Happy ! – saison 1 : L’esprit de Noël

Avec ses personnages hauts en couleur et son univers aussi violent que délirant, Happy !, comics en one-shot sorti de l’imagination du prolixe Grant Morrison et dessiné par Darick Robertson avait forcément de quoi interpeller les sirènes de l’écran. Intelligents, Morrison et Robertson en ont choisi la forme, créant eux-mêmes la série basée sur leur travail. Une approche pertinente associée au travail du réalisateur Brian Taylor (qui met en scène 5 épisodes de la saison) avec qui Grant Morrison développe l’ensemble de la série pour un résultat détonnant ! Diffusée sur Syfy, visible sur Netflix et disponible en DVD et Blu-ray chez Elephant Films depuis le 26 mars dernier, la première saison de Happy ! est un sacré délire que l’on aurait tort de ne pas suivre !

Imaginez un peu : Nick Sax, ancien flic, est devenu un tueur à gages alcoolique, dépravé et auto-destructeur au cœur fragile. Aimable comme il est, ignorant de la plupart des conventions sociales, il dérive seul, enchaînant les contrats avec une belle efficacité. Après un contrat qui ne s’est pas passé comme prévu, Nick se retrouve poursuivi par une bonne partie de la mafia de la ville. Mais ce n’est pas le seul de ses problèmes puisque Nick ne tarde pas à faire la connaissance de Happy, une petite licorne bleue qui n’est autre que l’ami imaginaire de Hailley, une fillette kidnappée par un maniaque déguisé en Père Noël. Or, Hailley est la fille de Nick. Acceptant tant bien que mal la situation, Nick va retourner une bonne partie de la ville pour retrouver Hailley…

Si ce n’est pour la présence d’un ami imaginaire aussi bavard que volubile, le pitch de Happy ! est finalement assez classique mais c’est bien cette présence tenant du fantastique (que Nick prend d’abord pour une hallucination) qui fait tout le sel de la série. Car à partir du moment où l’on accepte l’existence de cet ami imaginaire, on accepte tout ce que la série nous propose, à savoir un univers particulièrement malsain où personne ne semble vraiment avoir les pieds sur terre, chacun baignant dans son joyeux petit délire et dans ses préoccupations étranges. Entre un Père Noël schizophrène et terrifiant, un mafieux ambitieux aux goûts vestimentaires douteux, un homme de main sadique à l’anatomie étrange, un énigmatique boss déguisé en insecte géant, une mamma italienne suivie en permanence par une émission de télé-réalité et un jeune homme transformé en zombie inquiétant, Nick Sax semble presque totalement normal.

Tout en étant outrageusement vulgaire, délirante (une scène tout droit sortie de Pulp Fiction aura de quoi nous marquer) et presque caricaturale dans les traits premiers de ses personnages, Happy ! parvient cependant à éviter tous les écueils qui se dressaient devant elle. En effet, l’équilibre de ton est constamment maîtrisé, permettant à la série de ne pas simplement être un gros délire qui tache sans intérêt mais une œuvre à part entière, singulière au possible avec, au-delà d’une réalisation énergique, une vraie humanité dans l’écriture de certains de ses personnages. Si le parcours de Nick est de facture classique, devant accepter sa paternité et devant apprendre à faire de nouveau équipe avec quelqu’un, il n’en est pas moins touchant. Le personnage, à la fois féroce, violent et complètement paumé est incarné avec une énergie communicative par Christopher Meloni. L’acteur, connu pour ses rôles dans Oz et New York – Unité Spéciale, fait quasiment le show à lui seul à grand renfort de grimaces, de regards hagards et de répliques bien senties. Ayant visiblement bien compris dans quel univers il évoluait, Meloni se régale tandis que bizarrement, le personnage d’Happy (doublé avec malice par Patton Oswalt) avec ses préoccupations plus empathiques, permet de ramener Nick vers quelque chose de plus terre-à-terre. Une alchimie bienvenue à laquelle le personnage de Meredith (Lili Mirojnick, belle découverte que l’on n’avait jamais vue avant malgré de nombreux petits rôles télévisuels), ancienne co-équipière de Nick vient se greffer pour ancrer le récit dans une réalité bien concrète.

Car si le délire est là, Happy ! n’oublie jamais de rappeler que sa violence n’est pas gratuite et s’inscrit dans une réalité malsaine où l’on croise réseau de trafic d’enfants, pulsions sexuelles destructrices et bébé mis dans des micro-ondes, expliquant pourquoi Nick a pu craquer un jour. Dans la série, la beauté du monde se révèle peu à peu dès que l’on accepte de se livrer à l’autre et il faut aller loin pour la trouver, cachée sous un tas d’immondices ne prenant pas forcément la peine de vraiment se dissimuler. Une perception de la réalité finalement pas si distordue que ça de la part des créateurs de la série qui livrent ici une première saison à l’équilibre maîtrisé, les huit épisodes énergiques s’enchaînant avec un plaisir non dissimulé, le tout se montrant hautement réjouissant et particulièrement inventif lors de certaines séquences.

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