25e édition du Festival de Gérardmer : Jour 3

La neige tombe à gros flocons sur la ville vosgienne. Il n’aura pas fallu attendre longtemps, à peine une journée, pour avoir notre ambiance glaciale en sortant de chaque projection journalière. Ce matin, la journée commence avec un retard. Honte à nous, on le sait, mais que dire pour s’excuser avec les petits déjeuners royaux que nous sert l’hôtel le matin ? Une vie de festivalier creuse la faim, même la nuit où nous croulons sous la fatigue en rentrant tard des projections et des bars, avouons-le.

9h04 donc, arrivée au Casino pour le documentaire, Heirs of the Beast réalisé par Diego Lòpez & David Pizarro. Le film d’une durée de 1H18 revient sur le début de carrière d’Alex De La Iglesia, entre ses premiers courts-métrages, son premier long Action Mutante et Le Jour de la Bête. C’est ce dernier qui donne toute la teneur du documentaire, le film étant une véritable déflagration fantastique à sa sortie en 1995. Les acteurs majeurs de la production reviennent sur leur expérience, nourrissent le film d’anecdotes, mais surtout rendent un hommage vibrant à Alex Angulo, aujourd’hui disparu. Heirs of the Beast déçoit finalement sur la longueur. Le film n’arrive jamais à dépasser la barrière du simple making-of du Jour de la Bête. Le film de Diego Lòpez & David Pizarro est certes un documentaire complet, mais n’outrepasse jamais sa fonction basique informative pour devenir un réel film sur un film avec un caractère et une direction précise. Une véritable volonté de mise en scène en fait.

10h30, le temps pour nous de traverser à nouveau Gérardmer pour débarquer à la MCL et découvrir Prey, le nouveau film de Dick Maas. Dick Maas, on le connait plutôt bien, mais surtout on l’apprécie pour Amsterdamned et l’Ascenseur, deux productions 80′ ayant nourri notre cinéphilie adolescente en vidéo-club. Le réalisateur revient ici avec un film férocement mauvais. Nous assistons hilare à du grand n’importe quoi dans les rues d’Amsterdam où un lion chasse librement et sans réelles justifications. La horde de personnages crétins partant à ses trousses n’aide en rien la mise en scène ringarde et lourde d’un Dick Maas jouant de facilités avec l’utilisation sans fards de CGI bas de gamme. On a quand même le droit à une introduction au cœur d’une ferme n’évitant jamais la vulgarité perçue par la vision subjective du lion voyant la vie en rose. Ce dudit lion qui attaque un tramway de l’intérieur (comment est-il entré, on cherche toujours!), mange un enfant dans un parc et s’occupe violemment du premier chasseur et son fils, cousin du commissaire, sortant tout droit d’Ace Ventura en Afrique. Il n’y a vraiment rien à sauver de Prey (ou de loin !), nous avons sincèrement mal au cœur de voir Dick Maas tombé si bas, lui à la production, à la réalisation et la composition de la musique (trop) télévisuelle du film. On peut d’ores et déjà annoncer le prix du nanar de cette 25e édition du festival de Gérardmer qui revient à Prey !

Petit repas à l’hôtel puis nous repartons séparé pour une fois, Alexandre allant découvrir Avant que nous Disparaissions de Kiyoshi Kurosawa (Creepy) et moi souhaitant participer à la Master-class organisé dans la salle des mariages de la maire de Gérardmer autour de la question : Le Cinéma de genre français  : Mythe ou Réalité  ? François Cognard (producteur), Xavier Gens (réalisateur), Romain Protat (scénariste), Hadrien Soulez Larivière (scénariste) et Thierry Vigneron (scénariste/réalisateur) tenteront d’y répondre, le cinéma français ne manquant clairement pas de succès dans le genre, que ce soit critique ou public. Pourquoi aujourd’hui, alors que le cinéma s’exporte encore plus facilement qu’avant, la production française n’arrive pas à produire et réaliser un cinéma de genre concret et durable dans le temps  ?

Selon les invités à cette table, le cinéma français de Genre peut renaître de ses cendres en repensant le système, en démontrant une certaine malice à vendre les films en gestation et pour cela il faut que l’on prenne enfin en compte l’Europe comme un partenaire de financement. La discussion est intéressante, passionnée au cœur de laquelle chacun revient sur son expérience propre. François Cognard dans son travail avec Juan Carlos Médina ou le duo Cattet/Forzani ou encore Xavier Gens avec ses films à Hollywood ou sa recherche longue et périlleuse de financement en France et dans le monde. Un parcours du combattant pouvant durant jusqu’à 10ans pour certains scénarii.

Pendant ce temps, Alexandre squattait le Paradiso, vieille salle de Gérardmer aux fauteuils peu confortables ayant pour certains 40 ans d’âge. Ce qui n’a pas empêché certaines personnes de profiter de la séance de 14h30 pour faire une petite sieste. Il faut dire que le film projeté, Avant que nous disparaissions, nouvelle réalisation de Kiyoshi Kurosawa, n’a pas facilité les choses. Beaucoup trop long (2h10 quand 1h40 aurait suffi), le film est à l’image des dernières réalisations du cinéaste, oscillant entre un scénario comblant parfois le vide et de superbes idées de mise en scène, donnant à cette histoire d’extra-terrestres venus sur Terre voler des concepts aux gens (concept de la justice, de la liberté) pour préparer une invasion une véritable profondeur dramatique et romantique. Si Kiyoshi Kurosawa se permet une jolie romance et de sacrés plans (dont un panoramique circulaire tout droit sorti d’un film de Brian De Palma), la force de son récit finit plombée par un épilogue à rallonge.

Le temps ensuite pour nous deux de se rejoindre au cœur de la ville et un petit passage à l’hôtel avant d’enchaîner avec Downrange de Ryūhei Kitamura, responsable du génial The Midnight Meat Train avec Bradley Cooper et Vinnie Jones. On va ici éviter les redites, car finalement, dépité un peu par la proposition, la critique fut rapidement livrée par notre confrère Alexandre et disponible ci-jointe.

Il faut du temps pour se remettre du choc malencontreux avec Downrange. On ne s’attendait clairement pas à cela. Il nous faut bien une pomme de Terre paysanne chacun dans l’excellent restaurant La Soupe au Chouxx de Gérardmer pour repartir de l’avant découvrir le tant attendu Cold Skin de Xavier Gens. Le film se faisait sacrément attendre en France. On espérait une projection lors de la dernière édition du PIFFF, finalement, on découvre le film à Gérardmer pour un joli cadeau de la part du metteur en scène français dont on vous laisse la lecture fraîche de notre critique parue ce matin.

La journée se finit avec Cold Skin. Nos faibles forces ne nous permettant pas la motivation d’assister à la nuit Hellraiser en version restaurée bientôt en coffret ultime chez ESC éditions. Une bonne nuit de sommeil nous attend pour attaquer l’avant-dernière journée, un samedi chargé qui commencera avec 78/52, documentaire revenant sur la célèbre scène de la douche de Psychose réalisé par Alfred Hitchcock. Un décryptage prometteur sous toutes les coutures possible et imaginable. On vous en reparle demain, frais comme un gardon, pour le moment, on raccroche et on file au lit. Bonne nuit.

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