Tuer n’est pas jouer (1987) : « Mon intérêt est purement professionnel »

James Bond

Roger Moore ayant définitivement raccroché le costume de l’agent 007, la place est vacante pour quelqu’un de plus jeune. Plusieurs noms sont envisagés, de Sam Neill à Lambert Wilson, aussi improbable soit-il. C’est cependant Pierce Brosnan qui a les faveurs des producteurs mais l’annonce qu’il pourrait être le prochain James Bond pousse la chaîne NBC à renouveler la série Les enquêtes de Remington Steele, bloquant Brosnan pour qui ce ne sera que partie remise. Déjà évoqué à l’époque où Roger Moore pensait abandonner le rôle, c’est finalement à Timothy Dalton qu’on offre le rôle. L’acteur lui-même, plus connu pour ses prestations théâtrales, affiche un certain désintérêt pour le personnage et Albert R. Broccoli lui fait passer des essais où Dalton se montrera convaincant, obtenant ainsi le rôle pour la deuxième prestation la plus courte de l’histoire de la saga, Dalton n’incarnant Bond que dans deux films.

Mais quels films ! Après la décontraction laconique et l’humour mi-lourd mi-misogyne de Roger Moore, l’interprétation de Timothy Dalton dans la peau de Bond fait un bien fou. L’acteur incarne un Bond plus sérieux, plus impliqué dans sa mission, plus violent aussi avec un penchant plus sombre qui sera encore plus exploité dans Permis de tuer. De fait, le Bond de Dalton marque les prémisses de celui de Daniel Craig et il ne fait aucun doute qu’avec un ou deux films de plus, Dalton aurait pu marquer plus considérablement les esprits. C’est en tout cas l’acteur le plus à réévaluer dans le rôle auquel il apporte énormément, ramenant le personnage vers des dimensions plus réalistes.

L’ordre de mission

Lors d’un exercice à Gibraltar, un agent 00 est tué. On retrouve sur son cadavre un papier avec écrit Mort aux espions en russe. En Tchécoslovaquie, le général russe Koskov déserte son pays et passe à l’Ouest avec l’aide de James Bond. En Angleterre, Koskov révèle au MI6 que le général Pushkin a lancé l’opération Mort aux espions. Bond a cependant du mal à croire Koskov et en retrouvant la trace de sa petite amie, une violoncelliste dont Koskov voulait la mort, Bond se rend compte que Koskov veut éliminer Pushkin et prendre sa place en Russie à l’aide du trafiquant d’armes Brad Whitaker. De Tanger jusqu’en Afghanistan, Bond poursuivra Koskov, déterminé à l’arrêter…

Tuer n’est pas jouer marque le retour de la saga à une farouche volonté de réalisme, chose abandonnée avec le délirant Octopussy et le spectaculaire Dangereusement vôtre. Le scénario prend en compte le contexte de la Guerre Froide et se montre très sérieux, chose renforcée par l’interprétation solide de Dalton dans le rôle de Bond. A noter que le film, dont la chanson de générique de a-ha est toujours aussi excellente, est de ces Bond qui vieillissent bien et dont on apprécie chacune des visions, grâce à un scénario dense et à quelques scènes bien marquantes dont un combat dans un avion spectaculaire.

On regrettera alors d’autant plus que la densité du scénario soit un peu trop touffue inutilement et que les méchants, bien qu’incarnés par deux bons acteurs, soient moins marquants. Nous sommes ici loin des mégalos période Roger Moore et la volonté d’inscrire les ennemis dans un contexte réaliste les dessert un peu.

Antagoniste

Georgi Koskov est un général russe avide de pouvoir. Il fait croire à sa défection pour dégager son rival Pushkin et revenir en grâce dans son pays en achetant une énorme quantité d’armes. Dans sa défection, il demande à sa petite amie Kara de lui tirer dessus avec des balles à blanc, sachant ainsi qu’elle sera éliminée. Fort heureusement, Bond a compris que la belle violoncelliste n’était pas une tueuse et c’est elle qui lui permettra de remonter la piste de Koskov. Volubile, d’apparence joviale et assez pleutre, Koskov préfère laisser les autres faire le travail à sa place et apprécie la bonne chère. Il est un adversaire vicieux et retors, mais pas un homme d’action. Un personnage pas inintéressant surtout que l’excellent Jeroen Krabbé (vu dans plusieurs films hollandais de Verhoeven) lui donne vie mais qui peine à marquer durablement les esprits.

L’autre méchant du film, c’est Brad Whitaker. Très peu présent à l’écran, il avait pourtant un potentiel immense. Le mégalo du film, c’est lui. Trafiquant d’armes aimant se faire passer pour un militaire (ce qu’il n’a jamais été), sa demeure à Tanger est remplie de statues de cire représentants de grands généraux de l’histoire et de maquettes illustrant des batailles célèbres. Un ennemi avec de l’allure, sacrifié par un scénario déjà bien dense qui ne lui laissera que peu de place. Joe Don Baker, avec déjà une solide carrière derrière lui au moment du tournage (on l’a vu dans Justice sauvage ou Tuez Charley Varrick !), se rattrapera quelques années plus tard en incarnant à deux reprises l’agent de la CIA Jack Wade dans les deux premiers Bond de l’ère Brosnan.

N’oublions pas non plus le tueur Necros, grand échalas au corps parfaitement sculpté et qui se sert du fil des écouteurs de son walkman pour éliminer ses victimes, y compris un pauvre laitier qui n’avait rien demandé à personne…

James Bond Girl

Violoncelliste, Kara Milovy a commis l’erreur de tomber amoureuse de la mauvaise personne, le général Koskov qui la manipule pour faire croire à sa désertion et entend la laisser pour morte derrière. Bond aura cependant le nez fin et remonte la piste de Kara, comprenant que celle-ci a été manipulée. Au bout de deux jours, la belle blonde tombera dans les bras de Bond et fera tout pour rester à ses côtés durant la mission. Si le personnage peut se targuer de prendre quelques initiatives çà et là, ayant sacrément plus de nuances que Tanya Roberts dans Dangereusement Vôtre, il lui manque cependant un petit quelque chose de vraiment piquant pour marquer. La prestation de Maryam D’Abo n’est cependant pas à remettre en cause, celle-ci se montrant très convaincante, affichant sa beauté froide et son regard électrisant avec une sacrée classe. Comme beaucoup d’actrices ayant joué des James Bond Girls, elle aura tout de même du mal à mener sa carrière par la suite, n’ayant guère de rôle aussi emblématique que celui-ci.

Section Q

Plus de réalisme dans ce Bond certes mais l’atelier de Q est tout de même visité et Bond y récupère une de ses fameuses Aston Martin avec toutes les options incluses : rayon laser, missiles, vitres pare-balles, patins de circonstance pour la conduite sur la neige et hyper propulsion pour mieux passer les frontières. N’oublions pas le porte-clés universel se déclenchant sur sifflement : il dégage du gaz incapacitant si l’on sifflote Rule Britania mais un sifflement bien plus machiste le fait carrément exploser !

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*