Jurassic World – Fallen Kingdom : La chute d’un mythe !

Trois années après la sortie de Jurassic World, que retenir ? Peu de choses malheureusement. Récital d’une saga se tenant grâce à Jurassic Park de Steven Spielberg, chef-d’œuvre de divertissement sorti en 1993 dont les générations suivantes la sortie du film vouent un amour sans failles. Les générations d’après, mais aussi d’avant, ces petits gamins qui ont vu débarquer le film en salles ou en vidéos-clubs à l’époque ne se remettant toujours pas de la première apparition des dinosaures ou celle du T-Rex. 

Deux suites et 25 années plus tard, comme il est de coutume aujourd’hui dans le marché hollywoodien, il fallait relancer la machine. Bien que finalement on n’avait guère besoin d’une énième résurrection. Tout n’avait pas déjà été dit dans Jurassic Park ? Steven Spielberg peinant lui-même a relancer une machine grippée dès le deuxième film, Le Monde Perdu, malgré son savoir-faire inné. Que faire alors avec Jurassic World ? 

Si les nouveaux films sont des suites avérées, il faut peu d’images pour vite s’apercevoir que nous faisons face à des remakes maquillés façon Olivia Newton-John dans Grease. Le premier essai, revival crétin, est signé par Colin Trevorrow vainqueur par KO grâce à un box-office dépassant le milliard de dollars de recettes mondiales en 2015. Le second par Juan Antonio Bayona, sous-titré Fallen Kingdom, en salles ce 6 juin, sur un scénario toujours écrit et supervisé par Trevorrow, en charge de la ligne narrative de cette nouvelle trilogie.

Juan Antonio Bayona est l’un des grands artisans espagnols de ses dernières années comptant en sa faveur trois premiers bijoux (L’orphelinat; The Impossible; Quelques Minutes après minuit). Son embauche en tant que réalisateur de cette suite nous rassurait. Tout du moins elle était l’assurance de profiter au moins d’une mise en scène inspirée et léchée. Ce à quoi nous aurons le droit, le réalisateur nous servant sur un plat doré un divertissement à la mise en scène sans fausse note. Le problème est à chercher ailleurs. 

Avec la série des Jurassic World, il y aura en permanence des problèmes, cette résurgence ayant été confectionnée pour les mauvaises raisons. Comment se départir de ce pitch et cette volonté opportuniste de surfer sur le mythe « Jurassic Park » via des scénarios convenus et faciles à ce point ? Alors que Colin Trevorrow surfait sur la vague « Avengers » avec l’alliance des dinosaures supers-héros dans le premier film, voici venu le temps de jouer à Frankenstein avec un zeste de Resident Evil. La faute à Colin Trevorrow (et non à Voltaire) qui signe l’histoire de ce Fallen Kingdom, avant de revenir s’occuper du 3e potentiel film concluant une nouvelle trilogie. Le fait est que le royaume est définitivement perdu à l’image d’Isla Nublar sous la lave du Volcan. La lave, symbole d’un opportunisme vil d’une production qui coule sur un film réchauffant un plat servi une dizaine de fois. 

Que dire sans soupirer comme un enfant avant un caprice ? Le caprice de ne pas avoir accès à un film digne de ce nom se suffisant à n’être qu’un divertissement pop-corn sans âme ni identité. On est comme démuni face à ces simili-plans de redécouverte béats des « longs-cous » ou des plans iconiques du T-Rex hurlant tel le lion de la Métro Goldwyn-Mayer. Oui, mais ensuite ? Une nouvelle histoire de clonage, de vente de dinosaures pour en faire des armes de destruction massive ou encore des jouets pour gamins de riches mafieux. Mais encore ? Un méchant héritier/tuteur incarné par Rafe Spall reprenant la suite du travail de Peter Ludlow, personnage miroir et méchant du Monde Perdu (1997). 

Fallen Kingdom est le film miroir du Monde Perdu. Ce même film ayant déçu tous les fans et cinéphiles qui est ici basiquement remaké pour arranger ce Jurassic World 2. Bienvenue sur Isla Nublar où un volcan grogne menaçant les gentils dinosaures. Il est alors décidé de les déplacer sur une autre île, invitant les personnages du premier film à la petite fête. Puis bienvenue dans la ville parce que tout cela puait bien évidemment l’arnaque depuis le début. Bref on sort l’assiette du micro-onde avec cette odeur d’un Big-Mac 20 ans d’âge. On est comme dépourvu face à un spectacle sans magie, sans identité, avec cette envie de faire du neuf avec du vieux. Le recyclage est de mise pour préserver la planète cinéma d’une prise de risque bienfaitrice. Un deus ex machina recyclant tous ses vieux titres polluant notre nostalgie. Disney en a fait sa nouvelle marque de fabrique, Universal suit bêtement avec son catalogue de monstres (Monsters Universe) et ses dinosaures numériques. Le spectateur a bon dos devant subir les affres du manque d’imaginations et de prises de risque des usines de divertissement qui spécule avant de créer et rêver. Vite, Captain Planet à l’aide ! 

Que faut-il sauver de Jurassic World – Fallen Kingdom ? Sa générosité en est une évidence. Le film est un pur divertissement rappelant sans commune mesure le cinéma bis qui suivra la sortie du premier opus de la saga. Fallen Kingdom a le goût du bis « Cormanien » produit rapidement pour surfer sur une vague cachant un vil monstre à l’intention de croquer quelques spectateurs. Sur l’instant, on est pris au cœur d’un film au rythme trépidant. La magie d’une riche production qui ne lésine sur rien. Des coûts astronomiques pour un scénario du pauvre alignant tous les poncifs que Steven Spielberg lui-même avait réussi à éviter il y a 25 ans. Ici tout fonce tête la première dans le mur ne s’épargnant jamais les séquences inutiles et l’intrigue piétinant pendant 2h09. Finalement il y a peu à sauver de ce royaume en décrépitude. Seul J.A Bayona s’éclate derrière la caméra, lui à qui l’on confie son premier blockbuster. 

Le réalisateur espagnol fait ce qu’il peut avec le peu de matière d’un scénario rêche. L’homme enchaîne alors les plans iconiques et sème une générosité sans faille pour divertir à minima le chaland venu par là se rappeler une nostalgie certaine et/ou appâter par des affiches accrocheuses. 

L’espoir était de mise à vouloir oublier le calvaire d’une première mise en bouche sentant le rance. Malheureusement, Fallen  Kingdom réemploie la même recette aux ingrédients périmés, quand il ne colle pas aux conformismes ambiants. Ici plus d’associations entre supers-dinosaures, mais une seule bestiole à la couleur bleue, laquelle ne manque plus qu’un bouclier en adamantium pour être définie comme une héroïne à part entière dont le regard empathique finale prouve l’entrée du cinéma actuel dans une ère jurassique.