Pupille : Le goût de la vie.

Nous avions fait la connaissance avec Jeanne Herry pour la sortie de Elle l’adore en 2014 avec Sandrine Kiberlain et Laurent Laffite. Un film noir sur fond de fanatisme pour un chanteur manipulateur qui avait créé la surprise et la révélation d’une réalisatrice, fille de Miou-Miou et de Julien Clerc.
Jeanne Herry a un talent indéniable, une vision propre qui se dessine avec son nouvel essai, Pupille. Loin du thriller, Jeanne Herry signe une fresque dramatiquement joyeuse sur un pupille de l’état, de sa naissance jusqu’à son adoption. 

Pupille est fascinant car il n’alourdit jamais son propos envers le spectateur. Au contraire, Jeanne Herry est bienveillante avec lui, dessinant une mécanique claire. Une jeune fille prend son scooter en direction de l’hôpital. Elle va accoucher sous X, car sa mère ne comprendrait pas. Elle a caché sa grossesse à tous, l’erreur d’un soir avec un gentil garçon de passage. Le processus qu’enclenche cet acte ne sera jamais aggravé par l’administration et/ou le manque de savoir-faire de la réalisatrice. Au contraire, il engage un mécanisme huilé par un optimisme et une douceur rare.

Tout d’abord, nous allons comprendre le parcours de cette jeune fille via son échange avec Mathilde, l’assistante sociale qui va entamer la procédure. Elle a une voix rassurante, une pédagogie qui apaise la jeune fille, mais aussi le spectateur. Le rôle est crucial pour les deux récepteurs. Dans le rôle, Clotilde Mollet est rayonnante. Son phrasé singulier et sa présence rassurante nous aspirent dans cette chaleur que le film déclenche. Cela se poursuit avec Gilles Lellouche. Il incarne Jean, un assistant familial fatigué de prendre soin d’enfants abîmés si tôt par la vie. Sa situation et la réalité de son métier sont justement montrées d’emblée, le seul réel moment sombre du film. Il est un homme qui s’occupe des pupilles, un rôle rare au cinéma, forcément alloué aux femmes. Mais Gilles Lellouche s’incarne parfaitement en étant cette force tranquille, un homme rassurant, le roc qui inspire confiance et amour. Notamment envers Karine interprétée par Sandrine Kiberlain qui retrouve Jeanne Herry après Elle l’adore. Elle sera peut-être le point noir du film. Le rôle qui force un peu le film à faire du cinéma, de contraindre les sentiments et le développement là où il n’y en avait pas vraiment besoin. Rien de dramatique, mais on aurait pu facilement s’en passer. 

Reste Élodie Bouchez, que l’on retrouve enfin au cinéma. Jeanne Herry lui offre un beau rôle, humble et fragile, celui d’une femme au parcours complexe qui souhaite être mère contre vents et marées sur une période de huit années. Élodie Bouchez est resplendissante, simple et si pétillante quand elle croise le regard du bébé, qu’elle touche enfin le but de sa vie. 

Pupille est une vague d’émotions entre optimisme et tendresse. Il y a comme une chaleur dégagée par le long-métrage en dépit du malheur qui se joue d’entrée face à nous. Puis le mécanisme nous emmène dans la magie que seule la vie peut huilée si naïvement. Rien ne casse ni s’enraye pour le parcours de ce pupille qui ne le reste pas longtemps. L’amour s’imprègne de toute part, celui de Jean qui retrouve la passion de son métier ou celui d’Alice qui devient mère.
Pupille de Jeanne Herry est l’explosion de bons sentiments, ce moment incroyable de cinéma qui s’éparpille en salles pour Noël, ce film qui va se revoir longtemps simplement pour retrouver goût à la vie.

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