Border : Stupeur et grognements

Déjà réalisateur d’un premier film de genre assez troublant en 2016 (Shelley), le cinéaste Ali Abassi adapte ici une nouvelle de John Ajvide Lindqvist (l’auteur du roman ayant inspiré Morse) et confirme son goût pour un mélange des genres tout à fait hétéroclite, donnant vie à des œuvres uniques, farouchement déroutantes.

Border nous raconte l’histoire de Tina, une douanière au physique disgracieux pourvue d’un sens de l’odorat extraordinaire. Capable de flairer la moindre once de culpabilité chez les gens, elle est très efficace dans son travail et rapidement contactée par la police pour retrouver la trace de pédophiles. Bien qu’efficace dans son travail, elle est seule dans sa vie privée, son compagnon Roland ne lui accordant guère d’attention. Le jour où elle rencontre Vore, un homme qui lui ressemble physiquement, elle le trouve immédiatement suspect tout en étant irrésistiblement attirée par lui…

Difficile d’en dire plus sur l’intrigue sans déflorer ce qui fait le sel de Border. A savoir un film totalement inattendu, radicalement déroutant et parfaitement original. En brassant les genres et en filmant au plus près ses acteurs méconnaissables derrières d’épais masques au rendu étonnant, Ali Abassi impose un ton tout à fait personnel. S’attardant largement sur le personnage de Tina (surprenante Eva Melander, aux grognements et aux reniflements étonnamment expressifs), Border n’a aucune hésitation à montrer les personnages sous toutes leurs formes. Gros plans, nudité, Ali Abassi filme personnages sans pudeur mais avec une certaine tendresse sans non plus avoir peur du grotesque (saluons à ce titre la prestation hallucinante des acteurs qui s’abandonnent totalement à leurs rôles). A travers la rencontre entre Tina et Vore, le film permet surtout à Tina d’apprendre à se connaître pour mieux se questionner sur son humanité.

Difficile cependant de totalement accrocher à Border tant le film multiplie ses ramifications et sa mise en scène peine à donner de la respiration au récit. Donnant parfois l’impression de prendre plusieurs directions, le récit met du temps à complètement nous attacher aux personnages et Border accuse un sacré coup de mou dans son deuxième acte, se reposant un peu sur la révélation concernant son héroïne. Il faudra ensuite attendre le dernier tiers du film pour que celui-ci révèle son étrange sensibilité et dévoile une belle émotion, toutefois un peu tardive, les spectateurs moins ardus pouvant décrocher en cours de route sans qu’on puisse vraiment le leur reprocher…

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