Mandy : Sans espoir de retour

Cette année à Cannes, la sélection de La Quinzaine des réalisateurs s’est avérée plus intéressante et excitante que la Sélection Officielle. Dans le lot, s’il y a un projet qui nous titillait plus particulièrement, c’était bien Mandy que l’on a donc rattrapé au Forum des Images dans le cadre de sa reprise de la Quinzaine. On vous explique : Nicolas Cage y joue Red, un bûcheron dans l’Amérique des années 80 qui voit sa femme assassinée par une secte de fanatiques timbrés. Résultat, Red se lance à la poursuite des meurtriers avec une rage meurtrière qui laissait présager un film de vengeance résolument sombre et gore.

Malheureusement le film ne tient pas ses promesses. Panos Cosmatos (fils de George Pan Cosmatos, réalisateur de Rambo 2 et de Cobra, dont c’est ici le deuxième long-métrage) a certes ingéré de nombreuses références dans le but de faire son film mais crée un véritable foutoir dont on peine à reconnaître les ambitions artistiques. Délire psychédélique formel à grand renfort de musique envoûtante (merci à Jóhann Jóhannsson dont c’est l’une des dernières compositions) et de filtres rouges, Mandy n’est rien d’autre que les errances d’un cinéaste qui n’a finalement pas grand-chose à raconter mais qui aime tellement se regarder filmer qu’il fait durer son film deux heures là où il aurait pu ne faire qu’1h20.

Il faut dire que Mandy a un vrai problème de ton. Très sérieux et dramatique dans sa première partie, le film vire à la gaudriole gore dès que Red met sa vengeance en action. Cosmatos lui-même semble ignorer si son film doit se prendre au sérieux ou non et oscille sans cesse entre le ton dramatique pur et pur et le délire méta. Il n’y a rien de pire qu’un artiste tiède qui n’assume pas ses positions et c’est exactement ce qui pose problème avec Mandy, un film qui n’embrasse jamais vraiment une dimension plus que l’autre et qui se retrouve totalement décalé, laissant un public bien incrédule quant à l’objet qu’il a sous les yeux.

Pour rajouter à la gêne, on notera la performance complètement dingue de Nicolas Cage que Cosmatos n’a visiblement pas pris la peine de diriger. L’acteur, aux errances cinématographiques aggravées au fil des années, semble complètement aux fraises et aligne punchlines stupides et grimaces forcées dans la deuxième partie du récit. Le comble de la gêne intervient à mi-chemin du film où Cosmatos nous offre un long plan dans lequel Red, chagriné par la perte de sa femme, laisse éclater son chagrin. La prestation de Cage y est d’une outrance si incroyable que la salle entière s’est mise à pouffer, visiblement gênée de constater que le Nicolas Cage des grands jours meurt un peu plus à chacun de ses films.

Alors certes, Cosmatos sait poser une ambiance (mais il ne fait que ça) et sait filmer des gueules (avec la clé des trognes comme Linus Roache, Ned Dennehy, Bill Duke, Richard Brake) mais ça n’a jamais suffi à faire un film. Mandy, véritable trip de son auteur, n’est au final qu’une œuvre bancale ne trouvant jamais son ton et dont le processus un brin prétentieux finit par nuire à tout le monde, y compris à lui-même.

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