Dans la souricière : On a connu plus palpitant

Éclectique dans ses choix éditoriaux, Rimini Editions poursuit son exploration de la grande richesse du cinéma américain en sortant, dans un combo Blu-ray + DVD disponible dès le 20 janvier, Dans la souricière, un film noir aux allures de western réalisé en 1959 par Norman Panama. Si ce titre ne vous dit rien, rassurez-vous, il s’agit d’une œuvre totalement méconnue que l’on redécouvre aujourd’hui, aguiché par son pitch digne d’une bonne série B et son casting où Richard Widmark affronte Lee J. Cobb.

Pensez donc : Massonetti est un gangster avidement recherché par les forces de l’ordre. Ayant décidé de fuir le pays, il doit passer par la petite ville de Tula afin de rejoindre l’aérodrome où un avion l’attend. Ralph Anderson, originaire de la ville, mais l’ayant quitté depuis longtemps, est devenu l’avocat de Massonetti, le truand sachant forcer les gens à faire ce qu’il désire à grand renfort de menaces. Etant le fils du shérif local, Ralph doit donc demander à son père de laisser Massonetti traverser la ville sans faire d’histoire afin d’éviter un bain de sang, Massonetti venant accompagné de ses hommes de main. Autoritaire et droit dans ses bottes, le shérif accepte néanmoins de rendre ce service, ignorant que Tippy, son autre fils et son adjoint, alcoolique ayant épousé Linda, l’amour de jeunesse de Ralph, a décidé d’affronter Massonetti. Il en découle une fusillade, le père de Ralph et ses autres adjoints trouvant la mort. Dès lors, il s’agit pour Ralph et Tippy de livrer Massonetti aux autorités compétentes, devant parcourir de longs kilomètres à travers le désert avec des gangsters aux trousses…

Le pitch est d’une jolie simplicité et avait tout pour être une série B efficace et implacable. De fait, ce ne sont pas les idées qui manquent puisque le cadre d’une petite ville désertique, le triangle amoureux entre Linda et les deux frères et la course à travers le désert sont, sur le papier, hautement cinématographiques. De ces trois choses, Norman Panama parviendra tout juste à travailler habilement la relation unissant Ralph et Tippy à Linda, celle-ci étant incarnée par la plantureuse Tina Louise. Pour le reste, on ne s’étonnera pas si Dans la souricière et Norman Panama sont tombés dans l’oubli tant le cinéaste (qui était également scénariste et producteur) peine à transcender ce qu’il a entre les mains. D’une part, le scénario aurait gagné à être approfondi sur la relation unissant les personnages. D’autre part, Panama s’avère absolument incapable d’insuffler la moindre tension à son récit, peu aidé par un budget certainement restreint si l’on en croit les pauvres décors en carton-pâte composant la ville de Tula. Mais même en resserrant l’action sur ses personnages ou sur leur traversée du désert, jamais Dans la souricière ne parvient à nous captiver réellement, sa mise en scène étant d’une faiblesse assez désolante surtout quand l’on pense à ce qu’aurait pu tirer un grand cinéaste d’un tel matériau de base. Difficile de ne pas penser à l’excellent Un homme est passé qui se déroulait lui aussi sur une unité de temps resserrée dans une petite ville sous un soleil de plomb et dont l’ombre plane étrangement sur le film.

Face à cette étrange absence d’un réalisateur, ne reste alors plus que le casting pour donner de l’impulsion à l’ensemble. On a beau adorer Richard Widmark, force est de reconnaître qu’on l’a connu bien meilleur, l’acteur étant ici visiblement sous-exploité, dans un rôle dont il s’efforce de dessiner les nuances et la profondeur sans pour autant y parvenir, faute d’un cinéaste pour l’épauler. Si Tina Louise irradie l’écran par sa présence, c’est bien évidemment Lee J. Cobb qui compose la principale attraction du film. L’année précédente, il incarnait déjà un truand mélancolique et implacable dans le formidable Traquenard de Nicholas Ray (dont on attend encore une sortie blu-ray en France). Ici, il fait des merveilles, l’acteur sachant imposer par sa présence, son visage et ses gestes, un personnage certes manichéen, mais à qui il apporte quelques petites touches complexes qui font plaisir à voir et dont on admire les subtilités de jeu.

Loin de tenir ses promesses, Dans la souricière ne vaudra quasiment que pour Cobb et s’avère être une petite déception. On remerciera cependant Rimini d’avoir exhumé le film, véritable curiosité pour les cinéphiles qui pourront y trouver leur bonheur même s’il faut bien avouer que l’on a vu mieux et que le manque de tension évident au récit pourrait causer quelques somnolences en cours de visionnage…

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