Galveston : L’Amérique à bout de souffle

Pour les débuts de la 44ème édition du festival du film américain de Deauville, la programmation a fait fort en proposant dès son premier jour complet l’avant-première de Galveston, quatrième long-métrage de fiction réalisé par Mélanie Laurent. L’actrice, à la carrière de réalisatrice désormais florissante, surprend en adaptant elle-même un roman de Nic Pizzolatto (le showrunner de True Detective) se déroulant en 1988 entre le Texas et la Nouvelle-Orléans. On y suit le parcours de Roy, un truand que son patron a essayé d’assassiner à cause d’une histoire de femme. En s’échappant de la maison où on a essayé de le tuer, Roy sauve au passage Raquel, une jeune prostituée s’étant retrouvé au mauvais endroit au mauvais moment. Roy, qui se sait malade, décide de fuir vers Galveston avec Raquel et la petite sœur de celle-ci pour échapper à son patron mais aussi à ses démons, décidé à faire quelque chose de bien pour une fois dans sa vie…

Après Respire et Plonger, Mélanie Laurent surprend en allant explorer les territoires du film noir. Avec Jacques Audiard et Pierre Morel, elle fait partie de ces français présents à Deauville pour y défendre leurs films américains. Si de la part d’Audiard et de Morel, on est moins étonnés, on ne s’attendait pas à voir Mélanie Laurent prendre à bras le corps un genre aussi balisé. La réalisatrice s’y montre pourtant parfaitement à l’aise, balayant d’un coup les moindres doutes que l’on aurait pu avoir. Mélanie Laurent est ambitieuse et sait ce qu’elle veut filmer. Sa mise en scène, à la photographie feutrée et à la violence contenue, est implacable, dirigeant ses personnages vers leurs destins (tragiques forcément, film noir oblige) avec un sens de la tragédie saisissant. Elle filme aussi bien les moments en suspens (une très belle scène de danse entre Roy et Raquel au détour d’une nuit plus détendue que les autres) que les instants plus terribles où la mort frappe en plein cœur.

Avec Galveston, Mélanie Laurent filme l’americana avec ses rednecks, ses destins brisés et ses rêves échoués, balayés par la tornade de la vie. D’un scénario classique et de personnages archétypaux (la brute au grand cœur, la prostituée prématurément usée par la vie), la réalisatrice française tire un film qui prend aux tripes, parvenant à faire oublier la minceur de son récit en se focalisant sur des interprétations intenses. Et si l’on a déjà vu la lumineuse Elle Fanning dans le registre de la jeune femme fragile et plus mature que son âge, Ben Foster ne cesse de surprendre, composant ici un personnage dont on sent toute la violence et toute la détresse dans un seul regard. L’acteur, jamais vraiment là où on l’attend (Les amants du Texas, Comancheria) est la seconde surprise de Galveston. Celui-ci se révèle être un film noir sombre mais également pétri de tendresse à l’égard de ses deux personnages qui n’ont pas été gâtés par la vie mais aspirant tout de même au bonheur. Galveston se révèle alors être un joyau brut, parfaite entrée en la matière pour la semaine qui nous attend à Deauville en espérant trouver d’autres films de cet acabit dans la programmation du festival.

3 Rétroliens / Pings

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