Les Nouveaux Mutants : Espèces confinées

C’est en cette fin du mois d’août que finalement, Les Nouveaux Mutants est parvenu à se frayer un chemin jusqu’à nous. Prévu pour une sortie en 2018, malmené par la Fox qui souhaitait des reshoots, laissé de côté suite à l’échec de Dark Phoenix au box-office puis au rachat de la Fox par Disney, le film était prévu chez nous pour le 1er avril. Une date qui sonnait comme une vaste blague, remise en cause par l’épidémie de Coronavirus. Alors qu’on s’attendait presque à voir le film débarquer sur Disney+ (alors que surprise, ce sera Mulan), Les Nouveaux Mutants est donc sorti le 26 août, dans la version voulue par son réalisateur Josh Boone, Disney ayant laissé le cinéaste revenir à son montage initial.

Une bonne chose et une sage décision tant Les Nouveaux Mutants, par son approche du genre et par sa tonalité, apporte une certaine fraîcheur à un univers de mutants et de super-héros qui commence à sérieusement s’user jusqu’à la corde. La surprise est donc assez conséquente lorsqu’à la fin de la projection, on en arrive à constater que Les Nouveaux Mutants est un bon film, certes handicapé par un scénario qui aurait gagné à être étoffé et par des effets spéciaux un peu légers mais qui fait rarement ressentir le poids de sa production chaotique.

Bien que le pitch d’abord présenté par Josh Boone (un film d’horreur dans l’univers X-Men) soit légèrement survendu, on ne peut qu’admirer la volonté du cinéaste de frayer justement dans l’épouvante avec quelques séquences réussies qui auraient cependant gagné à bénéficier d’une plus grande maîtrise de la mise en scène. L’horreur n’est cependant pas le cœur du film, celui-ci décidant, dans une envie de contrer tout spectaculaire durant sa première heure, de se concentrer avant tout sur les portraits de ces adolescents mutants, pas encore capables de contrôler leurs pouvoirs et paralysés par des traumas liés à la découverte de ceux-ci.

C’est dans un mystérieux hôpital tenu par le docteur Reyes que Danielle Moonstar arrive et fait la rencontre de quatre jeunes mutants comme elle. Ignorant encore la nature de ses pouvoirs, Danielle subit de plus en plus de tests et alors qu’elle commence à se poser des questions sur le but véritable de ce lieu où ils sont enfermés, ses camarades voient des cauchemars du passé remonter à la surface… Globalement adapté de l’arc narratif The Demon Bear Saga (l’un des plus emblématiques des comics), Les Nouveaux Mutants confronte ainsi ses jeunes héros à leur passé, ceux-ci devant affronter leurs tourments pour parvenir à aller de l’avant. Choisir d’aborder la question des pouvoirs se développant en parallèle à l’adolescence permet très vite d’annoncer la note d’intention de Boone, plus qu’un film d’horreur, Les Nouveaux Mutants fait le portrait touchant d’ados écorchés vifs, devant trouver leur place dans un monde dont on leur refuse l’accès. A deux reprises dans le film, les personnages regardent Buffy contre les vampires à la télévision : la référence est peu subtile mais exprime bien ce qui tient à cœur à Boone au sein du récit.

Alors que le film aurait gagné à être plus dense (ses personnages masculins sont très peu esquissés) dans sa première partie, la seconde partie verse dans le côté plus classique du genre et Boone s’y montre tout de suite moins à l’aise. Qu’importe, non seulement Les Nouveaux Mutants assure le divertissement mais il parvient à imposer une tonalité bienvenue dans l’univers X-Men dont l’avenir est désormais incertain. Grâce à l’interprétation pleine de justesse des jeunes acteurs réunis (parmi lesquels on remarque Anya Taylor-Joy, Maisie Williams et Charlie Heaton) et à son équilibre plutôt habile (du moins pendant un moment) entre horreur (par sa galerie de personnages écorchés vifs et son décor, on pense parfois aux Griffes du cauchemar) et portraits plus intimistes (avec une très belle scène de rapprochement amoureux), le film fonctionne donc plutôt bien et l’on se surprend, une fois la projection finie, à espérer son succès afin de pouvoir retrouver ces personnages, les plus intéressants qu’on ait vus depuis un moment dans le paysage super-héroïque.

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