Queen & Slim : La balade sauvage

Pour leur premier rendez-vous Tinder, Queen et Slim, deux afro-américains avaient envisagé plein de choses mais pas de se faire arrêter et brutaliser par un policier. Avocate, Queen prend la défense de Slim lors d’un contrôle virant à la violence et se fait tirer dans la jambe. Après un affrontement avec le policier, Slim tue celui-ci. Les deux jeunes gens sont alors obligés de partir en cavale, eux qui se connaissent à peine, Queen ayant accepté le rendez-vous de Slim uniquement parce qu’elle ne voulait pas se sentir seule ce soir…

Queen et Slim fuient alors à travers le pays, laissant derrière eux leurs rêves et leurs espoirs. Alors que la communauté afro-américaine les érigent en Bonnie et Clyde des temps modernes, symboles d’une révolte qui gronde, ceux-ci sont complètement dépassés par les événements. Ils veulent juste vivre, aimer et être aimés et ils n’ont plus qu’eux deux pour le faire. Cette balade sauvage va alors prendre des accents tragiques, faite de rencontres, de superbes moments suspendus dans le temps et d’un amour fort, d’autant plus intense qu’il s’agit sans doute du dernier.

Pour son premier long-métrage, Melina Matsoukas s’empare d’une histoire forte et impose sa volonté de mêler avec une certaine habileté cinéma engagé et film de genre, Queen & Slim répondant à tous les codes du film de poursuite effrénée contre la police (on pense à Bonnie & Clyde mais aussi à Thelma et Louise) tout en posant de façon ambiguë la question de la violence pour défendre la cause afro-américaine en Amérique. Si Queen et Slim deviennent des symboles en ayant tué un policier (coupable d’avoir tué quelques années plus tôt une personne lors d’un contrôle), ils sont cependant totalement dépassés par l’image qu’ils véhiculent, incapables de contrôler le message qu’ils font passer. Leur action étant une question de réflexe et de survie, ce sont les autres qui s’en emparent de façon politisée, à l’image de ce gamin les idolâtrant et qui tuera un policier en suivant bêtement leur exemple. Cette façon de ne jamais aller chercher des raisons politiques chez les personnages permet de montrer toute l’étendue des conséquences de leurs actes tout en se concentrant sur eux deux, qui n’ont jamais été aussi vivants que depuis leur fuite.

Là où le film est d’ailleurs le plus réussi, c’est quand il se concentre sur les personnages et leurs émotions, les étapes de leur parcours étant un peu trop balisées sur le pur plan scénaristique. Mais dès que Queen & Slim saisit l’instantanéité des personnages, dans leur rapport à la vie et à l’amour, dans ce que cette fuite leur révèle, le film a de vrais moments de grâce nous touchant en plein cœur. C’est là la force de la mise en scène de Melina Matsoukas qui n’a pas peur des sentiments et des gros plans pour mieux approcher la vérité de ses personnages, incarnés par un Daniel Kaluuya et une Jodie Turner-Smith en état de grâce. La cinéaste, déjà réalisatrice d’une multitude de clips, fait preuve ici d’une belle maîtrise laissant augurer le meilleur pour la suite qu’on espère tout aussi brûlante de vie.

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