Penny Dreadful : City of angels – saison 1 : Peut mieux faire

Petit bijou de télévision macabre et gothique parti trop tôt, Penny Dreadful reste à ce jour un modèle du genre, une superbe réussite dans un registre où bien trop de gens se sont plantés. L’idée d’une nouvelle itération de la série, sous la forme d’un spin-off à l’ambiance et aux personnages complètement différents avait de quoi surprendre, mais aussi de quoi contenter les fans de la première heure qui avaient goûté à l’équilibre savamment dosé de fantastique, d’horreur et de romantisme que John Logan avait créé. La présence de Logan en personne, lui aussi de retour derrière la série, écrivant six épisodes de la saison, avait de quoi rassurer sur le contenu de ce City of angels. Hélas, après être venu à bout de cette saison, force est de constater que la magie n’opère pas le moins du monde.

La série s’est pourtant donné les moyens avec une très belle reconstitution du Los Angeles de 1938. C’est dans cette ville dense que Magda, entité maléfique et sœur de Santa Muerte a décidé de se manifester sous plusieurs formes (une femme séduisante, une vieille assistante dévouée, une violente membre d’un gang) pour pousser le monde des hommes au chaos. En cette année 1938, elle n’a d’ailleurs pas grand-chose à faire car des émeutes sévissent entre la communauté mexicaine et la ville qui veut construire une autoroute à travers le quartier mexicain. C’est dans ce contexte que Tiago Vega, premier mexicain à être nommé inspecteur à Los Angeles commence, se retrouvant immédiatement sur le meurtre rituel d’une riche famille de la ville. Alors qu’il doit faire face au racisme ambiant, son partenaire, un Juif, enquête sur la présence de nazis en ville, bien décidés à prendre le pouvoir et à utiliser les idées d’un brillant étudiant pour concevoir une dangereuse bombe…

Il y avait là de quoi nous offrir un beau divertissement. Et pourtant, loin de nous l’idée de comparer cette série avec son illustre aînée tant elles n’ont rien à voir, mais on ne peut s’empêche de remarquer que City of Angels échoue là où l’originale avait tant brillée : l’argument fantastique et horrifique est trop léger et pas assez fouillé pour convaincre, les personnages sont trop nombreux et manquent quasiment tous de charisme et d’intérêt, l’intrigue piétine et l’on ne peut que regretter que la série préfère laisser de côté ses arguments fantastiques pour se pencher sur une énième histoire de nazis présents sur le territoire américain. On regrettera également un manque de subtilité certain quant au parallèle effectué par la série entre la montée du fascisme de la fin des années 30 et le mandat de Trump à la Maison Blanche, parallèle devenu un poil facile dans le divertissement américain de ces dernières années qui, s’il a le mérite d’être engagé politiquement, aurait tendance à nous servir la même rengaine sans grande originalité. En cela, la dernière réplique de la série (‘’ce n’est pas une autoroute qu’ils construisent, c’est un mur. Ce n’est pas les États-Unis d’Amérique’’) vient enfoncer le clou d’une série qui avait tout pour être passionnante mais qui s’est totalement égarée en chemin.

SI John Logan a toujours aimé prendre son temps dans sa narration, il parvenait à ne jamais nous faire languir de l’action grâce à des personnages incroyablement fouillés. Ici, empêtré dans un folklore mexicain tout juste effleuré (et c’est vraiment dommage), des nazis de pacotille (Thomas Kretschmann, encore dans ce registre, sérieusement ?) et des personnages secondaires dont on se fout complètement, City of angels a bien du mal à maintenir notre intérêt éveillé. Si Tiago est intéressant par son statut d’outsider total (rejeté par les siens car il est policier, rejeté par les policiers à cause de ses origines), Daniel Zovatto a un peu de mal à lui donner chair d’autant qu’il partage de nombreuses scènes avec Nathan Lane (la voix originale de Timon dans Le Roi Lion, l’original, pas la purge sortie l’année dernière), de loin l’acteur le plus charismatique de la série et le personnage le plus intéressant, portant sur lui la fatalité du peuple Juif tout en étant farouchement décidé à combattre les nazis.

Face à eux, Natalie Dormer s’amuse visiblement à incarner Magda et ses différentes apparences, mais l’écriture ne lui offre jamais de véritable moment iconique et elle reste finalement noyée dans la masse des personnages informes de la série. Le casting rassemblé n’est pourtant pas mauvais (à l’exception de Jonathan Nieves) : Adriana Barraza, Michael Gladis, Rory Kinnear, Amy Madigan, Lorenza Izzo, Lin Shaye, Brent Spiner, Brad Garrett et même Brian Dennehy le temps d’une scène dans ce qui sera l’une de ses dernières apparitions à l’écran. Mais à aucun moment la série ne parvient à concilier ses ambitions de s’inscrire dans la logique de Penny Dreadful, de vilipender l’ère de Trump et de proposer un grand récit fantastique et romanesque. Chaque tonalité et embranchements du récit viennent finalement se prendre les pieds dans le tapis dès qu’on les assemble et si la saison a une belle tenue formelle et d’indéniables scènes de dialogues brillantes, c’est malheureusement bien peu. Si l’on considère City of Angels comme une série comme une autre, elle apparaît peu réussie, si on la considère comme une création de John Logan et une nouvelle itération de Penny Dreadful, autant dire qu’elle est une déception totale et qu’elle devra faire un sacré bond en saison 2 si elle veut espérer relever le niveau.

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