Batman v Superman – l’aube de la justice : Gods Among Us

Après le très réussi Man of Steel, Warner et DC Comics ont décidé de jouer dans la cour des grands. Le but est clair : concurrencer Marvel mais s’affirmer avec un ton beaucoup plus noir. Un ton depuis largement mis en cause dans le succès en demi-teinte de ce Batman v Superman qui est pourtant loin d’être la pire chose du long-métrage, au contraire ! Depuis Warner s’est rattrapé avec un Wonder Woman amplement divertissant mais tellement proche des Marvel qu’on va commencer par s’y perdre… Après tout, est-ce si mal de ne pas se marrer devant un film de super-héros ?

Quoiqu’il en soit, à l’époque où Warner et DC croyaient dur comme fer au projet, Zack Snyder a eu les coudées franches pour réaliser ce très attendu Batman v Superman pour un résultat… inégal. Inégal mais néanmoins passionnant, animé par des thématiques profondes, finalement rares dans le genre et mises en exergue par la version longue du film, venant enrichir un contenu déjà très fort. Car le récit, quand il ne verse pas dans le spectaculaire et le fouillis scénaristique, développe une mythologie pour le moins intéressante quand il s’attarde sur ses deux héros. D’un côté, Superman, désormais vu comme un dieu pour les humains et de l’autre Batman qui voit d’un mauvais œil toutes les éventualités que l’existence de Superman viennent offrir. Car le jour où ce nouveau dieu ne sera plus du côté des humains, le pire risque d’arriver… De son côté, le jeune et névrosé Lex Luthor surveille ça avec un intérêt bien particulier…

Visiblement passionné par les deux figures emblématiques que sont Batman et Superman, Zack Snyder oriente la matière forte de son film dessus. La réflexion proposée aux deux héros sur la notion des pouvoirs et de leurs responsabilités (la bonne vieille rengaine) a quelque chose d’autant plus sombre qu’ils l’expriment tout deux violemment, en particulier du côté de Batman. Dans le rôle, Ben Affleck est d’ailleurs totalement surprenant, composant un Bruce Wayne officiant depuis 20 ans à Gotham avec un charisme et un magnétisme qu’on ne lui soupçonnait pas. Le personnage qu’il campe, voulu proche de celui dépeint par Frank Miller dans The Dark Knight Returns, s’est enfoncé dans la violence et l’extrémisme à force de combattre de terribles ennemis.

Côté casting, c’est d’ailleurs plutôt réussi (Jeremy Irons gagne notre respect en Alfred, Gal Gadot a ce qu’il faut en Wonder Woman, Henry Cavill est toujours aussi impeccable en Superman) à l’exception de Jesse Eisenberg, cabotinant comme jamais dans le rôle de Lex Luthor. Un rôle de névrosé agaçant, pas loin de beaucoup de compositions d’Eisenberg mais englobé dans un blockbuster où il perd toute sa crédibilité, loin du personnage glacial et retors qu’il est dans les comics. Exubérant au possible, Lex Luthor (et donc Eisenberg avec), passe son film à passer pour un manche. Exit donc le méchant charismatique. Et bonjour la confusion. Car en voulant rattraper son retard par rapport aux productions Marvel, Batman v Superman boucle tout un arc narratif en un peu moins de 2h30. D’où une sérieuse impression de fouillis et de désordre que la version longue viendra cependant éclaircir.

A trop vouloir lancer d’intrigues et de personnages, le film a en effet l’air d’un gros brouillon aux ambitions nobles, affichant sa volonté d’être fidèle aux comics mais en torchant tout ça très rapidement. Passée l’introduction impressionnante, on se retrouve alors pris dans des fils scénaristiques touffus et un brin clichés ou alors face à un combat final aussi impressionnant qu’irritant les yeux. C’est donc avec un sentiment mitigé que l’on sort de l’ensemble mais il faut bien avouer que Zack Snyder fait le job. On se prend au jeu, on se retrouve directement aux prises avec un Batman vieillissant (vivement le film solo avec Affleck, en dépit de ses aléas de production, ça peut être très bien !), les combats sont bien foutus, les personnages travaillés, la noirceur vraiment bienvenue mais on ne peut cependant pas s’empêcher de se dire qu’en voulant traiter autant de choses à la fois (suite de Man of steel, reboot de Batman, prélude à la Justice League), Snyder s’égare plutôt que de concentrer son récit sur une vraie trame. Inégal mais diablement divertissant et bien plus réussi qu’on a bien voulu le dire…