant que dealeuse et en tant qu’employée ministérielle. Étrangement, il semble que cela reflète sacrément la réalité du terrain si l’on voyait des femmes à ce point impliquées dans le marchandage des drogues. C’est en ce sens que le film est intéressant, il s’avère vraisemblable dans le contexte qu’il instaure. Couplé à son personnage principal emblématique, on obtient une histoire finalement bien ficelée et vibrante. L’actrice joue son rôle à la perfection, à la fois avec beaucoup de talent et de travail et en même temps un naturel convaincant. Elle est bien entourée par un casting de qualité et bien dirigé. Plusieurs rôles sont inversés et il est intrigant de voir à quel point cela peut modifier en conséquence les comportements les plus attendus. Le cinéma français peut se vanter de compter un nouveau personnage féminin badass.

Rassurez-vous, La Daronne est loin d’être un film aussi classique et prévisible qu’il ne semble l’être. Il est bien dosé, raconte une histoire intéressante et bien scénarisée. Les acteurs jouent bien, c’est un bon moment en perspective et il est toujours intéressant de voir des personnages féminins mis en valeur à ce point. Et puis avec Isabelle Huppert on est rarement déçu il faut bien l’avouer.

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