L’Aliéniste – Angel of Darkness : It’s a cruel, cruel world

En 2018, alors qu’elle se présentait encore comme une mini-série, nous avions eu du mal à être convaincus par la première saison de L’Aliéniste. Le récit manquait de surprises pour quiconque avait lu le roman de Caleb Carr, le travail d’adaptation était trop sage et la réalisation trop plate pour convaincre. L’arrivée de cette seconde saison, intitulée Angel of Darkness, avait de quoi nous laisser perplexes et à vrai dire, on ne s’attendait pas à grand-chose. La surprise est donc agréable quand cette deuxième itération (elle aussi basée sur un roman de Caleb Carr et composée de huit épisodes) s’avère bien meilleure que la première !

Il y a plusieurs raisons à cela. Dans un premier temps, l’effet de surprise de l’aspect policier du récit. Là où le moindre rebondissement de la saison 1 nous était connu en avance suite à la lecture du roman, le fait de ne pas avoir lu le livre dont la saison est adaptée joue évidemment sur notre ressenti face aux différentes péripéties rencontrées par les personnages. Mais cela se joue tout de même au-delà. D’une part, nous prenons un réel plaisir à retrouver notre trio de personnages de la première saison. Si L’Aliéniste n’avait guère convaincu par son écriture, les interprétations solides de Dakota Fanning, Luke Evans et Daniel Brühl étaient clairement ce qui permettait à la série de se suivre sans trop de déplaisir. Ici, grâce à une écriture mieux soignée et à un léger recadrage de point de vue (le personnage principal n’est plus John Moore ici mais Sara Howard, ce qui s’avère bien plus intéressant), les doutes devant le premier épisode de cette saison se dissipent vite et l’on se prend à enchaîner très vite les épisodes.

Resserrée sur huit épisodes, débarrassé de quelques personnages secondaires, Angel of Darkness s’intéresse à une tueuse kidnappant et tuant des nourrissons. Après la découverte d’un cadavre de bébé, Sara, qui a ouvert sa propre agence de détective, enquête sur l’enlèvement d’un autre nourrisson. Décidée à tout faire pour le retrouver, son enquête, menée avec l’aide de John et Laszlo la dirige vers un hôpital où les riches bourgeois de la ville emmènent leurs maîtresses se faire avorter et vers un dangereux gang de criminels. Parallèlement, John doit se marier avec la filleule de William Randolph Hearst mais il n’en continue pas moins d’éprouver des sentiments pour Sara…

Efficace dans sa narration, la série rappelle parfois les meilleures œuvres de Thomas Harris par sa façon de mettre en parallèle Sara et la tueuse, qui partagent plus de choses qu’elles ne veulent bien l’admettre. Si cette saison est toujours aussi glauque dans son intrigue criminelle, la place apportée à la femme, à la pression sociale qu’elle peut subir et à son désir, ou non, de maternité rend Angel of Darkness rapidement passionnante, parvenant même à aller au-delà de son simple postulat de thriller pour livrer un vibrant plaidoyer sur notre besoin désespéré d’amour et sur les folies qu’une enfance maltraitée peut engendrer. En plus d’être relativement palpitante dans ses péripéties (même si les deux derniers épisodes en font un peu trop), Angel of Darkness apporte un réel soin à ses trois personnages principaux. Si Marcus et Lucius sont très vite évacués du récit et réduits à un temps de présence limité, c’est pour mieux se concentrer sur nos trois héros dont l’interprétation est toujours aussi juste. Alors qu’elle est totalement classique, l’histoire d’amour contrariée entre John et Sara se montre étonnamment convaincante, voire carrément émouvante lors de son dernier tiers et lorsque Laszlo apprend à regarder à l’extérieur de son institut, c’est avec un léger pincement au cœur que l’on voit nos héros se séparer et que l’on se prend à espérer leur retour.

Belle surprise donc que cette deuxième saison, sombre, palpitante et surtout bien mieux écrite. Comme pour se mettre au diapason de ce scénario plus réussi, la réalisation bénéficie d’une belle efficacité, celle-ci étant assurée par David Caffrey (à l’œuvre sur la saison 4 de Peaky Blinders) et de Clare Kilner, rendant le New York de cette fin de XIXème siècle à la fois inquiétant et plein de promesses pour l’avenir. Une hausse de qualité qui fait plaisir à voir et qui prouve que la série ne s’est pas reposée sur ses acquis, affinant ce qui faisait déjà son charme tout en rejetant ce qui lui faisait défaut. Le résultat est certes imparfait mais néanmoins diablement prenant, se regardant avec un réel plaisir.

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