Aniara : Exaspérante odyssée.

Nous avions découvert Aniara à la dernière édition des Arcs Film Festival, nous le retrouvons pour cette 26e édition du Festival International du Film Fantastique de Gerardmer. Ce premier long-métrage des réalisateurs suédois Pella Kagerman et Hugo Lilja nous avait laissé un goût amer à la première projection. Cette sensation est toujours présente, plus forte encore quand on expose le film au cœur d’une sélection semblable. Aniara est à sa place à Gérardmer. La pertinence de cette présence d’un essai extrémiste qui en laissera plus d’un sur le carreau, dont nous après deux projections du film. Puis nous sentons ne pas être les seuls à entendre les soufflements et ressentir la gêne envahir la salle par moment. Mais il crée l’enthousiasme chez certains, alors nous préférons vous conseiller de vous faire votre propre avis après avoir lu ses lignes conjuguant objectivité et subjectivité.

Aniara débute sur le décollage d’un vaisseau paquebot évacuant une population de la Terre en direction de Mars. D’emblée nous faisons face à l’examen d’une société consommatrice et destructrice. Grossièrement, le film nous renvoie à nous-mêmes. L’étude du film est facile, car les décors sont francs. Le film ressemble à un centre commercial froid où les voix sans vie guident l’équipage tel des moutons par le berger. 

Aniara est le nom de ce paquebot emmenant ce petit monde vers Mars. Sorte de grand temple du consumérisme, l’engin propose la continuité de la vie sur Terre avec son lot de magasins et d’activités. Mais tout ne va pas se passer comme prévu. La rencontre avec un amas de débris spatiaux va perturber la trajectoire initiale et changer par la même occasion le destin de ses nombreux passagers. 

Aniara est certes une œuvre grossière, mais suffisamment engagée pour assurer l’intérêt. Si le film utilise la science-fiction pour parler de notre société, son traitement froid et commun en laissera plus d’un sur le carreau. Comment ne pas penser à 2001, L’Odyssée de l’Espace ou au Zombie de George Romero pendant tout le film. Si l’engagement des deux réalisateurs est à saluer, soulignons que les références prennent le pas sur les intentions. Aniara est un essai contemplatif et claustrophobe. Le film peine à respirer par cette insalubrité qui s’en imprègne petit à petit. Les personnages, à la dérive, disjonctent en formant des alliances malsaines, une secte se créant pour solliciter l’espoir. Dans ce microcosme renvoyant à notre société instable, le film nous rejette tous nos maux à la gueule. Aniara est un jusqu’au-boutisme misanthropique assumé n’assurant jamais le plaisir de cinéma.
Aniara est une expérience désagréable de cinéma. Il soulève sans nul doute des questions sur l’homme, nous mettant face à nous-mêmes. Mais de cette franchise, il n’interroge jamais sincèrement le spectateur recyclant des préceptes écoulés depuis 50 ans. Ce qu’il a à nous dire, nous le savons déjà, pire le cinéma peine à trouver sa place dans ce déluge de science-fiction soigné.

D’un soin rare et d’un engagement total, Aniara nous suspend envers un pessimisme plombant. Face au vide, nous étouffons. Œuvre épurée partageant son aspect visuel entre de beaux plans spatiaux et des environnements terriens communs (les centres commerciaux; aéroports), le film propose une immersion relativement convaincante dans son univers. Un vaisseau-planète convoquant nos peurs et nos faiblesses, la psychologie fragile de l’homme face à ces responsabilités et ce besoin de consommer ouvertement. La pollution de l’homme qui s’évade ailleurs en emportant son monde écœurant et suffocant pour le reproduire à l’exactitude. Aniara nous met face à nos responsabilités, une œuvre d’utilité publique en dépit de son malaise évident. Le film nous force à la remise en question, forcément nous ne sortons pas indemne d’un tel spectacle. Que l’on apprécie ou pas, Aniara se forge en nous, poussant à la réflexion des actes et devoirs de l’homme envers sa nature. Attention le voyage ne sera pas sans turbulences.

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