Cancìon Sin Nombre : Jamais sans ma Fille

Passé par la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes en 2019, Canciòn Sin Nombre est le premier long-métrage de Melina Léon, péruvienne de naissance, qui vit entre New-York et Lima depuis une dizaine d’années. Cette dernière s’est fait reconnaître par quelques courts-métrages primés notamment Le Paradis de Lili qui a remporté près de 11 prix dans 20 festivals internationaux.
L’histoire de Canciòn Sin Nombre, Melina Léon la tient de son père, journaliste péruvien reconnu qui a fondé La Republica au début des années 80. Le scénario provient donc des histoires que son père lui a raconté et sur lesquelles il a enquêté, dont les fameux enlèvements d’enfants par une mafia politique se faisant de l’argent sur le dos de son peuple démuni. Elle réunit donc les éléments nécessaires pour fournir un scénario écrit avec Michael J. White, également producteur d’un long-métrage compliqué d’accès, mais beau par un noir & blanc pointu.

Ce noir & blanc, Melina Léon le doit à Inti Briones, l’un des 10 chefs opérateurs «à suivre» selon Variety. Le film lui doit beaucoup. Calfeutré dans un format 1:33, le film souhaite rappeler les programmes de la télévision dans les années 80, époque où se déroule le film. Concernant le Noir & Blanc, c’est un choix de la réalisatrice pour rappeler l’impression des journaux en monochrome, hommage à son père, lequel le film est dédié.
Canciòn Sin Nombre se déroule donc au Pérou, au plus fort de la crise politique des années 1980. Georgina attend son premier enfant. Sans ressources, elle répond à l’annonce d’une clinique qui propose des soins gratuits aux femmes enceintes. Mais après l’accouchement, on refuse de lui dire où est son bébé. Décidée à retrouver sa fille, elle sollicite l’aide du journaliste Pedro Campos qui accepte de mener l’enquête.

Par le biais de ses personnages forts, Mélina Léon explore un pays en crise vivant au gré des attentats du groupe terroriste maoïste, Les Sentiers Lumineux, dont le film nous réservera un twist fort plongeant encore plus dramatiquement Georgina comme un témoin d’une époque violente. En peu de temps, la jeune femme va tout perdre, restant sans réponse face à la perte de sa fille. Si le journaliste réussit à sortir l’affaire des enlèvements (Georgina n’est pas seule), il va vite être cadenassé par la potentielle révélation d’un secret. Incarné de façon taiseuse par Tommy Parraga, l’homme trouve sa place au cœur d’un film fort et prenant. Menant discrètement une double vie qui se révèle dans une deuxième partie se consacrant à l’investigation, le film n’en oublie pas moins Georgina qui va taper quotidiennement et crier à la porte du local qui a servi pour l’accouchement clandestin. Deux destins qui s’adjoignent au cœur des turpitudes d’un état à peine tranquille aujourd’hui et qui aura fait face aux diktats de gouvernements véreux pendant des années.

S’il ne s’adresse pas à tous les cinéphiles, Canciòn Sin Nombre est un intéressant premier film qui fait dériver les formes de ses personnages sur les colonnes des montagnes des Andes en parallèle des secousses politiques qui agitent un pays en révolte. Assurément que Mélina Léon est une cinéaste à suivre de près, car ce premier long-métrage nous coince par son format oppressant convoquant parfois un fantastique hallucinatoire sur les courbes onduleuses des Andes et nous happe au cœur d’une enquête passionnante et crispante au cœur des rouages d’un pays chaotique. 

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