La Momie : monstrueusement raté

Ces dernières années, Hollywood a compris l’intérêt qu’il avait de capitaliser sur les grosses franchises pour s’assurer de grosses rentrées d’argent. Désormais, peu de films sont produits et pensés pour se suffire à eux-mêmes. A peine annonce-t-on un film qu’on clame partout qu’il aura quatre ou cinq suites. C’est le cas avec le MCU, avec l’univers étendu DC Comics, avec les films Transformers, avec le MonsterVerse et même Ridley Scott s’y met avec la saga Alien. Parfois certains projets sont tués dans l’œuf (en témoigne l’échec absolu du Roi Arthur version Guy Ritchie) mais cela n’empêche pas les studios de sans cesse miser sur des franchises à l’univers étendu. Alors que dans les années 30 et 40, les films Universal Monsters permettaient à Dracula, au Loup-Garou ou à la créature de Frankenstein de se rencontrer, Universal a décidé de lancer le Dark Universe, chapeauté par Alex Kurtzman et souhaitant réunir tous les monstres emblématiques du studio dans tout un tas de films dans le seul but de… faire du fric.

L’idée de se faire rencontrer des personnages emblématiques de l’horreur gothique, aussi géniale soit-elle (voir le comics La ligue des gentlemen extraordinaires ou la série Penny Dreadful) est particulièrement risquée. Censé lancer le Dark Universe, La Momie s’attaque donc à une tâche particulièrement lourde qui a sans doute donné du fil à retordre aux scénaristes, incapables d’y voir clair dans une production certainement alourdie par des centaines de mémos de producteurs. Car s’il y a bien une chose qui transparaît dans cette histoire développée par trois personnes (dont Alex Kurtzman et Jenny Lumet, la fille de Sidney !) et scénarisée par trois autres (dont David Koepp et Christopher McQuarrie !), c’est le caractère totalement bancal du film, ne trouvant jamais son rythme et son équilibre.

La Momie est en effet un film hybride qui n’arrive jamais à trouver le ton juste et qui oscille donc entre plusieurs genres dont l’alchimie n’opère jamais. Croisement entre le film d’aventure, l’horreur gothique, le slapstick et le film d’action, La Momie ne convainc jamais vraiment. Il faut dire que le film est écartelé entre deux identités : celle d’un blockbuster taillé pour Tom Cruise et son ego mais aussi celle de l’introduction du Dark Universe. Et autant le dire tout de suite, aucune de ces identités ne fonctionne. C’est même peut-être l’un des pires films dans lequel Tom Cruise ait pu jouer. L’acteur, d’habitude producteur habile et malin, a l’air complètement perdu dans le film, venant cachetonner au sein d’un univers qu’il ne semble pas comprendre et accusant le coup de sa cinquantaine d’années, visible à travers les failles du scénario.

Même en tant qu’introduction au Dark Universe, La Momie ne fonctionne pas. Censé servir de fil conducteur entre les films, le docteur Jekyll, directeur de l’organisation Prodigium luttant contre les forces du Mal, est un personnage fadasse à peine relevé par son double Mister Hyde, aperçu ici dans une scène ridicule où Russell Crowe ne fait même plus l’effort de jouer, se contentant de prendre une voix rauque pour jouer Hyde là où avant lui, des acteurs comme Fredric March, Spencer Tracy ou James Nesbitt faisaient de vrais efforts d’interprétation. Et surtout, noyée dans la modernité des années 2010, l’horreur gothique si chère à James Whale, à Tod Browning ou à Karl Freund ne fonctionne pas du tout. Les beaux décors brumeux font place à des scènes d’action tonitruantes et à une mise en scène insipide, affichant une fadeur affolante pour un univers pourtant alléchant.

A bien y regarder, si ce n’est pour quelques saillies d’horreur réussies (l’égorgement d’un nourrisson, tout de même) et pour le charme de Sofia Boutella, à la fois repoussante et sexy en momie, La Momie est clairement un ratage faisant partir le Dark Universe d’un mauvais pied. Là où récemment un divertissement tel que  Pirates des Caraïbes : la vengeance de Salazar parvenait à ajouter du rythme et du divertissement dans un produit calibré, La Momie ne sait que créer l’ennui et se montre amplement ridicule dans son dénouement, à moitié pompé sur The Dark Knight. Du film, il ne reste finalement qu’une envie, celle de redécouvrir la version de Karl Freund avec Boris Karloff et même celle de Stephen Sommers avec Brendan Fraser qui avait mille fois plus de charme.

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