Baby Driver : Need for Music.

Et si nous venions d’assister au divertissement de l’année ? Au film le plus cool de 2017, le meilleur film aussi, celui qui fera battre les cœurs dans les classements de fin d’année  ? Le film qui reste en tête une fois vu pour servir de tampon à tout ce qui sortira en termes de divertissement et d’action les semaines à venir.

Edgar Wright a rongé son frein avec la production d’Ant-Man pour Marvel/Disney. Ayant quitté le projet pour « Divergence Artistique », on connaît depuis sa déception envers le projet. De façon directe ou indirecte, Baby Driver arrive comme détonateur à cette tragédie artistique. On y va un peu fort, mais force est de constater que Baby Driver est conduit par une force surnaturelle excitante. Faut-il voir cette introduction comme un spectacle à part entière ? L’extraordinaire de Baby Driver est mis en évidence dans les premières minutes remarquables du film. Alors que Bellbottoms de Jon Spencer Blues Explosion se lance tout comme Baby au sein de son habitacle dans un jeu passionné, la course-poursuite va être endiablée. À l’image du film, une volonté maîtrisée d’un sale gosse souhaitant prouver toute sa valeur à mettre en scène un divertissement pur et dur. Comme s’il fallait encore qu’Edgar Wright prouve sa faculté à faire du cinéma ? Le réalisateur essaie tout de même de se le prouver en réussissant brillamment.

Baby Driver est une course-poursuite opératique permanente savamment dosée et équilibrée au fil d’une playlist détonnante. T. Rex, The Champs, Young  MC ou Martha Reeves & The Vandellas, la bande-son éclectique choisie par Edgar Wright enflamme totalement la bobine. Et c’est un bonheur total même pour les moins mélophiles. Car Edgar Wright ne s’arrête pas en si bon chemin. Suite à son introduction réinventant la course-poursuite au cinéma de façon inspirée rendant hommage à Friedkin ou Refn au passage, il signe un prologue en guise de finish en plan-séquence. Un plan séquence où il s’évertue à un morceau de comédie musicale. Ansel Elgort devenant l’incarnation d’un Gene Kelly transportant le personnage au gré de la playlist de son iPod. Wright continue de nous éblouir. On comprend alors que ce sera en continu.

Baby est tout de suite le personnage d’une cinéphilie moderne. Celui qui enterre le driver de Refn. Le jeune homme lui emprunte sa posture taiseuse et son air mystérieux. Mais Baby se lâche et laisse entrevoir ses émotions par la musique. Baby ne peut vivre sans musique. Elle est le tempo de ses courses, de son quotidien et de son amour. L’amour pour son père adoptif, un vieil Afro-Américain l’ayant recueilli et élevé. Baby est un jeune orphelin vivant avec le souvenir de la mort de sa mère dans un accident de voiture. Il en garde l’iPod offert par celle-ci, lui aussi mort dans l’accident. De ce tragique événement, le jeune homme en garde des acouphènes que la musique en continu dans ses écouteurs atténue.

D’une enfance dans la rue, il en est devenu un voleur de voitures à 10 ans. D’où sa rencontre avec Doc, interprété par Kevin Spacey, à qui il a volé une voiture et sa marchandise que Baby doit rembourser. Les braquages sont là pour ça.

Mais un jour, Baby voit apparaître Debora. L’ange rédempteur le renvoyant vers l’image de sa mère, serveuse dans le même restaurant. Sous de l’air de B.A.B.Y par Carla Thomas, Baby tombe amoureux. En plus de la passion de la musique, ils partagent la soif d’évasion, sortir de cette vie. Mais Doc exige un dernier coup, celui qui va tout faire déraper.

Si Baby Driver nous promène au cœur d’un récit éculé, c’est l’énergie communicative qui nous accroche au fauteuil. Passons outre ce scénario cousu de fil blanc, écrit il y a 20 ans par Edgar Wright lui-même alors en plein rêve de cinéma. L’histoire est bourrée de références (Bonnie & Clide ; Heat ; Gun Crazy) et de convenances dont on passe outre facilement. Car le réalisateur anglais s’éclate et nous avec.

Baby Driver est un film de course-poursuite insolent. Un film de sale gosse talentueux. Mais ce sale gosse peut compter sur une bande de dingues accompagnant Baby dans ses raides. L’autre grande force du film est Kevin Spacey en boss ambigu, développant une étrange relation paternelle avec Baby. Le personnage est truculent sur la longueur, notamment dans la préparation du braquage de La Poste avec son neveu Samm.

Si Kevin Spacey sert un rôle figuré, on sera surpris par le couple criminel Buddy et Darling incarné par Jon Hamm et Eiza González. Si la demoiselle se joue du cliché de la strip-teaseuse/braqueuse aux ongles acryliques, boucles d’oreilles en or et chewing-gum aux bulles roses, Buddy s’exhorte en doux-dingue de sa bimbo. Ex-trader de Wall Street, il s’est évadé de ce monde de requins quittant femme et enfants avec sa maîtresse. D’abord bienveillant avec Baby, le troisième acte verra un pétage de plomb en bonne et due forme transformant l’homme en une furie vengeresse. On est loin du Don Draper de Mad Men, même si Jon Hamm tient une classe phénoménale en toute circonstance.

Par un casting bien trouvé et idéalement servi, un scénario classique permettant toutes les folies et une mise en scène hargneuse, Baby Driver est le cocktail détonnant attendu en cette année 2017. On percevait le potentiel du film, on salivait des premières bandes-annonces et des avis publiés, on s’exclame devant une pépite populaire complètement dingue où Edgar Wright orchestre une comédie musicale à l’action furieuse mettant en point d’orgue un personnage iconique incarné par Ansel Elgort, qui a seulement 23 ans trouve sûrement le rôle de sa carrière. Il est le Baby Driver, un personnage qu’on adorerait revoir encore et encore, ce nouvel anti-héros adorable qui a fait swinguer notre été grâce à ses playlists miraculeuses et un film pétillant.

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