Snatchers : Volontaire, mais en plastique non-recyclable.

Dès son titre, le premier film de Stephen Cedars et Benji Kleiman donne le ton. Le «Body Snatcher», genre fantastique à part entière qui se sera structuré autour d’un même et seul film, L’invasion des Profanateurs de Sépulture réalisé par Don Siegel en 1956, et dont une multitude de remakes francs (ou pas) en a découlé en 60 ans de cinéma fantastique.
Mais outre le «Body Snatcher», ce gentil film renvoie volontairement au Alien de Ridley Scott et aux Gremlins de Joe Dante. Cedars&Kleiman se référencent à cœur joie tout le long du film entre la fameuse séquence de destruction de la bête, non pas au micro-onde, mais au mixeur, ou l’accouchement bien crade des bêtes, dont l’héroïne est enceinte, dans un geyser de sang.
Snatchers, qui ouvre la 27e édition du Festival International du Film Fantastique de Gérardmer, est une succession interminable de citations qui ne donne pas, malheureusement pour lui, la structure nécessaire pour consolider sa narration. S’enfermant dans un second degré potache jamais drôle, on peine parfois pour lui. Le seul bienfait notable dans l’emploi du second degré est de camoufler les errements des deux actrices principales (voire du reste, très pénible en soit), loin d’être irréprochable et jamais empathique. Leurs tribulations sont amusantes pendant la première partie d’un film qui s’emballe vite. En somme dès l’ouverture avec une animation servant de guide pour le générique qui donne le ton superficiel du long-métrage.

On ne peut trop s’emporter de reproches envers ce premier film volontaire qui s’amuse à exister, et cela se ressent à l’écran. Les moyens (que l’on suppose light) sont plutôt bien utilisés, les deux bestioles à l’écran faisant leurs effets. Jamais Snatchers ne tombe dans le Z par des effets ratés. Bien au contraire, les effets gores sont carrés et les deux bêtes sont d’une plastique irréprochable. C’est surtout dans la tenue même du film que le tout pêche. Souhaitant une approche teenage, les deux réalisateurs collent leurs mises en scène sur un design «fake» qui aide/sauve en soi le côté numérique de la photo. En cela, Snatchers ressemble beaucoup trop à une production bas de gamme du catalogue Netflix. C’est franchement laid, surtout sur un écran géant de cinéma. Le film se destinant au marché de la vidéo, il n’a potentiellement aucun souci à se faire dans son appréciation  par le public jeune cible, surtout que celui-ci s’est aujourd’hui familiarisé avec la gamme basse des séries Netflix consommées en masse.

Si la forme laisse à désirer, on ne peut enlever une écriture juste procurant une certaine épaisseur au fond. L’éternelle Amérique puritaine qui punit son héroïne après avoir cédé au péché originel pour les faveurs superficielles d’un homme et d’un groupe de filles qui en paieront également le prix. L’héroïne qui reproduit les erreurs passées de sa mère notifiant l’histoire d’un pays statique aux idées morales et politiques bien-pensantes, alors qu’il s’agit tout simplement d’une supercherie et d’une hypocrisie éhontée. Snatchers marque alors un dernier point avec son racisme ouvertement bruyant pour mieux dénoncer l’Amérique de Trump dont finalement la superficialité formelle renvoie. 

Avec Snatchers, Stephen Cedars et Benji Kleiman ne se débrouillent pas trop mal malgré des défauts bien trop prononcés. S’il n’est jamais marrant pour un sou, le long-métrage se démontre frondeur de par son analyse politique et morale d’un pays plastique non recyclable. Il aurait donc mérité à moins s’enfoncer dans ses références excessives et essayer d’exister par lui-même, chose complexe pour tout premier film, dont finalement le principal défaut est d’être trop volontaire.

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  1. 27e Festival International du Film Fantastique de Gérardmer - Jour 2 -

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