L’île aux Oiseaux : Nos amis les becs.

Déjà bien entamée, l’année 2021 nous oblige encore une fois à découvrir les nouveautés cinématographiques par d’autres chemins que les voies habituelles ; toujours fermées depuis maintenant plus de trois mois, les salles de cinéma semblent, à leur corps défendant, passer le relai aux nouveaux médias susceptibles de proposer au public les créations les plus récentes et – parfois – les plus inattendues. C’est le cas de la Société Shellac qui diffusera, à partir du 12 février 2021 et dans le cadre du cycle thématique « Animal on est mal » via son système de VOD par abonnement, le très beau et très humble documentaire suisse L’île aux Oiseaux réalisé par Sergio Da Costa et Maya Kosa, production inédite en France n’ayant alors bénéficié que de quelques rares projections dans le cadre des festivals en amont de la crise sanitaire (notamment lors du Festival de Locarno en 2019).

Sur une soixantaine de minutes à peine, le binôme de réalisateurs constitué par Maya Kosa et Sergio Da Costa parvient à nous immerger dans le milieu culturel d’une animalerie située à Genève, avec des moyens artistiques et budgétaires d’une extrême et remarquable simplicité. Tenant lieu dans le centre ornithologique de Genthod, ledit documentaire se concentre principalement sur la figure du jeune Antonin, garçon au tempérament tranquille et un tantinet passif voué à prêter ses services au vieux Paul et à ses deux collègues que sont les jeunes Sandrine et Emilie pour les besoins de l’animalerie, au plus près des oiseaux… et des rongeurs ! Paul et son équipe pratiquent de fait l’élevage de petits rats destinés à nourrir les volatiles alors en convalescence, perpétuant envers et contre tous le bon déroulement de la chaîne alimentaire… Meurtris, blessés, victimes de maladies infectieuses, les oiseaux de l’île sont alors traités en bien par le quatuor de figures humaines, à l’aune d’une époque où l’écosystème a souvent bien du mal à garder la tête hors de l’eau… et dans les cieux !

Bienveillant, évitant admirablement l’anthropomorphisme tant attendu compte tenu du sujet ce documentaire met paradoxalement en scène la figure d’Antonin avec des moyens proches de la fiction. À l’image des oiseaux qu’il soigne et qu’il nourrit au diapason de Paul, de Sandrine et d’Emilie, Antonin semble lui aussi sur les chemins d’une forme douce de résilience somatique : peu bavard, accordant pourtant sa voix pour le commentaire audio du métrage, le jeune homme semble fragile, lymphatique presque. Ainsi le regard que portent Sergio Da Costa et Maya Kosa sur leurs personnages demeure proche du reflet ontologique, mettant face à face la remontée thérapeutique d’Antonin à celle, plus vitale, des nombreux oiseaux-titre. Le film évite la recherche superflue d’un style ou d’une réelle esbroufe visuelle, privilégiant le travail et le quotidien de la petite équipe sus-citée pour laquelle les choses vont d’elles-mêmes, routinières mais bienfaitrices. Un beau et simple documentaire, incontestablement.

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