Give me Liberty : Excellemment positif

Give me Liberty est un film de Kirill Mikhanovsky. Il est parfois difficile d’aborder certains films tant ils sont d’une sincérité poignante. L’approche devient compliquée, les défauts du long-métrage peuvent devenir intrinsèques à l’histoire. Ce qu’ils disent ou tentent de dire nous apparaît alors très sage et métaphorique à la fois. Le message dégage une forme d’autodéfense à la critique. Quand bien même il échouerait dans son objectif, le fond narré par le réalisateur suffit à le faire passer pour un film défendable. Film américain tourné dans l’état du Milwaukee dans le Wisconsin, il s’agit cependant d’un film dont le cœur est d’origine russe. Son réalisateur, russe, a souhaité rendre état de sa sincérité en mettant des personnages d’origine russe dont il puise leur histoire au sein de la sienne.

Vic est un jeune homme d’origine russe vivant à Milwaukee. Son travail est de conduire des personnes âgées et handicapées à travers la ville en minibus. Un boulot assez répandu et bien utile pour ceux qui ne peuvent plus se déplacer. Malheureusement pour lui, la journée qui l’attend sera longue et très éprouvante. Alors qu’il doit réaliser les déplacements de ses passagers du jour, le bus devant emmener sa famille aux funérailles de sa grand-mère n’arrive pas. À contrecœur il décide d’accepter d’emmener tout le monde, quitte à faire des détours et retarder toutes les courses de sa journée. À chaque destination son lot d’aventure et à chaque trajet son histoire, même lorsqu’il parvient enfin à l’enterrement, il n’est pas au bout de ses peines.

Malgré son titre, Give Me Liberty ne parle ni d’esclavage ni vraiment de la politique actuelle américaine. Quoique, son sujet montre tout de même une forme d’esclavage moderne et toute histoire traitant des droits des individus finit par devenir politique, si ce n’est pas le sujet principal de ce film. Il existe de nombreux films à caractères bien différents, certains sont de pures histoire bien huilées, d’autres sont avant tout esthétiques, les plus gros studios s’orientent depuis quelques temps vers de simples divertissements ou parfois sur des essais cinématographiques contemplatifs. Celui-ci se range probablement dans l’une des catégories susnommées, mais il s’agit avant toute chose d’un film de relation et de réunion. Un genre qui n’est pas nouveau, mais très discret. Les relations entre les personnages montrent une forme de bienveillance à la fois infinie et très particulière. À travers son histoire, Give Me Liberty présente le personnage de Vic portant le monde entier sur ses épaules. Il porte ses compatriotes mis de côté, il défie la société et il ne se plaint à aucun moment. Qui n’aurait pas craqué et tout foutu en l’air, envoyant chier la moitié des personnes dans le minibus au passage, au bout ne serait-ce qu’une heure après son départ de chez lui ? Personne n’aurait eu la patience et l’abnégation de ce jeune russe. Il porte le monde qui ne se donne pas la peine de le remercier, d’être là pour lui et ne se prive pas pour lui casser du sucre sur le dos. C’est là où le message devient politique puisqu’il représente une grande partie de la société actuelle et démarque bien les différentes strates de celle-ci, Vic étant le citoyen moyen qui trime sans broncher et sans jamais recevoir une once de reconnaissance.

Mais avant tout c’est l’amour entre les êtres que dégage Give Me Liberty qui est intéressant. Vic trouve vite en Lima, un camarade russe qu’il rencontre le jour des funérailles, un soutien psychologique très fort et réconfortant. Inattendu cela va de soi, indéfectible étonnamment, et surtout faisant le lien entre lui et ses passagers. Malgré la colère, l’énervement, l’impulsivité des caractères et les confrontations psychologiques qui se jouent devant nous, c’est irrémédiablement le sentiment de bienveillance et d’entraide qui prend le pas et ressort de cette histoire. En VO, le spectateur crierait volontiers « GIVE HIM LIBERTY » s’il le pouvait tant le héros prend sur lui et muselle ses besoins et envies de l’instant pour répondre aux besoins et attentes des autres. Faire passer l’intérêt commun devant son propre intérêt. Son mutisme amène des gens d’horizons différents à se côtoyer, se connaître, se découvrir et s’aimer malgré les apparences et les différences. Un amour de son prochain également dans cette mise en avant des handicapés mentaux et moteurs. Souvent oubliés et délaissés de nos sociétés on les découvre sous un visage plein de tendresse et de compassion. Give Me Liberty est le parfait exemple de film d’amour sans pour autant être un film romantique. C’est l’improbabilité de la situation et l’inattendu de ses conséquences qui apparaissent passionnant à analyser et à découvrir. Un chemin de traverse singulièrement envoûtant et diablement exaltant.

L’histoire est partiellement autobiographique de la part du réalisateur. Avant de devenir cinéaste il était conducteur accompagnateur de personnes à mobilité réduite. En un film se déroulant sur une journée, le cinéaste a su retranscrire les plus beaux moments que son métier lui a permis de vivre au cours de sa vie. L’écriture est irréprochable et remplie de sagesse. Il faut bien admettre qu’une telle activité permet d’avoir un nombre d’expérience et de discours de vie assez impressionnant dont le cinéaste a su tirer parti. À cela s’ajoute un jeu d’acteur extrêmement juste et particulièrement convaincant. De la part de tous. On se sent comme au sein d’une très grande famille un peu extravagante mais pleine de vie et d’échange. Une totale et excellente surprise qui sait tirer le positif de toutes les situations.

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