Play : La surprise à ne pas manquer de ce début d’année

Généralement, les sorties de début d’année n’augurent rien de très bon qualitativement parlant. Dans la tête des distributeurs, il s’agirait plutôt de l’emplacement des films poubelles, dont ils ne savent trop que faire le reste du temps, et dont ils se débarrassent au moment où la gueule de bois post fêtes maintient plutôt les gens chez eux que dans les salles. De plus, la sortie décalée de plusieurs mois du film présent, initialement prévue pour fin octobre 2019, n’avait rien pour rassurer. Mais il ne faut pas s’y tromper, ceci étant dû aux problèmes rencontrés par la société de distribution Mars films, qui a dû laisser filer le bébé chez Gaumont, qui se charge donc de sortir l’objet en ce premier jour de la nouvelle décennie. Une comédie française en found footage, avec Max Boublil (comédien sympathique mais pas toujours dans les meilleurs coups cinématographiques, il faut bien le dire), par le réalisateur de l’accident industriel (et sans doute artistique, mais ne soyons pas mauvaises langues, nous ne l’avons pas vu), Robin des Bois : la véritable histoire, autant dire que sur le papier, tout ceci n’était pas des plus engageants. Oui mais, il y a bien un mais, ce joyeux tandem était également à l’origine du très réussi Les gamins, comédie sur des adultescents qui n’auraient pas dépareillés dans un Apatow, qui réunissait Max Boublil donc, et Alain Chabat, s’échappant de leur petite vie ennuyeuse, pour retrouver des sensations perdues depuis longtemps. Rempli de dialogues et situations particulièrement bien sentis, le résultat avait donc laissé un très bon souvenir à l’esprit des spectateurs l’ayant vu, et pour peu que l’on soit de nature un peu curieuse, on pouvait vite se rendre compte que le film présent, n’était pas un film comme un autre pour son auteur, et que ce dernier l’envisageait clairement comme l’œuvre de sa vie, réunissant tout ce pour quoi il avait eu envie de faire du cinéma, et dont il se dit aujourd’hui si fier qu’il pourrait tout aussi bien arrêter sa carrière dessus. Mais de quoi parle donc ce fameux film ?

Construit selon le mode du faux documentaire, terme plus approprié que le found footage, ce dernier impliquant que l’on visionnerait des bandes retrouvées par un tiers ultérieurement à leur conception, alors que dans le cas présent le film consiste en un montage effectué par le personnage principal lui-même à partir de tous les films tournés par ses soins depuis son enfance ; le film suit donc  l’évolution de ce dernier, à travers tous les moments essentiels forgeant la personnalité de tout un chacun pour le mener à sa vie d’adulte. Il est en réalité difficile d’aller plus en avant dans la description de ce qu’est le film, puisqu’en lieu et place d’une intrigue qui consisterait à aller d’un point A à un point Z en passant par de nombreux rebondissements, le concept consiste plutôt ici à suivre ce personnage et ses proches à travers une succession de bribes de situations, mises bout à bout sur un principe presque impressionniste. A savoir que l’enchainement de ce qui peut passer au départ pour des saynètes mises bout à bout, formera un tout fluide et pensé dans les moindres détails, que l’on pourrait tout simplement considérer comme une captation d’un morceau de vie, s’étalant sur plusieurs décennies.

Il ne se passe donc rien d’extraordinaire ici, mais c’est pourtant énorme, car il est finalement rare de ressentir ce genre de sensations au cinéma, à savoir d’avoir l’impression palpable et presque exaltante de vivre l’œuvre en mouvement aux côtés des personnages, comme si l’on était une présence invisible auprès de personnes que l’on aurait pu fréquenter à une époque, et que l’on pouvait donc par ce biais ressentir à nouveau ces sentiments nous agitant tous à un moment ou un autre de notre vie. Les amis, les amours, les emmerdes, mais surtout ces moments de joie, cette naïveté désarmante propre à l’âge adolescent, cette maladresse que l’on a tous expérimentée, et bien entendu cette façon d’être désemparés face à une fille dont la simple évocation suffit à nous déchirer le cœur, et à qui l’on n’ose pas déclarer sa flamme, quand bien même cette dernière nous tendrait plus que des perches …

Bref, toutes ces petites choses finalement bien plus extraordinaires que les exploits de super héros désincarnés, font de ce film un moment dont la simplicité apparente cache en réalité des trésors d’émotion et de tendresse, entre deux crises de rire bien entendu. Mais en ne tombant jamais dans le piège de l’humour potache, le résultat en est une comédie dramatique tous publics idéale pour bien démarrer l’année, nous baladant entre une soundtrack aux petits oignons et des moments irrésistibles faisant presque monter les larmes aux yeux, par leur candeur assumée. Si l’on voulait pinailler un peu, on pourrait se désoler de passer si vite aux 2000’s, alors qu’on serait bien restés encore un peu dans les 90’s. Mais également remarquer que la netteté des images et la fluidité du montage et de la mise en scène sont peut-être un peu trop clean par rapport à qui tient la caméra dans le film, même si cela prouve au moins que Anthony Marciano a bien pensé son film en terme de cinéma et de logique de réalisation. Enfin, on pourra s’étonner que malgré la promotion nous vendant un feel good movie plein de bonnes vibrations, le ton général soit plutôt à l’amertume, quand bien même le film retomberait sur ses pieds sur la fin (que l’on ne révèlera pas bien entendu) !  Mais toutes ces affirmations peuvent également passer pour des qualités et n’entament en rien le plaisir ressenti tout au long du visionnage. Bien interprété, bien écrit et bien réalisé, le résultat est une vraie Madeleine pour les indécrottables nostalgiques que nous sommes tous (à la fois de notre jeunesse insouciante, mais également de décennies que l’on n’aurait pas forcément vécues de plein fouet), et l’occasion de tomber amoureux une fois de plus de Alice Isaaz, dont chaque sourire a de quoi pétrifier sur place tous les romantiques que nous sommes. Et en prime, vous aurez également droit aux apparitions amusantes de Alain Chabat, dont l’apparence agit en forme de clin d’œil à son époque des Nuls. En bref, si vous n’êtes toujours pas convaincus après tout ça, on ne voit vraiment pas ce que l’on peut encore faire pour vous.

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