The Craft – Les Nouvelles Sorcières : Go Go Power Witcher !

Le cinéma était mieux avant est une expression surfaite qui commence malheureusement à prendre forme avec les divertissements produits ses derniers mois. Quand on passe en revue tous les remakes et autres nouvelles adaptations/suites produits en grandes pompes par les studios, on frôle le burnout. Qu’on se le dise, rien ne sort du lot, et pire même, on saigne des yeux à chaque découverte naïvement intrigué par la teneur de cette réinterprétation d’un hit d’une époque, voire d’un classique.
Dans le cas présent, The Craft (ou Dangereuse Alliance à sa découverte en VHS en France en 1997), tube d’une époque révolue nous embarquant dans les délires de quatre jeunes adolescentes mal dans leurs peaux qui vont se servir de diverses incantations et sortilèges pour se venger de leurs situations pénibles. Une madeleine qui se consommait dans le noir les mercredis après-midi après un détour au vidéo-club. Un film qui réussit à passer les années après révision de par un sujet toujours d’actualité entre le harcèlement scolaire, l’acceptation des autres, le racisme ou le mal-être suite à un trouble physique. The Craft est en soi une réussite par sa compréhension des maux des adolescents et la violence à laquelle ils peuvent faire face au quotidien. Un point sur lequel la société n’a pas fini de travailler, reflet de notre société établissant d’elle-même ce mal-être pour mieux conformer l’humain dans un mécanisme économique.

Que peut bien alors apporter de neuf cette nouvelle version de The Craft signée par Zoe Lister-Jones disponible en DVD/Blu-Ray le 10 février 2021 en France ? Pas grand-chose après la projection d’un film faiblard, curieux sur le départ, s’effondrant ensuite dans tous les enjeux mis en place. Ces nouvelles sorcières se la jouent petits bras avec leurs expériences ressassées 25 ans après se trouvant être des hobbies pour petites bobos en marge à la vie facile. Le film ne prend jamais la peine de nous présenter les trois comparses qui accueillent Lily dans leur petit cercle satanique pour invoquer les bienfaits de la nature. Le scénario met alors en avant quatre jeunes filles dans le vent/feu/terre/eau proche d’un concept de série à New-York produit par Darren Star. Ces jeunes filles sont d’une futilité navrante en comparaison aux premières sorcières originelles.

Souvenez-vous de Neve Campbell au corps brûlé, de Fairuza Balk humiliée par une vie pauvre, de Robin Tunney faisant face à la perte de sa mère et Rachel True combattant le racisme. De véritables enjeux humains et de société dont porte le poids ces quatre jeunes femmes qui vont se rallier à la sorcellerie pour s’émanciper et extirper leurs maux.
En 2020, cette suite/reboot n’a rien à ajouter ni à développer. Zoe Lister-Jones, artiste venant de la fibre indépendante américaine, se fait avaler sur cette production qui capitalise sur un titre connu pour mieux surfer sur la prise du pouvoir matriarcal à Hollywood. Après la piètre troisième version de Black Christmas signée BlumHouse, ce même studio récidive fautant sur une conception similaire sans le moindre recul, ni la moindre confiance envers son sujet. The Craft peine à souligner la moindre analyse du monde entourant nos héroïnes nous jetant face à un produit tout juste digne d’un épisode de Charmed. Quatre jeunes sorcières aux pouvoirs qui les dépassent s’allient pour affronter un démon sortant de nulle part, représentation du « Mâle » détruisant toute notion d’homosexualité et asservissant les femmes. Là est la mesure d’un produit de consommation à peine réfléchi profitant des maux de notre société pour nous brûler les neurones.

Mais quelle connerie abjecte avons-nous le droit ici avec cette modernisation ridicule d’un film générationnel qui se satisfait lui-même. Pas besoin de toucher ni de donner suite à The Craft signé dignement par Andrew Fleming qui avait pris soin de travailler ses personnages campés par des actrices d’une génération perdue. Cette nouvelle version méprisable est une alliance dangereuse de jeunes actrices interchangeables sans la moindre nuance devenant des super-héroïnes malgré elles combattant un démon au cœur d’une triste clairière dans un final ridicule. On s’attriste alors d’assister au cabotinage de David Duchovny jamais crédible et de Michelle Monaghan, totalement aseptisée, dans cette supercherie indigne de leurs charmes respectifs. On comprend que parfois la nécessité de certains impératifs financiers comme une nouvelle maison, les études des gamins ou un divorce à entretenir, mais ont-ils au moins pris la peine de lire le scénario  ? 

Face à The Craft, on ne peut s’empêcher de penser à des séries comme Buffy contre les Vampires ou même Arrow produites avec passion et parfois un certain talent. De savoir que ces programmes sont plus honorables, voire parfois jouissifs, que ce produit abject lequel nous venons de faire face est une hérésie envers le savoir-faire d’un certain cinéma. The Craft est une insulte envers son spectateur payant le prix fort pour se divertir et se détendre devant un programme. Le film orchestré par Zoe Lister-Jones et produit par Jason Blum se montre tout le long irrespectueux nous crachant à la tronche le fait de s’être fait volé dans les grandes largeurs.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*