Westworld – saison 2 : Quêtes inlassables de l’être humain

Après une première saison passionnante et foisonnante, Westworld était de retour cette année. La diffusion du dernier épisode récemment nous donne l’occasion de revenir sur cette nouvelle saison, ses déceptions et ses promesses.

Avec un rythme plus lent que les autres séries (une saison tous les deux ans, la 3 étant d’ores et déjà prévue pour 2020), Westworld impose au spectateur un visionnage particulièrement attentif. Elle réclame une attention de tous les instants, autant pour sa complexité narrative que par la profondeur de ses thématiques. Alors que le final de la saison 1 promettait un chaos permettant de recentrer les enjeux et la narration, il n’en est rien. Certes, les enjeux sont différents. Maintenant que les hôtes se sont rebellés, la donne a changé. Une équipe dépêchée par Delos débarque dans le parc mais sa priorité n’est pas de sauver les visiteurs. Au contraire, elle cherche attentivement quelque chose de bien précis. Chacun d’ailleurs cherche dans le parc une chose précise. Dolores est lancée dans une quête vengeresse aux côtés de Teddy, Maeve décide de retrouver celle qui fut sa fille, l’Homme en Noir cherche à percer de nouveaux secrets et Bernard a bien du mal à cacher son trouble.

Pour compliquer le tout, Westworld continue d’évoluer sur plusieurs niveaux de narration. D’un côté, le présent, quelques jours après le massacre qui fermait la première saison où l’équipe de Delos retrouve un Bernard confus sur la plage ; et de l’autre le passé, revenant sur les moments ayant suivi le massacre. Si l’on ajoute à ça de nombreux sauts dans un passé plus lointain, Westworld n’est pas loin de la confusion, surtout dans toute la première partie de sa saison où, à force de mélanger personnages, intrigues et temporalités, on a du mal à y voir clair. C’est d’autant plus flagrant qu’une bonne partie de ce début de saison n’apporte pas grand-chose au récit. Jonathan Nolan et Lisa Joy ne tardent pas à retrouver les défauts de la saison précédente, à savoir une narration inutilement étirée, truffée de dialogues un peu pompeux.

Ces défauts de narration, ne manquant pas de rendre l’intrigue plus confuse alors que les enjeux sont déjà très complexes, est ici mise en évidence par des personnages pour qui l’on n’éprouve guère d’attachement émotionnel ou de sympathie. Ford écarté du paysage (quoique, l’est-il vraiment ?), le personnage le plus emballant de Westworld devient Maeve. La mère maquerelle de la première saison développe des capacités uniques et une capacité émotionnelle incroyable. Sa quête envers sa fille (qui ne l’est pas vraiment) est touchante et la rend terriblement humaine. C’est à elle que revient certains des plus beaux moments de cette saison et c’est par elle que passe une bonne partie de l’émotion manquant à la série. Car si l’on excepte Maeve, il ne reste pas grand-monde auquel s’attacher. La quête de l’Homme en Noir devient plus confuse (bien que les flash-backs du personnage soient chargés de révélations), on se désintéresse complètement de la furie habitant Dolores et l’on se moque bien des troubles de Bernard. Le manque d’émotion est tel que l’on est presque indifférent à la mort d’un personnage présent depuis le début de la série dans l’épisode 9.

Ce manque d’émotion et d’empathie, souvent allié à une narration trop complexe, a tendance à embrouiller le spectateur. C’est d’autant plus décevant que certaines pistes attendues, comme l’exploration de ShogunWorld largement teasée, se révèle finalement classique et sans surprise, au centre de deux épisodes seulement avec au bout une seule bonne idée, celle de la répétition. En effet, Maeve et ses compères arrivent dans le monde, surpris de retrouver leur équivalent là-bas à qui ils ressemblent étrangement. Ce à quoi le scénariste leur répond que pour créer des centaines de trames narratives, il était bien obligé de se répéter…

Dans toute sa première partie, cette deuxième saison peine à convaincre. La série est toujours aussi intelligente, toujours aussi impeccablement réalisée mais elle peine à relancer la machine. En ce sens, elle est moins réussie que la première car elle met plus de temps à se trouver. Ceci dit, pour être tout à fait honnête, quand la série décide de nous saisir et de nous captiver (généralement à partir de l’épisode 7, oui il faut être patient), elle est très forte et même largement au-dessus du panier dans ce qu’il se propose aujourd’hui. L’exigence qu’elle demande de ses spectateurs est récompensée, Jonathan Nolan et Lisa Joy aimant offrir des réponses de façon régulière.

C’est ainsi que durant toute la saison, nous en apprenons plus sur la véritable nature du parc (notamment à travers un épisode 4 particulièrement bluffant) et que la série pousse plus loin ses réflexions sur l’humanité, sa quête d’immortalité, son éternelle soif de violence et d’autodestruction et la façon dont les hôtes leur sont supérieurs car créés par les humains tels qu’ils se fantasment. Décidés à nous questionner sur le fondement même de l’humanité, Jonathan Nolan et Lisa Joy triturent les méninges de leur spectateur et poussent à la remise en question permanente.

La série en fait de même avec sa narration. Car si elle ne manque pas de défauts récurrents, elle a également pour elle une audace scénaristique assez incroyable. C’est le cas dans l’émouvant épisode 8 où, délaissant ses personnages habituels le temps d’une heure, l’intrigue se penche sur le personnage d’un Indien déjà croisé auparavant et la façon dont il s’est rendu compte que le monde dans lequel il vivait n’était pas vraiment le sien. Un épisode bouleversant et audacieux à la fin particulièrement émouvante, permettant de donner du cœur à une série qui en manquait un peu.

Mais c’est vraiment dans son final que Westworld achève de surprendre. On a rarement vu une série qui, en deuxième saison, se permettait de rebattre ses cartes à ce point. La façon dont elle se termine, lançant de nouvelles pistes prometteuses pour la saison 3, montre l’audace de Jonathan Nolan et Lisa Joy ainsi que leur intelligence. Intelligence de ne pas tourner en rond alliée à une volonté farouche de mener toujours plus loin le récit. Une telle audace ne pousse qu’à l’admiration et prouve qu’en dépit de ses défauts, Westworld reste bel et bien la série la plus intelligente du moment.

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