Tolkien : Histoire d’un aller et retour

Le processus de création est quelque chose d’inexplicable, de propre à chaque artiste et il a toujours été difficile d’en représenter l’effervescence au cinéma. D’où le peu de films réussis portant sur un compositeur (exception faite du génial Amadeus et de son formidable parti pris) ou sur un écrivain. Que raconter d’un écrivain d’ailleurs ? Que faire pour intéresser le spectateur à ses œuvres et rendre compte de son travail ? Et bien pas grand-chose à part montrer combien la vie du dit écrivain a influencé son processus créatif. Dans le cas de J.R.R. Tolkien, l’auteur du Seigneur des Anneaux, que l’on ne présente plus, il y avait effectivement de la matière. À faire un bon film ? Peut-être pas…

Quiconque connaît un peu le travail de Tolkien a immédiatement saisi son profond amour de la campagne anglaise, son sens de la camaraderie évident, sa fascination pour les langues au point d’en créer de nouvelles et son traumatisme vécu lorsqu’il était dans les tranchées de la première guerre mondiale où certaines visions d’horreur l’ont considérablement marqué et influencé pour créer Sauron et le Mordor. Analysée sous toutes les coutures par de nombreux auteurs, l’œuvre de Tolkien se voit ici synthétisée dans ce biopic à l’image de la plupart des films du genre : intéressant mais totalement fade.

Réalisé par le finlandais Dome Karukoski, Tolkien nous conte la jeunesse de l’écrivain, son amitié indéfectible avec trois camarades de lycée, ses envies de changer le monde, son amour pour la belle Edith et la façon dont la guerre l’a changé (en un sens, Bilbon c’est lui). Un beau programme réalisé de façon scolaire, le film ne sortant jamais des sentiers battus, s’autorisant seulement quelques visions d’horreur saisissantes mais bien trop peu pour pleinement convaincre. D’ailleurs, quand on sait combien la guerre a marqué Tolkien, il est dommage de voir cette partie expédiée en peu de temps quand on s’attarde volontiers sur d’autres séquences plus anecdotiques.

Le problème du film est ne jamais parvenir à nous transcender, de ne jamais nous passionner, se contentant d’être farouchement didactique. À l’exception d’une très belle scène émouvante sur la fin où Tolkien défend l’importance de la poésie dans ce monde violent, le film ne donne jamais les frissons attendus. Et pour cause, ces frissons ne pouvant finalement que se ressentir en lisant Tolkien et en se plongeant dans son univers. C’est à ça que le film invite, nous servant près de deux heures d’un récit que l’on a l’impression d’avoir vu mille fois pour mieux nous plonger dans des écrits qu’on ne se lassera jamais de relire. Ce n’est certes pas la faute de Nicholas Hoult, apportant l’émotion et la fraîcheur nécessaire au personnage, mais c’est tout simplement la faute d’un sérieux manque d’originalité venant nous rappeler qu’il est toujours bon de préférer le travail d’un écrivain à sa vie privée…

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