Mine de Rien : Rencontre avec l’acteur Arnaud Ducret

Lauréat du Prix du Public lors de la dernière édition du Festival International du Film de Comédie à l’Alpe d’Huez, Mine de Rien n’avait bénéficié que de deux semaines d’exploitation dans nos salles avant le début du confinement. Sa sortie avancée en VOD le 15 avril dernier permettait aux spectateurs l’ayant loupé de pouvoir le voir plus tôt que si la chronologie des médias avait été respectée. Un film emplit d’émotions porté par un Arnaud Ducret en plein état de grâce. Arnaud Ducret qui nous a gentiment octroyé quelques minutes entre deux appels WhatsApp pour nous livrer ses impressions.

Vous incarnez Arnault dans le film. Un personnage très endeuillé à la fois par la perte de son papa, une ex-femme et des enfants qui ne veulent plus avoir affaire à lui et qui doit gérer une maman atteinte d’Alzheimer. C’est un personnage fort que vous jouez avec une sensibilité plus vraie de nature.

Merci beaucoup.

Que vous a inspiré votre personnage ? Comment aborde-t-on la complexité qui colle à ce genre de rôle ?

Je fonctionne au scénario. À partir du moment où tu m’offres un script avec les cendres de mon père dans une boîte de chocolat en poudre et une mère Alzheimer, tu m’as à 80%. (Rires) Ce qui m’a plu dans ce personnage, c’est qu’il est totalement accablé sous une chape sociale horrible. Ce qui va le rendre plus fort, c’est justement d’être mis au pied du mur. Il va essayer de retrouver le respect afin de réussir sa vie et ne plus être ni spectateur ni acteur du désespoir. Et puis le rôle de la paternité est quelque chose de beau qui me touche énormément. Il n’y a rien eu de complexe dans ce rôle, tout s’est fait avec un naturel évident notamment grâce à la relation que j’entretenais avec Mathias (ndlr. Mlekuz, le réalisateur).

Mine de Rien est reparti avec le Prix du Public au Festival de l’Alpe d’Huez cette année. Quand on regarde le palmarès des différentes éditions du festival, on se rend compte que bons nombres de comédies ayant remportés un prix possèdent un fond sociétal fort. Est-ce que, pour vous, une bonne comédie doit coller avec un pan historique, politique ou social ?

Ce serait prétentieux de dire ça, même si je trouve qu’il manque beaucoup de choses à beaucoup de comédies. Au départ, Mathias voulait réaliser une comédie pure et dure. Le côté social nous a un peu échappé. Il m’avait fourni le scénario il y a 6 ans. Il a eu beaucoup de mal à monter son projet. Entre-temps, il y a eu le soulèvement de la masse populaire et la forte mobilisation des gilets jaunes qui sont passés par là. Quand le film a pu se faire, Mathias avait resserré des choses sur son scénario. Ce n’était plus juste une comédie. Il y avait quelque chose de plus fort qu’on n’a pas vu tout de suite. On s’en est vraiment rendu compte à l’Alpe d’Huez. Quand les lumières se sont rallumées après la projection. Dans le public, il y avait beaucoup de nos amis. Quand on les a tous vu avec les larmes aux yeux, nous applaudir, on ne s’y attendait pas. Le fait de repartir avec le Prix du Public, ça avait du sens. C’est un film qui parle du peuple, c’est un film qui parle des gens. C’était une vraie surprise cette récompense.

Vous partagez l’affiche avec des comédiens renommés comme Hélène Vincent, Philippe Rebbot ou encore Rufus. Quel effet cela procure de donner la réplique à ces grands noms ?

Il faut savoir que Philippe Rebbot est la seconde raison pour laquelle j’ai accepté de faire le film. C’est un comédien formidable avec beaucoup de talent. Ma plus belle rencontre ça a été de jouer avec Hélène Vincent. Je n’arrêtais pas de lui répéter entre les prises : « Merci Hélène, tu donnes un superbe crédit à un personnage formidable. » Elle était gênée et bien trop modeste pour reconnaître son véritable talent. Mise à part cela, toute la troupe était formidable. Que ce soit les comédiens avec plus de renommée que les véritables chômeurs et ex-mineurs que Mathias à fait jouer dans son film. Il est né là-bas. Il savait quelles étaient les gueules qui auraient donné du cachet à son film. Sur le plateau, on était tous logés à la même enseigne, et c’est ça qui était formidable.

Mine de Rien est sorti deux semaines avant le début du confinement. Il avait réalisé un démarrage difficile (à peine plus de 106 000 spectateurs). Sa sortie avancée en VOD lui offre la chance qu’il mérite d’être vu à une plus grande échelle compte tenu du contexte actuel. Quel est votre avis sur la chronologie des médias ? Pensez-vous que nous devrions faire fi de cela et proposer la sortie de certains films à la fois en salle et en VOD, comme cela se fait aux États-Unis qui sont exempt de chronologie des médias ?

Justement, c’est une question que je me pose. J’avoue ne pas bien connaître la chronologie des médias, je ne savais même pas qu’aux États-Unis il n’y en avait pas. Mais vu l’état actuel des choses, je me demande s’il n’y a pas plus de gens qui vont le voir maintenant qu’il est en VOD. Vous savez, moi le premier, en ce moment je n’ai rien d’autre à faire que d’aller sur Netflix. La SVOD est devenue monnaie-courante. Mais devoir payer pour voir un film chez soi, je ne sais pas si c’est accepté chez beaucoup de monde. Après, en ce moment, les gens n’ont vraiment rien d’autre à faire à part cuisiner et faire du sport…enfin, un semblant de sport ! (Rires) Pardon, je suis méchant. Mais ce qui pourrait les motiver à louer le film c’est que c’est un film simple. Il n’y a pas de misérabilisme. On en sort avec le sourire en se disant que la vie n’est pas si compliquée que ça finalement.

Pour finir, petite question confinement oblige. Quelles sont les comédies qui vous inspirent ? Celles que vous conseilleriez à nos lecteurs de voir ou revoir en ce moment ?

C’est très vague comme question. Mais c’est marrant, il y a justement cet après-midi un film qui passe à la télévision que je me suis fait une joie de montrer à mon fils. Ce film est un de ceux qui m’ont donné envie de faire ce métier. Ce film c’est Une Époque Formidable avec Gérard Jugnot dans lequel il y est formidable justement. Il est à la fois très juste et très tendre, un vrai numéro d’acteur. Après, je ne vais pas faire original, mais La Grande Vadrouille évidemment. C’est tellement bien écrit, tellement bien réalisé, tellement bien monté. Récemment j’ai vu Selfie avec Manu Payet et Blanche Gardin. C’était pas mal du tout, je le conseille vivement. Sinon, en série, en ce moment ma compagne regarde The Morning Show avec Steve Carell et Jennifer Aniston. Je ne sais pas ce que ça vaut, mais elle m’en dit du bien. Et puis Steve Carell est une valeur sûre de la comédie américaine.

Propos recueillis par Anthony Verschueren par téléphone le 24 avril 2020.

Un immense merci à Arnaud Ducret pour son amabilité et sa chaleur humaine ainsi qu’à Aude Dobuzinskis pour la possibilité de cet entretien.

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